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L'Orphelin de Gentioux

Date
samedi 1 mars 2025 12:15
Numéro de journal
90
Auteur(s)
Michel Lebailly
Visite(s)
39 visite(s)

Il mesure 1m20 et pèse 250 kg. Il honore les hommes du village morts au combat. Il maudit la guerre, c’est le symbole du pacifisme. Il est beau, attachant, familier. On est heureux de le retrouver sur la place. Il est connu dans le monde entier. Il représente les habitants d’hier et d’aujourd’hui, les familles, les générations. Il dresse le poing, c’est un rebelle. Il est si petit, si fragile. Il incarne toutes les victimes des injustices et des guerres. Il est debout. C’est le peuple dressé contre le pouvoir. Ses sabots sont enfoncés dans la terre limousine. Son message est universel. Il est plus que centenaire. Et il méritait bien un livre. C’est le propre des statues : offrir une multitude de points de vue. Pour tenter d’en approcher les mystères il fallait jouer collectif. Dans le prolongement de son centenaire, peu après son retour après une rénovation réussie, c’est donc un livre polyphonique qui lui est consacré. Regards croisés sur un monument unique par l'éditeur de l'ouvrage.

 

a deuxConcours d’écriture et goguette

À l’origine de ce livre, les quelque 150 lettres envoyées à l’Orphelin. Trois lauréats dans chaque catégorie - adulte et 15-17 ans - et une sélection réalisée par le jury donnent un aperçu de ce que le monument peut inspirer. Il est question de la guerre et de la paix, du Japon et de l’Ukraine, de Louis Pergaud et de Rudyard Kipling, de l’enfance, de l’école, de la ferme, de l’Arc de Triomphe, du subjonctif et de l’hospice d’Annecy. Il y a des textes en vers et un courrier du ministère des Armées.À ces 23 contributions s’ajoutent les textes de la goguette spéciale qui s’est tenue le 11 novembre 2023 sur le thème « Maudites soient les guerres ». On ne présente plus ici les goguettes, formidable espace d’expression libre animé par le fameux Contançi Orchestra depuis la Montagne limousine.

 

Une année de centenaire

Tout au long de 2023 la municipalité de Gentioux-Pigerolles a multiplié les événements autour du monument érigé 100 ans plus tôt. Expositions, conférences, projections, débats, spectacles, rencontres et même sérigraphies en direct. Sans oublier l’inauguration du chemin de randonnée « La Creuse pacifiste » qui relie le cimetière de Royère-de-Vassivière où est enterré Félix Baudy, fusillé « pour l’exemple », et le monument de Gentioux. Trois conférences ont été retravaillées par leurs auteurs pour être reprises dans le livre : « La mobilisation de femmes creusoises dans la grande guerre », par Annette Marsac, « La diversité des pacifismes entre les deux guerres et leurs répercussions contemporaines » par Pierrick Hervé et « Fonder un droit international condamnant la force » par Jean-Yves Le Naour.

 

Le temps des survivants et le temps des héritiers

Il y a eu l’envie d’aller plus loin, d’approfondir l’histoire du monument et les rapports qu’il entretient avec le territoire. Rendons ici hommage à Télémillevaches qui a produit en 1996 le documentaire « Maudite soit la guerre », de Catherine Varoqui et Jacques Lefebvre, avec des images de Jacques Malnou. Ce film est un point d’étape déterminant. On y retrouve, sinon Jules Coutaud, du moins des personnes qui l’ont bien connu, comme André Chandernagor. Il donne la parole à son successeur, Pierre Desrozier, à Henri Garaude considéré comme un modèle de l’orphelin, à des témoins, à l’historien Antoine Prost et au sociologue Gérard Monédiaire…
Près de 30 ans se sont écoulés et l’histoire a continué, nourrie d’archives d’IPNS (bien sûr), de Télémillevaches toujours, de France3 Limousin, de l’INA, de La Montagne, de Radio Vassivière, jusqu’à rejoindre l’actualité.
À l’autre extrémité de la chronologie, les archives départementales livrent le détail du recensement de 1911 où figurent nombre des 63 tués. Il esquisse quelques bribes de leur vie, leur métier, leur âge, leur situation familiale. Le livre montre aussi une photo de classe des garçons en 1920, et des cartes postales de la place du Champ-de-Foire à la même époque. On y voyait déjà la bascule, la mairie, les écoles (de filles et de garçons) mais pas le monument…
De façon un peu arbitraire le chapitre est divisé en deux. « Le temps des survivants » est marqué par les 45 ans du mandat de Jules Coutaud, ancien combattant aux poumons brûlés par les gaz asphyxiants, avec lui, ceux qui ont porté le projet, choisi d’inscrire dans la pierre « Maudite soit la guerre », décidé de montrer un orphelin brandissant le poing.Vient ensuite « le temps des héritiers », celui de nouvelles responsabilités, de nouveaux questionnements, de querelles parfois… Avec cette question récurrente : « À qui appartient le monument ? ». On vous souffle la réponse la plus consensuelle : à tout le monde et à personne, ce qui revient au même. Le monument est notre bien commun, à préserver.

 

Avec l’Etat : je t’aime, moi non plus

On le sait, le monument n’a jamais été officiellement inauguré. Mais ce qui devait être une humiliation qu’il fallait réparer s’est transformé progressivement en singularité remarquable, voire en motif de fierté. Les rapports avec l’État ont pris au fil du temps une tournure plutôt comique. Il y a du « je t’aime, moi non plus » dans ces regards qui se détournent, ces bouderies, ces bouquets de fleurs que l’on n’ose pas déposer soi-même, ces rendez-vous manqués, ces déclarations hésitantes, sans parler des cadeaux d’anniversaire, des confidences, des courriers…
Le débat reste ouvert, la fin de l’histoire n’est pas écrite.

