Le cochon a mauvaise presse. A travers lui on imagine des élevages industriels, des odeurs, des nitrates, des zones d'excédents structurels, des excès de cuivre, de zinc et tutti quanti... Et pourtant le vieil adage plein de bon sens indique que “dans le cochon tout est bon”.
Au moyen âge n'est il pas le meilleur dépollueur des villes au travers du cochon éboueur ? Il faudrait plutôt chercher du côté de l' utilisation qu'en a fait l'homme que du côté de cette bête plutôt sympathique et utile à l'homme jusqu'à vouloir lui passer ses organes (xénogreffe) et ses hormones (insuline autrefois).
Bien souvent on rattache le patrimoine à l'idée d'un monument alors que le patrimoine est une notion beaucoup plus large. La vache limousine avec sa robe et ses cornes identifie le territoire au même titre que les clochers, le granit et l' ardoise. Le cochon cul noir courant dans les prairies, les futaies de chênes ou de châtaigniers peut aussi participer à l'identité patrimoniale. Son renouveau en lien avec le terroir et des produits gastronomiques réputés peut participer à revitaliser des zones difficiles, à entretenir le paysage et à créer des emplois.
La race limousine appartient au groupe Ibérique : le fameux Serrano.
En 1929 les effectifs étaient de 160 000 têtes pour atteindre le seuil critique en 1980. Aujourd'hui la situation se redresse. Cette race doit être conservée, développée au nom de la biodiversité, du principe de précaution (on a toujours besoin de réservoirs de gènes pour des utilisations futures) et de ses qualités, car elle donne une chair excellente liée à son gras qui ne rancit pas et donne un goût prononcé aux produits secs en particulier.
Parallèlement cette vieille race présente des faiblesses :
Son âge et son poids d'abattage élevés (150 kilogrammes), le séchage des jambons secs pendant 10 à 12 mois, son mode d'élevage en plein air dans des prairies et des sous bois riches en glands ou en châtaignes sont pourtant les garanties d'un produit gastronomique haut de gamme.
Un cochon élevé de façon traditionnelle dans de petites et moyennes unités, nourri avec les aliments de l'exploitation (seigle, triticale), abattu et transformé sur place, voilà un élevage facteur de développement local. Ainsi les ressources du terroir, émanation des anciens, deviennent porteuses d'avenir.
Le Limousin doit maintenir sa trame rurale forte. Les activités agricoles sont les garantes d'un espace rural entretenu. La production de viande bovine limousine est une valeur de référence pour la population locale et pour le tourisme. Une bonne viande porcine obtenue à partir d'une race locale peut à son tour participer à l' image du terroir. Les demandes sociales autour des produits de qualité liés au terroir existent. Aux acteurs locaux, aux éleveurs en particulier, de s'en saisir !
Jacques Fauconnier, professeur de zootechnie