La taille disproportionnée de ces projets, à l'échelle de la région Limousin, va bouleverser et désorganiser totalement le marché des produits connexes de la première transformation du bois. Il en résultera une augmentation brutale de la demande par rapport aux ressources exploitables. Ainsi, à titre d'exemple, l'unité de cogénération de Felletin consomme aujourd'hui environ 60 000 tonnes par an de déchets de bois contre 100 à 150 000 tonnes par an estimées pour chacun de ces projets soit 600 000 tonnes par an rien que pour les 4 projets en Limousin. Or l'offre locale est incapable dans l'état actuel des choses de suivre une telle demande. Il en résultera fatalement une surenchère artificielle des prix.
Les contrecoups économiques et écologiques de telles unités n'ont pas été pris en compte.
A l'heure où l'on parle de crise énergétique, de la nécessité de développer et surtout de valoriser de nouvelles sources d'énergie, il est surprenant de voir que les projets retenus concernent presque exclusivement des unités de production d'électricité seule, sans valorisation aucune de la chaleur produite (grâce à des réseaux de chaleur). Non seulement le rendement est plus faible que dans des unités de cogénération mais en prime on perd la chaleur produite. Alors que l'on demande aux Français de faire des économies d'énergie, il semble que le ministère, lui, soit peu sensible à une utilisation économe et locale de la biomasse.
Le prix d'achat de l'électricité pour les unités déjà en fonctionnement est de 45 euros le MWH, contre 85 euros en moyenne pour les nouveaux projets sélectionnés par le ministère. Il y a là une distorsion évidente de la concurrence prélude à une mort annoncée des petites unités existant en Limousin. Avec elles, c'est la disparition de nombreux emplois et l'anéantissement des efforts de nombreux élus locaux qui se sont battus pendant des années pour mener à bien sur leur territoire des projets de développement durable, des projets porteurs d'avenir pour toute une région. Ce n'est pas le prix de l'électricité qui doit fixer le prix du bois.
D'après les études, les besoins exprimés ne pourront être couverts, dans le meilleur des cas, que par la mobilisation rapide et en masse de nouvelles ressources, principalement par l'extraction de plaquettes forestières, au pire, par une concurrence forcenée avec d'autres usages de ces produits : notamment avec le secteur de la trituration fortement porteur d'emplois en Limousin. L'organisation d'une collecte d'une telle ampleur n'est pas non plus sans incidence sur la filière bois d'oeuvre et bois d'industrie, tant au niveau des techniques d'extraction des plaquettes que de la logistique transport, sans compter sur l'éventuel développement d'une "sylviculture énergétique" sans autre valeur ajoutée.
Comment le réseau routier supportera-t-il un tel tonnage, sur quelles places de dépôts et par quelles pistes ?
Ce programme va à l'encontre des objectifs recherchés : il entrave le développement d'opérations plus modestes, potentiellement plus nombreuses, mieux réparties sur le territoire et valorisant complètement l'énergie thermique. Il créera à terme des difficultés sur toute la filière bois-forêt et dans différents secteurs d'activité liés au bois, engendrant une concurrence d'usage sur les ressources communes mobilisées.