L’année pionnière à St-Martin-Château a donné envie à l’équipe permanente de poursuivre l’aventure. Avec un groupe d’enfants plus important, du renfort dans l’équipe d’adultes et un déménagement à la Villedieu. L’occasion pour IPNS de donner la parole à ce collège alternatif.
Le collège associatif La Traverse accueille les jeunes quatre jours par semaine durant lesquels alternent vie de groupe et ateliers. Tous les matins nous commençons par une demi-heure d’éveil corporel, proposé par un enfant ou un adulte. Le lundi matin, nous poursuivons par le “Quoi de neuf ?“ qui permet le lien entre la maison et le collège. Le jeudi matin se tient le Conseil durant lequel nous élaborons l’emploi du temps de la semaine suivante. C’est aussi l’occasion d’évoquer des problèmes et de chercher des solutions ensemble. Le vendredi soir, on fait le bilan et une fois par semaine, le “remue-ménage“ pour chasser la poussière jusque dans le moindre recoin.
Durant les ateliers de l’année écoulée, les jeunes ont pratiqué les langues vivantes (allemand, anglais, espagnol) mais aussi le latin-grec. Ils ont lu Les Fourberies de Scapin et Knock, mais aussi des livres actuels qu’ils partageaient lors de séances de “livre-échange“. Ils ont manié le raisonnement mathématique dans l’atelier Eurêka, fait d’intenses sessions de corrections orthographiques de leurs rédactions, mais aussi conçu et construit des cabanes, se sont exprimés à travers le land-art, joué de la batterie, découvert la mythologie ou encore réalisé un grand “livre à remonter le temps“ pour se plonger dans l’histoire. Le tout sans notes mais à travers une pédagogie active c’est à dire en mettant les jeunes en situation de recherche et d’expérimentation.
Jardinage et défilé de mode
A côté des semaines dites “blanches“ (les semaines classiques), il y a des semaines dites “vertes“, c’est à dire entièrement dédiées à une activité. Par exemple, nous avons participé à une semaine proposée par l’association Emile a une vache avec le styliste rwandais Bill Ruterana. Les jeunes ont également passé plusieurs jours dans le jardin pédagogique de Vidaillat. Enfin, ils ont fait individuellement des mini-stages ou séjours chez des personnes. Cela leur a permis de découvrir des activités diverses : maraîchage, coupe du bois, menuiserie, discussion avec un anglophone, découverte des tourbières, travail avec la petite enfance...
Autre activité : le “Grand projet“ ou projet transversal au long court à réaliser de A à Z. Cette année, ils ont choisi de créer un spectacle : “Les coussins rebelles“, comédie critique sur la télévision, qu’ils ont joué à Paris et sur l’île d’Oléron, avant de finir en beauté, le 3 juillet, à Faux-la-Montagne. Les deux semaines de tournée ont été l’occasion d’expérimenter une organisation collective de la vie quotidienne et de faire des rencontres marquantes : des jeunes du 18e arrondissement de Paris, les enfants de l’école associative Ecoléron et même des moines indiens.
Déménagement à la Villedieu
Le bilan de cette riche année a conduit, entre autres, à un déménagement à La Villedieu. L’an passé, nous avons été accueillis par la mairie de Saint-Martin-Château, qui, en nous louant un gîte, a rendu possible la démarrage de l’aventure. Nous en sommes très reconnaissants et saluons leur courage et leur confiance ! Mais ce village est trop éloigné de chez nous, c’est pourquoi nous remercions les habitants et le conseil municipal de La Villedieu de nous louer un local pour cette nouvelle année. Nous avons également prévu de passer du temps à la ferme de Lachaud (Gentioux) pour des sortie pédagogiques et des jeux au grand air !
(extraits des Feuilles d’info n°1 et 2 du collège)
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- Le collège vu par ses collégiens
Des relations humaines plus cool
Pour l’une des jeunes inscrites l’année dernière, venir au collège associatif c’était avant tout l’occasion d’échapper aux relations avec les autres élèves qu’elle ne supportait plus. Elle avait en effet suivi sa 6e et sa 5e au collège traditionnel où il est très difficile, sauf à avoir un réseau préalable, de s’intégrer. Les normes implicites sont sévères : l’habillement, le mode de “participation“ en classe, le diktat de la “popularité“ etc... Pour les bons élèves l’acceptation ne se fait que si l’on passe ses devoirs à ceux qui sont “populaires“ et vous protègent de ce fait. Les modalités de discipline sont aussi mal vécues, en particulier certaines incohérences et rigidités dont la finalité est parfois opaque. “Les profs ne sont là que pour donner des notes afin de faire plaisir aux parents“ estime l’adolescente de 14 ans. Sa mère raconte que sa fille allait au collège en pleurant, le ventre noué. Elle déplore l’absence des adultes face aux interactions entre jeunes. Cette année, la jeune fille a retrouvé sourire et confiance. Elle est partante pour une autre année. En ce qui concerne les rythmes de vie, la semaine en quatre jours et les horaires de 9h-17h leur ont permis de vivre de façon plus reposante et de faire des sorties ensemble. Au-delà de la question public/privé et des considérations pédagogiques, cet entretien vient illustrer la faillite du collège traditionnel à éduquer au vivre ensemble.
Dominique Allasseur
Apprendre en s’amusant
Au départ, l’idée de venir au collège associatif ne venait pas de moi mais de ma mère. Elle m’a emmenée à une réunion pour parler du projet du collège, comment il fonctionnerait, etc... Les adultes ont discuté puis ça a été au tour des enfants de se rassembler pour parler de leurs envies. Le lendemain j’étais convaincue et j’étais à fond pour y aller ! J’étais surtout interessée par le fonctionnement différent de ce collège et la manière d’apprendre chaque ”matière” en s’amusant ! Aujourd’hui je trouve le collège ”asso” beaucoup plus posé et calme : pas de sonneries, pas de couloirs, pas de devoirs, pas 200 enfants !
Zaïa, 12 ans
- Le collège associatif, comment ça fonctionne ?
D’un point de vue statutaire, le collège La Traverse est une école associative privée hors contrat avec l’Education nationale. Privée, certes. Rien à voir, pour autant, avec une école religieuse ou école réservée à une élite (le prix de l’inscription est variable selon les possibilités des familles). Mais force est de constater qu’il est extrêmement difficile de monter une école vraiment alternative au sein de l’Education nationale. D’où le statut, par défaut, du privé. Mais, comme dans l’économie, le privé n’est pas toujours synonyme de capitalisme, grâce à la voie sociale et solidaire (associations, coopératives...) dans laquelle s’inscrit ce collège qui, en outre, fonctionne sur le bénévolat. Une vingtaine d’adultes chapeaute ainsi la structure, c’est le “groupe permanent“, qui rassemble des bénévoles chargés de l’administratif et du fonctionnement, ainsi que les intervenants auprès des jeunes (le groupe pédagogique) et ceux qui les accompagnent au quotidien (le groupe de suivi). L’association cherche encore des personnes prêtes à s’impliquer, alors avis aux amateurs ! Et parce que les distances sont souvent très grandes entre le domicile d’un enfant et le collège, ils sont à la recherche de familles d’accueil pour les lundis soirs et les jeudis soirs.
Emmanuelle Mayer