"S'il est vrai que ce qui attire c'est la nature et le calme, il ne faut peut-être pas construire les pieds dans l'eau"
Vassivière serait un paradis du tourisme vert qu'il reste à mettre en valeur. Il est vrai que nous avons là un des derniers grands lacs d'Europe occidentale ayant (presque) échappé à l'urbanisation. Pour profiter de cette situation exceptionnelle faut-il construire au cœur même du paradis des ensembles de logements et des équipements touristiques ?
Répondre oui c'est d'abord céder à l'illusion selon laquelle la nature est un bien tombé du ciel que le tourisme n'a plus qu'à cueillir. En fait cette nature, il faut apprendre à la lire, à en discerner les éléments qui intéressent les touristes, à les gérer (préserver et mettre en valeur) et à communiquer à leur propos, bref à organiser une offre de nature. Cela ne faisait pas partie du cahier des charges de l'étude DETENTE. Les collectivités locales et les services de l'Etat se sont rendus compte du manque et ont lancé des réflexions sur ces dimensions (étude paysagère confiée à un grand nom de la profession, etc.). C'est certes positif, mais un supplément d'âme architectural ou paysager et l'utilisation d'énergies renouvelables ne sont pas suffisants pour lever les inquiétudes que suscite le projet DETENTE.
Miser sur un tourisme marchand avec un habitat groupé en bord de lac (résidences de tourisme ... ) c'est rentrer dans un jeu de la concurrence où toutes les destinations se battent pour capter une clientèle volatile et versatile, où les investissements les plus récents rendent obsolètes ceux d'hier, obligeant à une fuite en avant dans l'investissement.
Une stratégie de développement du tourisme sur Vassivière et les plateaux devrait d'abord partir de deux constatations simples.
Depuis plus d'une décennie, la fréquentation de l'hexagone par les Français décline : on perd des nuitées. De plus, les Français se refusent obstinément à voir leurs vacances organisées par des marchands de tourisme : presque les deux tiers des nuitées se prennent dans les résidences secondaires, chez les parents ou chez les amis.
C'est la fréquentation étrangère qui sauve la mise, et plus précisément à la campagne celle des pays voisins. Pendant que l'étude DETENTE se focalise sur la création de 2000 lits touristiques en dix ans, moyennant une mobilisation de fonds publics de 25 ou 30 millions d'euros, il a été vendu, pour la seule année dernière, aux étrangers sur les trois départements de l'ordre de 1500 résidences secondaires (soit environ 7500 lits). Même si les hautes terres ne sont pas l'ensemble du Limousin, on est dans un autre ordre de grandeur .
Il ne faut pas tirer de ces constatations l'idée qu'il suffit de laisser faire : le tourisme non marchand en particulier celui des résidences secondaires a besoin d'être accompagné et encadré.
Il faudrait d'abord que nos actions soient en phase avec les désirs de ces clientèles françaises et étrangères que l'on n'a même pas besoin d'aller chercher. S'il est vrai que ce qui attire c'est la nature et le calme, il ne faut peut-être pas construire les pieds dans l'eau mais en retrait dans les bourgs (là où il y a des services).
Il faut aussi gérer l'arrivée de ces clientèles de résidents secondaires. On sait bien ici, depuis les années soixante dix, combien les nouveaux arrivants revitalisent le territoire. On sait aussi que les achats de résidences secondaires font monter les prix et rendent difficile le logement des jeunes du pays (voir l'expérience de l'Alsace ou du Périgord). Une vigoureuse politique du logement doit donc accompagner le développement touristique (lotissements et architectures de qualité en bordure des bourgs) à la fois pour les résidents permanents et secondaires si l'on veut continuer à en accueillir quelques uns quand la dernière ruine aura été réhabilitée.
Jean-Paul Ceron
(Centre de recherches interdisciplinaires en droit de l'environnement, de l'aménagement et de l'urbanisme)
Éphéméride de Vassivière
1946 : Premiers coups de pioches
1951 : Premiers kilowatts turbinés
1952 : Installation du Touring club de France à Auphelle
1954 : Première fête de l'eau organisée par le TCF
1957 : Esquisse d'un projet de SITALAC (Syndicat intercommunal pour l'expansion du tourisme et de l'agriculture aux abords des lacs limousins).
1960 : Constitution du Groupement d'Urbanisme du lac de Vassivière entre les communes de Faux la Montagne, Royère et St Martin Château en Creuse, Beaumont et Peyrat le Château en Haute Vienne, pour la protection du site et la maîtrise du foncier. Première vidange du lac.
1962 : La commune de Beaumont avait sollicité en 1960 l'appellation : Beaumont-Vassivière. Un décret ministériel lui accordera le nom de Beaumont du lac, et bien que le village de Vassivière soit sur la commune de Beaumont, c'est Royère, six ans plus tard en février 1968, qui deviendra Royère de Vassivière
1966 : Naissance du Symiva = Syndicat mixte interdépartemental de Vassivière
1968 : Adhésion de la commune de Gentioux au Symiva
1971 : Deuxième vidange du lac
1972 : Lotissement de Nergout
1974 : Convention entre l'EDF et le Symiva pour la gestion touristique du lac
1975 : Construction des villages de vacances de Pierrefitte (gestion concédée à LorraineVacances) et de Masgrangeas (Touring club de France)
1977 : Adhésion de la commune de Nedde. Etablissement d'un POS pour tout le territoire du Symiva. Création de la route circum-lacustre. Avec l'intervention du Conservatoire National du Littoral achat de l'île de Vassivière
1979 : Lotissement d'Auphelle
1980 : Installation du Symiva dans l'île de Vassivière
1982 : Visite du Président de la République sur l'île de Vassivière
1984 : Création de Radio Vassivière
1985 : Adhésion de la Région au Symiva et modification des statuts. Etape contre la montre du tour de France.
1987 : Adhésion de la commune de Feniers. Lancement de la réflexion sur Vassivière 2000.
1990 : Construction de la tour du Centre d'Art contemporain. Etape contre la montre du tour de France
1995 : Etape du tour de France. 3ème Vidange du lac. Création du festival du conte
1996 : Réaménagement des plages et des pontons pour la surélévation du lac d'un mètre. 30ème anniversaire de la création du Symiva, lancement de la Gazette de Vassivière
2001 : Fermeture du village vacances de Masgrangeas
2002 : Parution de la Lettre de Vassivière
2003 : Sous l'effet de la chaleur et de la sécheresse l'EDF rompt son contrat avec le Symiva en baissant le niveau du lac pendant la saison estivale pour assurer le refroidissement des eaux de la Vienne au niveau de la centrale nucléaire de Civaux