Depuis la grande fête de la célébration de son trentième anniversaire à Nedde en septembre 1996, le Symiva (Syndicat mixte pour l'aménagement du lac de Vassivière) s'est aventuré dans la communication sur sa politique d'aménagement pour l'avenir de Vassivière. A cette occasion, il publiait un premier et unique numéro de la Gazette de Vassivière. Elle ne s'est jamais renouvelée malgré l'annonce d'une périodicité trimestrielle. Une gazette pourtant riche en informations très intéressantes. Elle faisait notamment écho au projet "VASSIVIERE 2000", une étude concoctée par la SOMIVAL (Société de mise en valeur de l'Auvergne et du Limousin) qui réactualisait de précédents plans-programmes de développement datant de 1989 et 1993 : Vassivière an 1 et an 2. L'objectif est clairement affiché de faire de Vassivière le fleuron et la station touristique phare du Limousin. L'optimisme est alors au beau fixe ; la vidange du lac a connu un succès inattendu et une bonne notoriété grâce à une excellente couverture médiatique, régionale et nationale.
Les études autour de ce projet Vassivière 2000 se poursuivront jusqu'en 1999-2000 toujours sous la houlette de la Somival mais aussi avec d'autres partenaires publics et privés sollicités par le Symiva. La fermentation de cette longue réflexion aboutit à l'élaboration d'une "charte de valorisation du patrimoine environnemental et paysager" et à la définition des objectifs d'un "contrat de station" à l'échéance de 2006. En prenant les rênes du Symiva en 2001, le président Denanot relance la communication avec La lettre de Vassivière. Elle sera moins éphémère ; semestrielle en 2002 et malgré une éclipse en 2003, elle prend un rythme bimestriel en 2004 tout en modernisant le look de son logo et de sa mise en page. L'avenir de Vassivière est affiché comme un enjeu régional, il se mesure concrètement par l'importance de la participation financière de la Région dans le budget du Symiva (49 %, hors investissement). Mais l'essentiel de la communication se concentre non plus sur des études mais sur la faisabilité du projet Vassivière 2000 afin de "réorienter le site de Vassivière". Cette mission est alors confiée au cabinet DETENTE, un bureau "d'ingénierie touristique culturelle et de loisirs" de Paris. Il lui est demandé dans une première étape de valider les réflexions menées depuis douze ans et de les confronter aux attentes des clientèles touristiques d'aujourd'hui.
DETENTE présentera son diagnostic à l'automne 2002. Il est sévère sur le passé : "Vassivière un constat d'échec et un système à bout de souffle . Néanmoins "ce territoire quasiment vierge est en phase" pour écrire une page neuve du développement touristique". Il présente alors un "projet de refondation du développement touristique de Vassivière". "Il faut créer un univers artificiel qui corresponde aux images de ce qu'ont les gens en tête. Pour le grand public, Vassivière est un tac canadien au milieu des bois ". Faisant table rase du passé et de l'inscription du lac dans son territoire intercommunal et dans l'espace du Millevaches, la "station" Vassivière s'organise à partir d'un port, d'un équipement aqua-récréatif et autour d'un "cœur de station" (voir ci-dessous) réunissant des hébergements touristiques, des équipements commerciaux, un espace agora pour séminaire ou spectacle. Les modèles référents sont ou les stations de la montagne française : Avoriaz, Val d'Isère, ou Port-Grimaud et La Grande Motte sur le littoral méditerranéen.
Sous la pression du Symiva, les promoteurs du projet concèderont le dédoublement des équipements de la station sur les deux sites d'Auphelle et de Vauveix-Broussas. Comme ils introduiront dans leur cadre paysager l'île de Vassivière et le Centre National d'Art et du Paysage. Débats et tables rondes seront organisés tout au long de l'hiver et du printemps 2003 pour débattre du projet. Il ne soulèvera pas l'enthousiasme des locaux, pas plus d'ailleurs que des partenaires extérieurs à qui le président a donné la parole dans la lettre de Vassivière de mars 2004.
Dans ses dernières livraisons, en septembre-octobre 2003, sur la structuration du territoire et son montage financier, DETENTE a pris en compte un certain nombre des objections et critiques entendues. Il a davantage intégré les structures territoriales et touristiques existantes, tel par exemple le Parc Naturel Régional de Millevaches. De même qu'il s'est rapproché des particularités du tourisme en espace rural - bien qu'il n'en maîtrise guère la spécificité, sinon pour la dénigrer. Vassivière sera la "station touristique nature en milieu rural" ou encore "Vassivière en Limousin, station rurale éco-touristique" pour être dans le vent du durable et de la biodiversité. Toutefois "notre projet touristique Vassivière-Detente" demeure bien fixé sinon figé sur son concept centralisateur de station exclusivement tournée vers un tourisme marchand. Et pour convaincre, il ne craint pas d'enfoncer le clou et de revenir à son modèle référent : "/a station c'est le site lacustre, comme le domaine skiable dans une station de montagne, des équipements, à l'image des pistes et engins de remontée mécaniques, une concentration d'hébergements, de commerces et d'animation".
Voilà Vassivière lové dans son "cœur de station" avec un stock d'hébergements - permanents ou secondaires et de préférence en bois - qui s'organiserait autour du village et du lotissement d'Auphelle (celui-ci a déjà 25 ans, et tous les lots ne sont pas encore vendus !), pour investir le Chambou et s'étirer jusqu'au Puy Lenty ! Certes les promoteurs ne manquent pas de rappeler que l'offre d'hébergement relève de l'investissement privé. Néanmoins le coût d'investissement des équipements publics de ce projet à très haut risque est chiffré par DETENTE à 34 millions d'Euros pour les 10 prochaines années !
Au moment où ce projet pharaonique est en plein débat, deux événements importants viennent heureusement modifier la donne. La signature du décret ministériel pour la reconnaissance du Parc Naturel de Millevaches et l'arrivée au Symiva d'une nouvelle présidente. Celle-ci, Renée Nicoux, est toute nouvelle élue de la Creuse au Conseil Régional, spécialement chargée de la culture et du patrimoine ; elle est déjà élue de la Montagne Limousine, comme conseillère municipale de Felletin au titre de la vie associative. Avec toutes ses compétences, elle est aussi membre du Comité Syndical chargé de la gouvernance du PNR et tout à fait en mesure de trouver les articulations nécessaires entre ces deux structures. Celles-ci ne pourraient-elles pas jeter les fondements d'un tourisme d'espace et de nature à l'échelle du Millevaches ? Tourisme de découverte et d'exploration susceptible de développer une panoplie d'activités interactives aussi diverses que les sports aquatiques et nautiques ou les randonnées multiformes, tout autant que la valorisation des ressources culturelles et patrimoniales d'un territoire vivant que ses habitants se seront appropriés. La charte du PNR et la convention cadre qui lie les deux institutions sont déjà là pour fonder ce projet aussi ambitieux que réaliste.
Alain Carof