Aube rouge nuit verte nous plonge, dans nos campagnes, dans une aventure d'activistes déterminés à frapper un grand coup face à la catastrophe sociale et écologique en cours. Gaëlle, jeune révolutionnaire engagée dans un groupe rôdé à la plus haute discrétion, arrive à Saint-Martin dans la ferme d'Éla pour préparer une action d'ampleur. Ancienne sage-femme, Éla, originaire du village, a connu une expérience collective ambitieuse avant d'en partir déçue pour reprendre la ferme abandonnée par ses grands-parents. Sa place singulière trouble le voisinage. "Elle est d'ici sans l'être vraiment". Avec son cheval, ses deux enfants et son amant récemment élu maire, elle accueille souvent des jeunes. Le secret qui entoure la planification de l'action dresse des barrières. Le petit ami de Gaëlle, en qui le reste du groupe n'a pas confiance, est tenu à l'écart. Les chefs du plan secret, des hommes forcément, décident en dernier ressort de tout sans faire de sentiment. Le risque de l'infiltration est partout pour eux qui vont mettre leur vie en jeu. Les capitalistes seront dépeints avec autant de précision et d'humour que les woofeurs et que les réactionnaires, qui suivent une pente fasciste et s'organisent en brigades de "Franco-ruraux" plus vrais que nature. Le chaos climatique va se mêler à celui de la contestation radicale pour plonger tout le pays dans une nouvelle dimension. Plus rien ne fonctionne. Plus rien ne circule. Saint-Martin se retrouve dans un huis-clos à la fois tendu et jubilatoire. La vie change. Les gendarmes rencontrent eux-mêmes les plus grandes difficultés matérielles, c'est drôle et cela donne envie.
Phare de clairvoyance au milieu des égarements des uns et des autres, Éla pare au plus pressé, dose ses efforts. Elle panse les plaies des humains dès qu'elle a fini de nourrir les bêtes. Jouissif.
Yann Bureller