Ma découverte, l’année dernière, du Limousin, de son maillage associatif dense et de volontés politiques fortes me font penser que le plateau de Millevaches peut devenir un lieu exemplaire de la démonstration du bien fondé de l’éco-construction et de l’éco-réhabilitation en terme de filières courtes, d’économie d’énergie et de puits carbone.
Dans un pays où la dépense énergétique générée par le secteur du bâtiment (matériaux, transport, construction et utilisation) représente 50% de l’émission globale de CO2, l’éco-construction en général et la paille en particulier sont capable d’apporter une réponse forte. L’éco-construction en bottes de paille, outre des retombées économiques en terme d’emploi et de développement de filières locales, peut générer du lien et du bien social par le biais de l’apprentissage de savoir faire, de chantiers solidaires et de l’auto-construction, qui permettent de se ré-approprier l’acte de construire pour se construire ensemble. Ce territoire, haut lieu des résistances, peut devenir une région phare de la résistance aux “lobbies“ industriels du bâtiment qui protègent leur monopole derrière des labels, certifications et autres normes.
Septembre 2001 : Parait le quatrième numéro de La Maison Ecologique avec un dossier sur la construction en paille. Je découvre ce matériau qui sur papier correspond totalement à ma quête d’un matériau simple de mise en œuvre, respectueux de l’environnement et de l’humain.
Printemps 2002 : Je rencontre pour la première fois Pascal Thépaut lors d’une rencontre du mouvement des “Oasis en tout lieu“ en Normandie. A l’époque je suis artisan et restaure des maisons à colombages et torchis. Pascal est lui-aussi artisan et précurseur de la construction en bottes de paille en France. Il m’explique sa démarche constructive et les avantages de ce matériau.
Printemps-été 2003 : Je réalise avec Pascal mon premier chantier de construction ossature bois-remplissage en bottes de paille dans la Manche. Cette première réalisation me permet d’envisager de ne me consacrer qu’à ce type d’habitat, bioclimatique et éco-construit. Le reste de cette année, je le consacre à un travail de recherche sur les matériaux, le bio-climatisme et les maisons passives.
Octobre 2005 : Après avoir, en deux ans, participé à une douzaine de réalisations en bottes de paille et rencontré bon nombre de maîtres d’ouvrage, auto-constructeurs et les quelques professionnels du secteur, je décide avec Bruno Grondin, auto-constructeur, de créer l’association Les Compaillons pour tenter de regrouper dans une même entité tous les acteurs de la construction en bottes de paille. Cette création est très vite suivie du site Internet et du forum voué à l’entraide sur les chantiers d’auto-construction.
Mai 2006 : André de Bouter (La Maison en Paille) nous contacte pour organiser les premières rencontres nationales de la construction paille au Lac de Lambon dans les Deux Sèvres, qui a vu sortir de terre le premier établissement public en bottes de paille. Deux jours d’échanges et 60 participants plus tard, Les Compaillons se transforment en Réseau Français de la Construction en Paille.
Juillet 2007 : Je participe en tant que professionnel à la réalisation d’une maison en bottes de paille à St Moreil chez les boulangers bios Jérôme et Stéphanie. J’y rencontre parmi les participants bénévoles et les autres artisans professionnels, Philippe Simon, Johanna Corbin, Guillaume Paillard, Marion Michaud et Yann Hélip Soulier. Un projet d’éco-site se préfigure à Gentioux….J’ai bien envie de faire partie de l’aventure pour y porter le projet d’un lieu dédié à l’éco-construction.
Printemps 2008 : Je m’installe avec les autres participants sur le domaine de la ferme de Lachaud à Gentioux et l’aventure commence ...
Le Réseau Français de la construction en paille compte actuellement 400 adhérents dont 60 professionnels et 30 associations sur tout le territoire national. Nous travaillons sur des thématiques telle que la reconnaissance de la paille comme matériau constructif et son assurabilité décennale, la formation de nouveaux professionnel-le-s, la sécurité des chantiers d’auto-constructeurs, l’expérimentation de nouvelles techniques et de matériaux associés dans le but de promouvoir la construction en paille comme alternative aux matériaux énergivores.
Le Réseau fait paraître un journal internet Infopaille téléchargé à 15000 exemplaires tous les 6 mois et une lettre d’informations et d’annonces mensuelles, Les Paillettes, réservée aux adhérents.
Nous organisons deux rencontres publiques par an, une en mai, le Festipaille, et une en Novembre qui inclut notre assemblée générale. Nous venons de lancer un recensement des maisons construites en bottes de paille. Plus de 400 ont déjà été dénombrées. Nous estimons que mille maisons en paille sont déjà construites en France et que plus d’une centaine sont en cours de réalisation cette année.
Le site internet va être “relooké“ cet automne par Liminfo à Royères-de-Vassivière et permettra de communiquer des informations plus nombreuses et de manière interactives..
Les 6° rencontres nationales du Réseau ainsi que les premières assises nationales de la formation à l’éco-construction auront lieu le week end du 11 Novembre 2008 sur quatre jours à…..Eymoutiers. Des animations, projections et démonstrations publiques auront lieu dans ce cadre.
Le coût moyen à la construction d’une maison “bioclimatique éco-construite en bottes de paille avec chauffage bois et eau chaude sanitaire solaire“ est sensiblement du même coût qu’un pavillon “conventionnel béton polystyrène chauffage nucléaire“ c’est à dire 1200 € du m2 habitable. A l’utilisation ce type d’habitat est 3 fois moins gourmand en énergie. Ce coût de construction est fortement réduit lorsque les maîtres d’ouvrage participent à la conception et à la réalisation de leur habitat, lorsqu’ils pratiquent une forme d’auto-construction accompagnée par des artisans écologiques (à ne pas confondre avec le label écoartisan de la CAPEB dont les artisans, dans leur très grande majorité, ne mettent pas en oeuvre d’écomatériaux).
Philippe Liboureau