De la carrière de Luc Leblanc, on retient avant tout son titre de champion du monde sur route pro, conquis le 28 août 1994 à Agrigente, en Sicile.
Cet exploit eut un grand retentissement au plan international, mais encore plus en France et a fortiori en Limousin. Il est vrai que dans notre région, nous avons eu seulement trois champions du monde de cyclisme, dans trois disciplines différentes :
Curieusement, ces trois champions sont natifs de trois communes très proches au nord de Limoges : Vaulry, Razès et Nieul. On peut ajouter à cette liste le creusois de Paris, Octave Dayen, champion du monde sur route amateur en 1926 ; il fut aussi le partenaire d'André Raynaud dans les six jours et les courses à l'américaine.
Le titre de champion du monde de Luc Leblanc, aussi remarquable soit-il, ne doit pas faire oublier beaucoup d'autres résultats qui le placent parmi les plus grands cyclistes français. Né en 1966, Luc avait démontré chez les amateurs, d'abord à l'UVL, puis en 1986 au CRCL, des qualités hors du commun. À 19 ans, en 1985, il enlève le circuit Monts et Barrages, et termine 2ème du championnat du Limousin à Bujaleuf, après une bataille homérique avec les deux anciens, Jean-Claude Laskowski 1er, et Michel Dupuytren 3ème. En 86, il participe à de nombreuses épreuves nationales et internationales avec l’Équipe de France, ce qui ne l'empêche pas de gagner le Tour de la Corrèze ainsi que celui du Périgord. Dès ses débuts professionnels en 1987, il brille en terminant 2ème du championnat de France à Lugny, le titre allant à Marc Madiot, et la 3ème place à Martial Gayant.
Au Tour de France, il termine 5ème en 1991, après avoir porté une journée le maillot jaune à Jacca, en Espagne. 4ème au classement final du Tour 94, il remporte l'étape de Hautacam devant Indurain et Pantani. En 96, il termine 6ème, avec une victoire d'étape aux Arcs. En 1992, il s'empare du titre de champion de France à Avize, devant Thierry Marie et Colotti. En 1997, il s'adjuge le Tour du Trentin, et en 98, pour sa dernière année, il termine 2ème du championnat de France à Clermont-Ferrand, derrière Jalabert et devant Virenque.
En dépit de ce palmarès remarquable, le parcours de « Lucho » a un goût d'inachevé. Sa brutale fin de contrat chez Polti, une équipe italienne qui l'évince au profit de Virenque, accélère sa fin de carrière. Sa défaillance sur le Tour de France 91, alors qu'il portait le maillot jaune, aurait pu être anodine, mais les conséquences en furent aggravées par le lâchage de ses coéquipiers. Son expérience malheureuse avec l'équipe « Le Groupement » en 95, et ses pépins physiques récurrents, dus aux séquelles de l'accident dont il fut victime étant enfant, ont également nui à la progression de ses résultats.
Enfin, son tempérament très affectif et sa sincérité, qui pouvait quelquefois confiner à la naïveté, l'ont handicapé, dans ce monde très dur du sport professionnel, dominé par le culte de l'argent et les égos boursouflés.
Après avoir cessé la compétition, il a participé à la direction technique de plusieurs équipes amateurs, dont 23 La Creuse, en continuant à annoncer la création d'équipes pros qui n'ont jamais pu se concrétiser. Il est resté proche du milieu cycliste, consultant sur RMC, et auteur d'articles ou d'interviews dans différents périodiques. Il a participé avec l'ARPAD (association des amis de Raymond Poulidor et d'André Dufraisse) à l'organisation des obsèques du premier nommé, au cours desquelles il a pris la parole pour saluer la mémoire du plus célèbre des Miaulétous.
Jean-François Pressicaud