Vous est-il possible d’expliquer quelle plus-value apporte un PNR au territoire qui en est doté ?
Les PNR ont une position particulière car ils ont une mission d’expérimentation Il faut donc leur accorder le droit à l’erreur, d’où la difficulté à évaluer leur impact. Toutefois, tous les 12 ans, ils se remettent en cause pour pouvoir conserver leur classement en tant que Parc. Cette remise en cause se traduit dans un premier temps par un bilan des 12 années écoulées qui est fait par les techniciens et les élus du Parc mais aussi par des consultants extérieurs. Puis une nouvelle charte est rédigée et proposée au gouvernement qui accepte ou non de reclasser le PNR. Il n’y a donc pas de garantie de pérennité, d’où la nécessité de faire ses preuves.
Vous n’avez pas des critères plus parlants pour illustrer l’intérêt d’un Parc ?
Si. Par exemple, sur la question de l’environnement et la définition des zones Natura 2000,
l’Etat s’est tourné vers les PNR pour qu’ils jouent un rôle de médiateurs. Ainsi les Parcs ont mis en place des espaces de discussion, de négociation et de sensibilisation entre agriculteurs, industriels, naturalistes... qui ont facilité la définition des espaces classés Natura 2000. Mise à part sur les Parcs, ces espaces de discussion et de concertation sont assez rares en France. Au final, 13% des territoires des Parcs sont en Natura 2000 contre moins d’1% du territoire national. Idem pour les réserves naturelles qui recouvrent 11% des territoires des Parcs.
Concernant la contribution à l’aménagement du territoire, les PNR ont démontré qu’il était possible de travailler sur le patrimoine, de le préserver pour mieux le valoriser économiquement. Par patrimoine nous entendons le patrimoine naturel, architectural, culturel mais aussi les savoir faire... La mise en place de la Marque Parc pour valoriser les services touristiques et les savoir faire, attire de plus en plus d’artisans, d’agriculteurs et de prestataires. Si elle n’impose rien en terme de qualité, elle apporte une plus-value sur l’image des produits. Les PNR peuvent avoir une démarche sectorielle complémentaire aux chambres consulaires (chambres de Métiers, d’Agriculture...) car ils ne se limitent pas à une corporation mais encourage la mise en relation des différents acteurs. Par exemple, le PNR du Vercors a initié la création d’une filière “viande“ composée d’éleveurs bovins, d’ateliers de découpe et de bouchers. L’objectif étant de valoriser leur production par la marque Parc dans un objectif de gestion de l’espace et de création de plus-value pour les agriculteurs et les commerçants.
Lors des rencontres initiées par la Fédération pour les 40 ans des PNR, avez-vous perçu une lassitude au sein des équipes des Parcs ?
On sent qu’il y a une volonté d’aller de l’avant, de prendre à bras le corps des enjeux comme l’attractivité des territoires, les évolutions du monde. La philosophie des Parcs est en phase avec les problématiques actuelles. L’idée que l’on puisse développer l’activité humaine tout en protégeant l’environnement est un concept qui intéresse de plus en plus les élus.
Le regard de ces derniers envers les Parcs a évolué. Il y a 40 ans, lorsque nous leur parlions de développement durable et de stratégie de développement, ils nous regardaient avec de grands yeux ronds.
Les 40 ans passés ont donc été un long fleuve tranquille ?
Pas tout à fait. Nous avons connu des projets de Parc qui ont mis 30 ans avant d’aboutir et d’autres qui ont échoué. Pour qu’un PNR puisse se créer, il vous faut satisfaire deux critères essentiels :
De même, la révision de la charte est un moment important car un PNR qui déraille est presque sûr de ne pas être reclassé.
C’est le cas avec celui du Marais Poitevin pour lequel Ségolène Royal s’est mise dans “une saine colère“.
En 1997, l’Etat n’a pas reclassé le territoire en Parc car il a considéré que la préservation des zones humides, patrimoine emblématique n’avait pas été garantie par le Parc et le bilan faisait état d’un assèchement important de surface de marais.
Et aujourd’hui, le gouvernement a décidé de ne pas reclasser ce Parc car de nombreux conseils municipaux n’ont pas voulu y ré-adhérer.
Comment se positionnent les PNR face aux enjeux de demain comme la crise énergétique, je pense plus précisément au développement des circuits courts, de l’agriculture biologique, des éco-constructions ?
Fin 2007, nous avons organisé un séminaire sur les circuits courts. Il en ressort une envie de sortir ces circuits de leur aspect militant, de changer de braquet tout en jouant l’alternatif par rapport aux circuits longs notamment en incitant les agriculteurs à s’engager dans les circuits courts.
Pour ce qui est de l’agriculture biologique, les PNR ne sont pas plus en avance que les autres territoires. Peut-être est-ce dû au fait qu’elle n’est pas suffisamment ancrée sur les territoires.
Sur l’éco-construction, les PNR du Massif Central via IPAMAC (l’inter-parcs Massif Central) se sont récemment emparés du sujet. Un bureau d’études effectue actuellement un bilan sur l’ensemble des Parcs concernés, dont celui de Millevaches, pour repérer les manques et définir une stratégie de développement de la filière.
Et sur la question de la gouvernance ?
Globalement, il reste beaucoup de travail à faire pour que la grande majorité des acteurs puissent faire entendre leur voix sur les questions relatives à la vie de leur PNR. Les grandes messes des instances des collectivités ne sont pas toujours adaptées au public visé. Certains Parcs comme celui de Millevaches en Limousin ont fait le choix d’intégrer dans leur syndicat mixte avec voix délibérative des acteurs du territoire comme les chambres consulaires ou de créer en complément des instances consultatives réunissant les forces vives du territoire.
Propos recueillis par Frédéric Thomas