Julian Assange, le fondateur de WikiLeaks emprisonné actuellement à Londres, passait le 21 octobre 2019 devant un tribunal londonien suite à la demande d'extradition que réclame les États-Unis à son encontre. Des soutiens français avaient fait le déplacement. Parmi eux, deux Gilets jaunes de la Montagne. Notre « envoyée spéciale » à Londres nous raconte ce qu'elle a vu.
Julian Assange est un prisonnier politique qui a dénoncé les crimes de guerre de l’armée des États-Unis en Irak et en Afghanistan en publiant des milliers de documents ultra confidentiels. L’accusation portée contre lui est très précise : conspiration avec Chelsea Manning pour publier les journaux de guerre en Irak (Iraq War logs), de la guerre en Afghanistan (Afghanistan war logs) et les câbles du Département d’État. Le but de l’audience du 21 octobre 2019 était de déterminer le calendrier de la procédure d’extradition. La défense de Julian Assange demandait plus de temps pour préparer son dossier et contestait le fait que les infractions politiques étaient expressément exclues du traité d’extradition. Il devrait donc y avoir, selon eux, une audience préliminaire pour déterminer si le traité d’extradition peut ou non s’appliquer1.
120 Gilets jaunes
Deux bus étaient affrétés depuis Paris pour se rendre à l’audience procédurale de Julian Assange à Londres. Départ Porte de La Chapelle, direction Dunkerque pour prendre le ferry afin de se rendre à Londres au tribunal (Westminster magistrates court). Le lendemain, lundi 21 octobre 2019, l’audience avait lieu à 9 heures. Environ 200 personnes étaient au rendez-vous dont 120 Gilets jaunes français avec Juan Branco, avocat et journaliste, représentant d'Assange en France, et Maxime Nicolle.
Julian Assange était convoqué pour que lui soit signifié le renouvellement de sa peine en Grande-Bretagne. C’était une audience procédurale et reconductible tous les 28 jours pour lui signifier sa peine. Nous étions présent.es à l’intérieur et à l’extérieur du tribunal. Une quinzaine d’entre nous a pu avoir accès à la salle d’audience. Julian Assange était derrière une baie vitrée à l’épreuve des balles. Julian est de grande taille, son visage était très pâle et d’après ses amis il était fort amaigri. Il semble ne pas comprendre ce qu’il fait dans cette cours de « justice » et met beaucoup de temps à répondre aux questions de la présidente, comme s’il était absent et diminué intellectuellement. A un moment, au début de l’audience, il se retourne vers ses amis qu’il distingue dans la salle et lève le poing !
159 années de prison
Ses conditions d’incarcération, à l’isolement dans l’aile psychiatrique de la prison de haute sécurité de Belmarsh, dénoncées à l’ONU par Nils Melzer, rapporteur spécial des Nations Unies sur la torture, ont considérablement affecté Julian Assange. Par exemple, il hésite à décliner sa date de naissance comme s’il l’avait oubliée en partie. Une nouvelle audience est prévue en décembre et une dernière le 24 février 2020 pour lui signifier son extradition éventuelle vers les États-Unis où il encourt 159 années de prison pour espionnage. Washington dicte ses instructions à la Grande-Bretagne. Cela fut particulièrement visible au cours de l’audience par l’intermédiaire de la juge Vanessa Baraister qui s’adressait à la défense avec mépris, affichant un ennui profond. Cinq représentants du gouvernement américain étaient assis derrière les procureurs... La juge a refusé un délai supplémentaire réclamé par les avocats pour mieux préparer le dossier dans l’optique du procès du 24 février 2020, lequel se tiendra dans le tribunal de la prison adjacente de Belmarsh (relié par un passage souterrain) où seulement six personnes seront acceptées dans le public...
À la sortie du tribunal, le représentant de Wikileaks a dénoncé la torture dont Julian Assange est victime et a souligné le fait qu’il est un prisonnier politique en danger de mort. Le lundi après-midi la manifestation s’est déplacée devant l’ambassade d’Australie à Londres (rappelons qu'Assange est australien), mais sans effet particulier.
C.C.
1 Voir l'article de Craig Murray sur le site Le Grand Soir : https://www.legrandsoir.info/assange-au-tribunal-21-octobre-2019.html