Réfugiés ou régularisés, ils ont obtenu des papiers. A partir de ce moment ils existent. Voici quelque unes de leurs histoires.
B, originaire de RDC était couturière au pays. On connaît ces couturiers africains qui ont le don de vous confectionner une tenue en quelques heures. Seule avec ses 5 enfants, déboutée de sa demande d’asile, elle a pu obtenir un titre de séjour. Avant même de recevoir la réponse à cette demande, elle était repérée par un fabricant de costumes opérant sur Limoges et qui fabrique entre autres des costumes pour Disneyland. Les compétences de B sont parfaitement adaptées à ce domaine particulier et son employeur l’a aidée pour un logement.
A avait trouvé une embauche dans une pépinière mais la préfète de la Creuse a refusé un titre de séjour. L’expérience a fini par tourner court. Cependant cette entreprise a toujours besoin de main d’œuvre, c’est finalement W, réfugié soudanais, qui y travaille.
Dès son titre obtenu, C, congolais, dentiste de formation, débouté, travaille dans la restauration rapide (les équivalences de diplôme sont complexes à obtenir). Aux dernières nouvelles il avait le projet de reprendre ses études.
Mr H refugié, vit à Broussas, cherche à faire venir sa nombreuse famille d’Afghanistan et travaille dans un garage du plateau
Les personnes que nous connaissons et qui munies de leur titre de séjour sont parties à Limoges ont trouvé du travail au pire dans des entreprises d’insertion qui les accompagnent pour accéder à des formations qualifiantes.
À Eymoutiers le service d’aide aux personnes âgées cherche toujours du monde et ne demande qu’à faire travailler des personnes pourvu qu’elles aient des papiers. De même que l’EPADH, l’usine de charpente recrute. Le foyer médicalisé de Gentioux cherche des remplaçants toute l’année.
Les facteurs limitants semblent être la maîtrise de la langue, l'aptitude à se créer un réseau relationnel, les capacités de déplacement, la question des jeunes femmes seules avec enfants (non spécifique des migrantes mais l’absence d’aides rend la situation parfois critique), enfin, la précarité des titres de séjour : qui va embaucher une personne détentrice d’un titre de 6 mois sans garantie de renouvellement ?
Il s’agit souvent d’emplois peu qualifiés, mal payés, usants physiquement. Parfois bien en deça des qualifications initiales des personnes (un ingénieur embauché comme homme de peine par une mairie, une institutrice travaillant comme aide de cuisine. La population concernée est le plus souvent jeune et en bonne forme physique mais que va-t-il advenir à terme ? Il n’empêche, ces emplois sont vacants et les migrants sont pour le moment satisfaits de les occuper.
Le 16.07.18 Jacques Chanut, président de la Fédération Française du Bâtiment (FFB) veut proposer 15 000 contrats de travail à des jeunes et demandeurs d’emploi issus des quartiers prioritaires. Il propose aussi d’y ajouter l’intégration de plusieurs centaines de migrants, pour autant qu’ils soient en situation administrative régulière ou en voie de régularisation. Invité à présenter ces mesures sur un certain nombre de radios et notamment chez RMC, ces propositions ont suscité des réactions violentes. Les réactions des auditeurs sélectionnés par l’animateur ont été globalement négatives, voire franchement critiques, pour ne pas dire à la limite de la xénophobie. Pour le journaliste de BATIWEB peu suspect de gauchisme, “il est navrant de constater que des radios de grande écoute colportent ou laissent colporter des propos consternants, du niveau des discussions de comptoir de bistrot. Toutes les études sérieuses montrent que l’immigration est une chance pour l’Europe, dont la population est vieillissante. Et la proposition de la FFB reste quantitativement modeste, à un moment où les entreprises du BTP peinent à recruter, malgré les 423 000 chômeurs inscrits à Pôle Emploi dans les catégories bâtiment. Les vagues successives d’immigration qui ont touché la France (en provenance d’Italie, du Maghreb ou du Portugal …) ont été une opportunité pour la construction.“
Cette prise de position est à mettre en perspective avec une des propositions du plan particulier pour la Creuse : “mettre en place à Felletin, dans le cadre de l’appel à projet national lancé par la ministre du travail, un accueil et des formations, notamment aux métiers du bâtiment, pour 100 réfugiés statutaires par an“. Contrairement à la proposition de la FFB, seuls les réfugiés statutaires seraient concernés.
Discours divergent donc entre le patronat (sachant que les migrants récents ont “vocation“ à occuper les emplois les plus durs et mal payés) et l’État mais qui vient confirmer que la politique restrictive migratoire actuelle mise en œuvre avec zèle par les préfectures répond à des objectfs avant tout politiques et non pas économiques.