La société de consommation est aveugle : il n'est pas de croissance infinie possible sur une planète dont les ressources sont limitées. Nous risquons d'avoir épuisé la majeure partie des réserves en pétrole et en métaux avant 2050. Les pollutions déséquilibrent le climat et affaiblissent notre santé. La biodiversité s'effondre. La société de consommation engendre un pillage : 20 % de la population de la planète, les pays riches, consomment 80 % des ressources planétaires. Elle nous réduit à une seule dimension : consommateur.
Ainsi nous produisons environ 400 kg de déchets par an, soit 1 kg par jour. Cette quantité augmente dangereusement de 2 à 3% par an.
Notre poubelle se compose d'une moitié d'emballages (papier, carton, verre, plastique, métaux), d'un tiers de fermentescible, le restant de petits éléments, de textile, de déchets divers (encombrants et déchets ménagers spéciaux) et de complexes (tetrapack…)
En 1975, la première "loi déchets" initie timidement la politique relative à l'élimination des déchets et à la récupération des matériaux. Cette loi définit la notion de déchet et précise les responsabilités et les obligations de leurs producteurs. Les gros groupes se ruent et investissent, la manne doit être intéressante, les incinérateurs avec leur joli panache se mettent à pousser comme des champignons et les décharges se transforment en centre d'enfouissement technique (CET).
Malgré son titre, cette loi ne comprend aucune disposition sur la récupération des matériaux !
Il faudra attendre la loi de 1992. Il y apparaît la notion de déchets ultimes : en effet, ceux-ci ne pourront plus aller directement dans un trou au bout du village, mais devront subir un tri, un traitement, une valorisation avant leur incinération ou leur enfouissement technique.
C’en est fini les décharges brutes à coût zéro. En fait, sous-estimé à l'époque il sera payé par la génération suivante (réhabilitation de décharges, impact écologique et sanitaire par pollution des eaux).
Pour relayer ces dispositions nationales, le territoire est organisé par des plans départementaux d'élimination des déchets ménagers et assimilés, qui optimisent les choix et distribuent les rôles. L'intercommunalité évolue pour que les collectivités aient des compétences au bon niveau. Mais on a souvent à faire à un embrouillamini.
Cette loi fait faire à la société française un saut important en passant d'une fonction d'élimination des déchets à une fonction de valorisation de matière.
Pas belles les poubelles
Les collectes sélectives des emballages, qui occupent quasiment la moitié de notre poubelle, commencent à se mettre en place (la Corrèze n'en est pas encore pourvue !). Cet été, les éco-points se sont remplis avec frénésie, la population est sensibilisée et effectue bien le tri, mais faut-il se féliciter de boire autant de boissons embouteillées alors que nous avons encore une eau d'excellente qualité aux robinets de notre région ?
Les déchèteries fleurissent partout en France et tentent de résorber les dépôts sauvages en accueillant les encombrants et les toxiques.
Cette loi s'était fixée l'échéance de 2002 et notre plateau limousin apparaît bien morcelé et hétérogène pour la mise en application définitive de ce dispositif.
En effet, certains territoires ont joué rapidement la carte de l'intercommunalité, ont mis en place la collecte sélective et ont construit des déchèteries avec des collectes d'encombrants en complément pour desservir les communes éloignées.
D'autres au contraire, n'en sont encore qu'aux balbutiements et accusent un retard plus que certain ! (Voir page 8 "reconnaissez votre décharge ?")
Aujourd'hui sont mises en place des filières spécifiques : médicaments, piles, huile de vidange, batteries et pneus retournent chez les revendeurs. Demain ce sera le tour de l'électroménager d'être démantelé dans des filières spécialisées.
Mais que dire de nos déchets verts, dont des quantités industrielles arrivent dans les déchèteries, dans le meilleur des cas ? Ce compost, ainsi fabriqué avec les déchets verts des villes et des particuliers, répond-il à l'appauvrissement des sols de nos champs, qui ont perdu la moitié de leur humus en 50 ans ? Ne faut-il pas plutôt remettre en question notre production agricole et horticole et laisser nos tontes et élagages pourrir au fond du jardin ?
Dans le pire des scénarios ils finissent tout bonnement aux ordures pour atterrir dans un centre d'enfouissement ou un incinérateur à 80 km de là !
Que dire également de nos encombrants (entre 50 et 100 kg/personne par an) qui symbolisent bien notre société du jetable. Auparavant, une machine à laver, un réfrigérateur ou un téléviseur vivaient une quinzaine d'années et nous pouvions espérer les réparer en cas de panne. Aujourd'hui cinq ans paraissent tenir du miracle et le réparateur s'est transformé en commercial à "promo" !
Le matériel informatique, quant à lui, bat tous les records puisqu'il est soi-disant obsolète en deux ans.
Chaque individu produit environ 400 kg de déchets par an, soit 1 kg par jour
Le progrès nous apporte l'aggloméré, la mousse et le tissu synthétique difficilement démontables et recyclables. De même pour les jouets de nos chérubins fabriqués en plastiques non recyclables et forts consommateurs de piles. Qui n'a pas des fonds de pots de peinture, des insecticides, de l'acide et des produits de jardinage sur une étagère dans son garage ? Les déchets ménagers spéciaux (DMS) sont des produits contenant des éléments dangereux pour la santé ou dommageables pour l'environnement. Chaque personne se débarrasse de 2 kg par an de ces poisons. Une infime partie en est traitée. Où va le reste ? Dans l'évier, à la poubelle ou au fond du jardin ?
Aujourd'hui en 2004, en Limousin, il existe encore des décharges autorisées plus ou moins sauvages où l'on dépose quotidiennement impunément des réparables (gros électroménagers), des recyclables (verre, carton, pneus, métaux, emballages, vêtements), des toxiques qui vont polluer la nappe phréatique (médicaments, télévisions, peintures, batteries, piles) et des non-recyclables (jouets, objets en plastiques qui feront sans doute le bonheur des archéologues de demain).
Il reste encore beaucoup de chemin à parcourir si nous voulons renverser la courbe de progression de la production de nos déchets. Le grand défi de demain est la réduction à la source, qui représente l'étape incontournable la plus difficile et passe par un changement radical de nos comportements. Cette phase ne dépend plus de procédés industriels onéreux mais de la sensibilisation, surtout auprès des plus jeunes.
Seule la réduction à la source permettra de réduire la facture à payer qui devient de plus en plus lourde, malgré le tri et l'effort demandé à la population ! On se rend compte, en fait, que ce qui coûte le plus ce n'est pas la collecte sélective mais toujours ce qui échoue en CET, et c'est cette part non "valorisable" qui augmente d'année en année. Il faut absolument s'attaquer à la réduction des déchets à la source !
Il faut passer du statut de simple consommateur à celui de consom'acteur.
Quand nous effectuons nos courses, donnons nous quelques repères pour la protection et la durabilité de l'environnement. Dans quelle région ou quel pays le produit a-t-il été fabriqué ? Avec quel mode de production, quelle consommation d'énergie ? Sans oublier l'éthique du fabricant autant à l'égard de la toxicité et de la recyclabilité des ingrédients, qu'aux conditions de travail des salariés. Toutes ces questions rassemblées, il nous reste à regarder le contenu de notre porte monnaie et le temps dont nous disposons.
En pensant que demain le suremballage et les sacs plastiques de sortie de caisse seront surtaxés. L'acte d'achat se transforme en véritable parcours du combattant.
Bon courage et à Bientôt !
Yvon le Sidaner