Née en 1986 de l'initiative d'un groupe d'habitants du cœur du plateau de Millevaches, d'abord cantonnée à une poignée de communes, Télé Millevaches, magazine vidéo mensuel d'informations locales, est depuis 1992 disponible en prêt gratuit pour l'ensemble des habitants du territoire qui sont 2500 à le regarder chaque mois. Téléchargeable sur Internet, il est aussi, depuis janvier 2005, grâce au partenariat mis en place avec la chaîne "Demain !" accessible sur tous les réseaux câblés et satellites qui diffusent les programmes de cette chaîne.
Télé Millevaches s'apprêtait donc à souffler ses 20 bougies qui font d'elle la plus ancienne des télévisions associatives locales encore en fonctionnement en France. 20 années d'une information indépendante faite par et pour les habitants du plateau, 20 années de reportages circulant d'un bout à l'autre du territoire montrant l'étonnante diversité d'initiatives et de réalisations qui s'y déroulent et constituant petit à petit un fond unique d'archives locales animées. 20 années de débats autour des problématiques qui s'y jouent, à l'occasion de plateaux enregistrés, de projections ou d'enregistrements publics. 20 années de contribution à l'identité du territoire, de valorisation de ce qui s'y passe. 20 années d'une image dynamique du plateau portée régulièrement à l'extérieur, en France comme à l'étranger, comme aucune campagne de promotion n'aurait pu le faire. 20 années qui ont fait de Télé Millevaches une expérience unique en France par son ampleur, sa durée et sa régularité, une réalisation que bien des territoires et des régions nous envient.
Mais voilà, cet anniversaire n'aura peut-être pas lieu. Si rien n'évolue, d'ici trois ou quatre mois, faute de soutien du Parc naturel régional, Télé Millevaches sera en cessation de paiement.
Comment en est-on arrivé là ? La télévision est une activité qui coûte cher et qui rapporte peu lorsqu'on n'a pas recours à la publicité. Même assurée au moindre coût, comme c'est le cas à Télé Millevaches, avec des salaires faibles pour les personnes qui y travaillent, un important recours au bénévolat et une grande économie de moyens, les besoins restent importants et la vente de cassettes ou la souscription d'abonnements restent des ressources un peu dérisoires.
Pour assurer la réalisation de son magazine, Télé Millevaches a, dès son origine, créé un atelier de production de films dont une partie des ressources peut être affectée à l'activité d'information.
Mais, c'est incontournable, pour assurer sa mission qu'elle considère comme un service public, Télé Millevaches a besoin d'un soutien public.
Ce soutien elle l'a eu jusqu'à présent : de la part du Conseil Régional, intervenu à ses débuts, ainsi que dans des phases difficiles ou encore actuellement pour la réalisation de projets ponctuels ; de la part du Conseil Général de la Creuse, à hauteur de 2300 euros par an depuis de nombreuses années ; de la part de plus des deux tiers des communes du territoire pour des montants unitaires souvent faibles mais, qui additionnés, se situent dans la fourchette de 6000 à 6500 euros par an ; et surtout de la part du Syndicat mixte de Millevaches, partenaire "naturel" qui, dans un premier temps dans le cadre des programmes Leader, puis, à expiration de ceux-ci, sur ses fonds propres, a assuré depuis neuf ans une aide annuelle de fonctionnement de 47 000 euros, réduite à 33 000 euros depuis la mise en place du programme emplois jeunes (soit 30%, puis 20% d'un budget total de l'association qui s'élève à 160 000 euros par an).
Depuis deux ans, confrontée à la fin programmée du dispositif emplois jeunes qui va priver l'association d'un soutien à son activité qui a représenté jusqu'à 61 000 euros par an, Télé Millevaches a attiré l'attention des responsables du Syndicat mixte sur la nécessité pour les collectivités locales d'accroître à terme leur soutien. Au lieu de cela, et malgré les assurances répétées qu'une aide allait être trouvée, et que l'action de Télé Millevaches méritait reconnaissance et soutien, non seulement la demande d'augmentation de l'aide n'a pas été suivie d'effet, mais le Syndicat mixte en charge du Parc naturel régional n'a tout simplement pas donné suite à la demande de subvention pour 2004. Télé Millevaches s'est ainsi trouvée brutalement, sans avertissement préalable, ni même sans aucune prise de décision réelle (sa demande n'ayant jamais été soumise au Conseil Syndical), privée de 20% de ses ressources.
Aujourd'hui, rien ne permet de dire que la situation sera différente en 2005 : des assurances verbales continuent d'être données, un travail de recherche de compléments de financement auprès de la Région est entrepris, mais qui ne pourra se mettre en place que si le Parc naturel régional intervient. Or celui-ci n'a pas jugé utile ni pertinent d'inscrire le soutien à une télévision locale de territoire parmi ses axes prioritaires.
Ainsi, alors que le Parc naturel régional voisin de la Brenne cherche à créer une télévision s'inspirant de ce qui existe ici, que le département voisin du Cantal a soutenu un projet équivalent, la première action concrète de notre Parc naturel régional de Millevaches en Limousin, dont la vocation est d'être au service des acteurs locaux du territoire, va être de signer l'arrêt de mort d'un des rares projets à l'échelle du territoire qui y était pour l'instant vivant.
Marc Bourgeois