Et quand le fer est de l'or ou du platine, celui des multinationales de la bourse et du pillage de notre Planète, les recours juridiques ou les enquêtes publiques ne sont que fétus de paille. Il ne nous reste qu'un seul pourvoi : l'appel à la mobilisation des consciences citoyennes pour refuser leur hégémonie sur l'espace du Parc naturel régional du Millevaches. C'est la conclusion que l'on tire après avoir parcouru les quelques 750 pages du dossier de l'enquête publique sollicitée par la TARMAC pour poursuivre et étendre l'exploitation de la carrière située au Mont Larron et La Roche commune de Saint Julien le Petit. Cette enquête publique au titre "des installations classées pour la protection de l'environnement" était ouverte du 29 novembre au 29 décembre 2004 à l'initiative du "Pôle environnement et développement durable de la Préfecture de la Haute Vienne".
L'échancrure de la carrière du Mont larron est une plaie béante et agressive dans le paysage de la montagne limousine. Elle est visible à des dizaines de kilomètres. Elle a un impact négatif sur le plan environnemental et paysager à l'entrée du Parc naturel régional du Millevaches.
Située en bordure d'une des routes principales d'accès à Vassivière, elle est source de multiples nuisances et dégradations sur cette voirie. Si la charte du PNR reconnaît à juste titre que les carrières participent au développement économique du territoire, elle n'en attend pas moins que leur mode d'exploitation soit en conformité avec les préconisations des chartes paysagères. Et plutôt que d'assister à cette gigantesque déstructuration du paysage, les animateurs de la charte ne devraient- ils pas négocier avec la puissante Tarmac la remise en état des nombreux fronts de taille de carrière à l'entrée des bourgs et villages de la montagne limousine?
Traditionnellement, ces petites carrières ont été exploitées juste le temps nécessaire à l'extraction des matériaux pour la construction puis abandonnées. Elles peuvent parfois être dangereuses et méritent souvent leur réhabilitation harmonieuse dans le paysage. Voilà une action paysagère positive pour tout le périmètre du PNR : le lancement d'un projet innovant pour la réhabilitation paysagère des petites carrières par une unité mobile de concassage. Avec les moyens colossaux dont elle dispose, la Tarmac est toute désignée pour répondre à un tel appel d'offre. D'autant plus qu'elle en a déjà fait usage sur le terre-plein de la Maraude, lorsqu'elle a repris l'exploitation Barriaud.
La Tarmac a acheté en 1998 le droit d'exploitation de la carrière à la Société Barriaud avec une autorisation de foretage pour 15 ans sur un périmètre et une durée fixés jusqu'au 5 juin 2004. Au terme de ce contrat, elle sollicite le renouvellement d'autorisation d'extension du périmètre en le multipliant par deux et pour une durée de trente ans en raison des investissements lourds qu'elle a engagés en 2003-2004 pour l'exploitation de la carrière. A cet effet elle demande aussi l'autorisation de l'implantation d'une nouvelle installation de premier traitement des matériaux et sans vergogne espère bien "pérenniser l'exploitation bien au-delà de cette durée". La Tarmac emploie trois, voire quatre salariés permanents sur le site de la carrière et de l'usine très automatisée déjà en fonctionnement depuis le printemps 2004.
"La société Tarmac née au Royaume Uni au début du XXème siècle est depuis l'an 2000 une filiale à 100 % de l'Anglo-American, n° 1 mondial dans les secteurs de l'industrie minière et des ressources naturelles. Ses intérêts principaux sont centrés sur l'or, le platine, les diamants, la houille, les métaux ferreux et de base, les minéraux industriels et les produits forestiers. Anglo American représente un monde de ressources géographiquement diversifié en Afrique, en Asie, en Europe, en Amérique du Sud et du Nord et en Australie"1. Une vraie multinationale, dont les stratégies fluctuent en fonction du pillage qu'elle opère dans les pays les plus fragiles. Par exemple "en l'an 2000, son activité or (la plus grosse compagnie d'or au monde) a progressé dans sa stratégie d'abandon d'extractions profondes à coûts élevés par l'acquisition d'intérêts en Tanzanie et au Mali. Cette stratégie de gisements bon marché a été complétée par la cession de mines à coûts élevés en Afrique du Sud …"
"La Tarmac est implantée en France depuis 1990, où ses activités s'articulent autour de la fabrication de matériaux de construction en béton et la production de granulats". La succursale Tarmac France a son siège social dans la commune de Feytiat où elle emploie 6 salariés. Inutile de préciser que ce lourd dossier est comme on dit "en béton". Expertises, cartes, plans, photos, analyses et tableaux, tout est "nickel". La Tarmac a fait appel aux agences et cabinets spécialisés les plus pointus. Et n'importe comment si vous vous mêlez de soulever quelque opposition, une pléiade d'avocats d'affaires mettra en pièces toute forme de contestation. Osons quand même quelques petites remarques. Tout au long de la lecture des nombreux rapports et pièces diverses des 6 tomes du dossier tout est daté d'avant le mois de juin 2004, d'ailleurs c'est réglementairement la date d'échéance de l'autorisation d'exploitation. Alors pourquoi attendre le mois de décembre 2004 pour procéder à l'enquête publique ? Quand la population poly-résidentielle et touristique n'est pas en mesure d'être informée et de donner aussi son point de vue ? Et que signifie une demande d'autorisation d'installation de premier traitement des matériaux, déjà en fonctionnement depuis le mois de juin ? Compte tenu de ce que sont les stratégies des multinationales2, il est difficile d'accorder quelque confiance à une entreprise qui d'entrée de jeu affirme qu'elle "pérennisera l'exploitation au-delà des trente ans" et "qu'elle débutera les travaux dès l'obtention de l'autorisation".
D'ores et déjà en doublant son périmètre, elle assure la disparition à très court terme d'un village caractéristique de la montagne limousine. Les premières maisons du Mont Larron, déjà fissurées par l'exploitation à petit régime de la Société Barriaud sont à moins de 100 mètres du front de taille où s'effectueront des tirs de mine deux fois par mois. Il est déjà grand temps de mettre en garde les habitants du village de la Gorce. La Tarmac ne tardera pas à les rejoindre.
L'enquête publique est aujourd'hui terminée. Mais il reste encore le recours de la pression citoyenne avant que le préfet ne signe son arrêté préfectoral. Tout citoyen concerné par le PNR peut rejoindre la pétition soutenue par l'association LAMINE (Larron Millevaches Nature Ecologie)3 pour s'opposer à l'extension de la carrière du Mont Larron. Une signature pétitionnaire - quoiqu'en pense un vice président du PNR - est une forme de la citoyenneté participative. Au 25 janvier, cette pétition a réuni 1050 signataires.