Novembre 2002. Issue de multiples rencontres, l’association Le monde allant vers... (MAV) est créée en vue de développer une ressourcerie culturelle. L’aventure peut commencer avec les moyens du bord, de nombreux coups de main et l’envie de vivre et de travailler autrement ici, sur le plateau de Millevaches. Le coté culturel envisagé un temps est mis de côté. C’est l’ activité de la ressourcerie qui démarre : collectes d’objets, valorisation et remise en circuit par le biais de vide greniers, de stands, et d’événements contribuent à faire connaître le projet. Tout type d’objets sont collectés : ceux du quotidien... ceux collectionnés... les petits comme les gros... les vieilleries des greniers comme ceux qui n’ont jamais été déballés... ceux dont on connaît l’usage et ceux dont on a oublié à quoi ils servaient... des objets qui nous racontent des histoires, qui nous parlent des gens, qui nous touchent, nous amusent, nous énervent, nous encombrent...
La ressourcerie s’implante à Eymoutiers. Les élus locaux soutiennent le projet en nous confiant la collecte des encombrants sur la Communauté de communes des Portes de Vassivière. Une boutique ouvre rue des Maquisards. Avec sa vitrine rouge, elle attire passants, sympathisants, collectionneurs, curieux, brocanteurs, nouveaux arrivants. Elle est un carrefour malgré l’exiguïté des lieux. Le samedi matin, autour du poêle, on se réchauffe, on cause autour d’un café ou d’une tisane...
Au quotidien les conditions de travail sont difficiles, les locaux sont loins les uns des autres. Dans les ateliers jamais de chauffage ni d’eau courante. Beaucoup de collectes : les objets s’entassent, les locaux sont bondés ! Mais les coups de main sont nombreux, tant pour les collectes que pour les ateliers de valorisation. Bientôt deux ans que l’immeuble de la rue des Maquisards héberge objets en vente ou stockés et le bail temporaire arrive à terme. Un immeuble est en vente au 2 avenue Foch. Une SCI est constituée, elle regroupe alors environ 80 personnes qui investissent et rassemblent ainsi la moitié de la somme nécessaire. L’impulsion est donnée : la SCI Chemin Faisant acquiert cette grande maison, au coeur de la ville d’ Eymoutiers. Elle sera occupée par le MAV, Césam- Oxalys et Accueil Paysan. Les travaux commencent avec une grande part de bénévolat : une boutique au rez de chaussée et au premier étage, les bureaux des trois structures au deuxième et le reste accueille les objets en stock.
Avec ce déménagement, l’activité continue de croître.
Les tensions au sein de l’ équipe également. Plusieurs salariés se retirent... Des projets naissent avec de nouveaux partenaires (La Sitelle, Énergies pour Demain à Peyrelevade et la Cité des Insectes de Nedde). C’est le début d’une action commune d’éducation à l’environnement. Elle est proposée au Parc naturel régional de Millevaches, qui l’accueille avec engouement. Elle nous permet d’intervenir sur le thème de la consommation auprès des écoles primaires et maternelles du territoire du Parc.
Au MAV nous nous attachons à participer à toutes les taches, collectes, ateliers de valorisation, vente, sensibilisation, administratif, ménage, communication, représentation... L’idée est que chacun connaisse les différentes activités, s’approprie le projet dans sa globalité, soit en mesure de participer aux prises de décisions, de mieux savoir ce que fait l’autre, de mieux se comprendre, de partager le travail, les basses tâches comme celles qui peuvent être plus valorisantes. Plus facile à dire qu’à vivre, on est dans le vif du sujet, dans la pratique, dans le concret et l’échange, dans le faire. Les difficultés comme les joies sont grandes.
Les conditions de travail restent précaires. L’activité ne laisse pas beaucoup de temps pour se projeter dans la construction d’ateliers, mais le besoin d’espace est pressant. Et c’est ainsi qu’un hangar situé aux Maisons Vertes à un kilomètre d’Eymoutiers va nous permettre de faire évoluer le projet. On est déjà en 2010 et l’année qui vient va bien nous occuper : les Maisons Vertes demandent de gros travaux d’aménagement, pour en faire un point de vente supplémentaire pour les meubles et le bâti. Un lieu de valorisation plus adapté en matière de conditions de travail !
C’est à peu près à cette période que les visites de porteurs de projets qui viennent découvrir notre association et notre fonctionnement se font plus fréquentes. Ils viennent du Limousin ou d’Ardèche, du Puy-de-Dôme ou de Chateauroux, de Tulle ou d’Ussel. Nous envisageons alors une dimension plus régionale des ressourceries du Limousin. Cela aboutit à un programme d’actions communes visant à promouvoir la réduction et la réutilisation des déchets, à se professionnaliser, à accompagner les porteurs de projet et à proposer des actions de sensibilisation. Sans oublier notre engagement au niveau national, avec notre participation au conseil d’administration du Réseau des Ressourceries et notre adhésion au réseau Ecole et Nature. Autant de sollicitations extérieures, qui nous font rencontrer d’autres structures, d’autres façons de faire, d’élargir nos horizons, de passer des moments inoubliables, d’apprendre encore et encore. Et de devenir même formateurs dans d’autres ressourceries.
Et pendant ce temps là les collectes, les ateliers, les ventes, les animations continuent. L’équipe se renouvelle et des projets naissent encore : des sites de compostage collectifs sont installés à Eymoutiers, des démonstrations de broyage sont organisées. L’objectif est toujours le même : inciter chacun à se réapproprier les déchets pour qu’ils deviennent une nouvelle fois nos ressources. Cette fois c’est aux jardins partagés de la Vienne (voir encadré) que nous en faisons la démonstration : le compost se transforme en source de fertilité et de rencontres...
Voilà, on a 10 ans, et aujourd’hui le MAV c’est une équipe salariée de 6 personnes, un conseil d’administration, des adhérents, des bénévoles, des sympathisants, des usagers, des habitués, des récupérateurs, des artistes, des fêtards, des curieux, des touristes, des compagnons, des stagiaires, des élèves, des jardiniers, des partenaires associatifs, des institutionnels et des rencontres, toujours et encore...
Propos recueillis par Damien Clochar