 

Chansons et fanfare

La force du monument tient à l’alliance, unique, entre le poing dressé et l’apostrophe « Maudite soit la guerre ». Cette expression est ancienne. On la retrouve vers 1860 dans la fameuse chanson de Gustave Nadaud « Le Soldat de Marsala » ou, bien avant, dans « Le Prince d’Orange », et encore aujourd’hui dans « La Rue des Lilas ». Et comment parler chanson sans évoquer celle de Craonne (dans l'Aisne). Son plateau, où tant de soldats laissèrent leur peau, comme le dit le couplet, a quelque chose de familier pour nous. D’un plateau à l’autre, on se comprend.
Le 11 novembre 2023, la goguette du centenaire donnait le ton avec le Constançi Orchestra. Un an plus tard, c’est la fanfare intercommunale de Gentioux-Faux-la-Montagne et la Villedieu qui ouvrait la cérémonie pour sa première apparition publique. Au programme une musique de Georges Brassens, celui qui, dans La Mauvaise réputation, préférait rester dans son lit douillet plutôt que d’écouter la musique qui marche au pas…

 

Pour ne rien oublier

Outre Jules Coutaud, le maire, maréchal-ferrand, on croise Jean Duburgt, conseiller municipal et ébéniste. On lui doit la maquette en bois de l’obélisque et de l’Orphelin. Le monument est édifié ensuite par Emile Eglizeaud, tailleur de pierres à Faux-la-Montagne. Julles Pollacchi, le sculpteur sourd-muet réalise la statue qui assurera sa postérité.
Il y a Marius Andrieux, mort à 20 ans quelques semaines avant l’armistice et qu’une coquille prénomma longtemps « Maruis ». Il y a Augustin et Henri Garaude, père et fils. L’un est mort en 1919, l’autre en 2012. Il y a aussi les morts de la seconde guerre. Parmi eux Jean Dubayle et Raymond Viarteix, du maquis de l’Armée Secrète, deux des fusillés de Roussines. Il y a encore les morts gravés à Pigerolles. La Courtine et la mutinerie de 1917. Le souvenir de Jean-Henri Prébost, de Rémi Fraisse, de Nahel Merzouk. Il y a ceux de Flirey, de Souain, de Vingré… Chaque nom est dérisoire et important. Un livre comme un cénotaphe, pour ne rien oublier.
A 102 ans, de retour à Gentioux, l’Orphelin ne s’est jamais senti aussi jeune. Il nourrit toujours les débats, rafraîchit les mémoires. Et l’actualité, hélas, confirme que son message reste toujours aussi nécessaire.
Maudite soit la guerre !

 

livreMichel Lebailly

Où se procurer le livre ?
Le livre est distribué par Pollen et tout bon libraire saura le commander, partout en France. Il devrait être disponible dans les librairies de proximité (Felletin, Eymoutiers, Aubusson, Guéret, La Souterraine, Meymac…). Vous pourrez également vous le procurer auprès de la librairie associative et itinérante La Limouz’ine, à La Renouée à Gentioux, à l’épicerie et au Volubilis à Faux-la-Montagne ou directement auprès des éditions La Déviation à La Villedieu : 06 10 82 65 18 –
editionsladeviation.fr
160 pages - 20 €

 

Notre monument parmi les autres

On évalue à 35 000 le nombre de monuments aux morts érigés après la première guerre dans plus de 95 % des communes françaises. Ils sont financés par souscription publique, fonds municipaux et participation de l’État (selon un calcul un peu sordide où intervient le nombre de morts).
C’est entendu, le monument de Gentioux est l’un des plus émouvants (on n’ose pas dire le plus beau, même si on le pense !). Mais tous ont été édifiés à notre intention et nous parlent. Parmi eux, certains sont considérés explicitement comme pacifistes. Selon quels critères ? L’émotion ne se laisse pas enfermer dans une petite case et toute classification est délicate. Nous avons néanmoins tenté un tour d’horizon, cherché les échos que notre orphelin pouvait rencontrer ici et là.
Il y a d’abord ceux qui présentent le vrai visage de la guerre : la souffrance à l’état brut, la blessure fatale, l’agonie. Viennent ensuite le chagrin, le deuil, avec les représentations des mères et des veuves, confondues dans la catégorie dite des « pleureuses ». L’absence est souvent exprimée à l’aide de symboles comme le casque, tenu tendrement, caressé parfois, et qui représente son propriétaire disparu.
La Picarde maudissant la guerre par Paul AubanLe pacifisme est plus explicite lorsque la douleur laisse place à la colère, que la guerre est mise en accusation. Il y a des inscriptions, « Que maudite soit la guerre », « Guerre à la guerre », et parfois de véritables discours gravés. On trouve des références bibliques, le commandement « tu ne tueras point » ou des épées brisées.
D’autres monuments expriment l’espoir d’un monde plus fraternel, un idéal de paix et de justice. Avec cette question : comment représenter la paix ? Une déesse ailée, ou simplement une scène de vie paisible ? La Creuse possède sans doute le seul monument de cette période où figure une femme, Emma Bujardet, avec la mention « morte de chagrin ».
À cette exception près, quelle est la place de la femme ? Tantôt la victime éplorée, tantôt la patrie, la victoire et ses lauriers. Parfois aussi l’avenir, debout lorsque les hommes sont morts.
Et puis quelques monuments rendent hommage à ceux qui sont tombés sous les balles françaises, les fusillés, longtemps l’angle mort de la mémoire et une plaie toujours ouverte.


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IPNS - 23340 Faux-la-Montagne - ISSN 2110-5758 - contact@journal-ipns.org
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