L’empereur Claude II voulait interdire le mariage pour éviter que les hommes restent avec leurs fiancées plutôt que de partir à la guerre. Le moine Valentin de Terni continua de marier des couples. Il fut alors emprisonné. Julia, la fille aveugle de son geôlier, et Valentin tombèrent amoureux et miracle : Julia retrouva la vue ! Claude II qui n’aimait pas les chrétiens condamna Valentin à mort. En 494 le pape Gélase Ier le déclara martyr et fixa sa fête au 14 février...
Marie et Adama s’aiment et se sont mariés ; Adama n’a pas de titre de séjour et est entré sans visa en France, mais le maire qui les connaît bien les a mariés sans problème.
Tout heureux, les nouveaux mariés se précipitent à la préfecture demander un titre de séjour pour Adama. Manque de pot il faut passer par internet. Après moult connections pour trouver une plage horaire libre, ils obtiennent enfin un rendez-vous pour dans trois mois. Ils remettent leur dossier au guichet. Au bout de quatre mois, Adama reçoit une obligation de quitter le territoire. Et c’est à ce moment qu’ils apprennent qu’une personne étrangère entrée illégalement sur le territoire français ne peut pas être régularisée en tant que conjoint de Français. Seule solution : retourner dans son pays d’origine et y demander un visa long séjour.
Théoriquement les conjoints de Français l’obtiennent de plein droit mais dans les faits certains consulats sont très soupçonneux ou très négligents et la séparation peut durer plusieurs années avant que le visa soit délivré. Et pendant ce temps, il faut prouver le maintien des liens entre époux... Certains couples vont jusqu’à enregistrer leurs rendez-vous Skype ! Quant à celles et ceux qui ne peuvent pas retourner dans leur pays parce que leur vie y est en danger mais qui n’ont pas le statut de réfugié, leur situation est inextricable...
Les conjoints étrangers de Français sont suspects de mariage blanc En cas de doute le maire peut signaler les suspects au procureur qui peut interdire ou annuler le mariage. On a vu des fêtes annulées. Les postulants doivent prouver la réalité de leur lien amoureux puis la permanence de leur vie commune. La police peut venir inspecter le domicile et le linge afin de vérifier si le mariage est bien consommé. Il peut y avoir convocation à la police pour des interrogatoires extrêmement intrusifs. Pas question donc de faire lit à part même si monsieur ronfle comme un sonneur. Il faut absolument vivre sous le même toit. Pas question donc que monsieur travaille à Marseille et madame à Lille. À chaque renouvellement, le conjoint français doit se présenter lui aussi en préfecture. La rupture de la vie commune entraîne le non-renouvellement du titre de séjour.
Dans l’hypothèse où Adama serait entré avec un visa (à condition qu’il ait pu en obtenir un, car dans bien des pays les consulats ne les délivrent qu’au compte-goutte : gare au projet migratoire !) il aurait fallu de toute façon attendre 6 mois après le mariage pour demander un titre de séjour. Cela signifie rester en situation irrégulière, à la merci d’une interpellation et d’un arrêté d’expulsion. L’expulsion reste possible pendant 3 ans après le mariage.
La suspicion vis-à-vis des personnes étrangères est devenue une règle qui se traduit par une remise en cause systématique des motifs qui donnent droit au séjour. Les personnes étrangères seraient des fraudeuses jusqu’à ce qu’elles prouvent le contraire. Sur cette base l’administration s’autorise une forte immixtion dans la vie des personnes, tout en imposant un mode de vie très normatif.
Dominique Weber