Dans le dernier IPNS, nous citions (page 9) Daniel Perducat, maire PS d’Eymoutiers, selon lequel il n’y avait pas eu d’opposition au sein du conseil municipal depuis 30 ans. La perspicacité de l’historien nous apprend que cette situation a duré bien plus longtemps. Sans que la sérénité n’ait régné pour autant.
Pas d’opposition au conseil depuis 30 ans ? Revoyons ça de plus près s’il vous plaît !
1983 : Daniel Perducat (PS), adjoint de Jean Fraisseix (divers gauche), bat Jean-Pierre Faye (PCF), son actuel premier adjoint. Aucune opposition élue, le tract du troisième vomissant le second (et par conséquence le premier) serait aujourd’hui à pisser de rire ! Effectivement, il n’y a jamais eu d’opposition au conseil municipal, pas plus il y a 30 ans que 100. En 2014, c’est une nouveauté, que nous devons aux “néos“ of course ...
Jusqu’en 1940
À Eymoutiers, donc, à l’exception notable de 2008, il y a toujours eu au moins deux listes aux élections municipales, selon les principes suivants :
Dans les années 1870-1900 : une liste républicaine radicalo-progressiste (?) contre une liste conservatrice-cléricale-(et / ou) royaliste. Les premiers (Docteur Pradet) chassent les seconds (Maître Nony) de la mairie en 1878 et interdisent dare-dare les processions et autres ostensions. Waouh !
En 1908 et 1919 : une liste socialiste (Jules Fraisseix) – contre la liste radicale sortante. Les premiers chassent les seconds en 1919, mais voilà qu’arrive le Congrès de Tours et là commence la bolchévisation. Des idées qui venaient de loin ? Pas vraiment en fait.
Dans l’entre-deux guerres : une liste communiste (Jules Fraisseix) contre une liste socialiste (son ancien adjoint). Les premiers chassent les seconds en 1925 (mon “pépé“ Antoine est élu, il a 30 ans). Remarquable : le noyau des deux listes avait collaboré sans problème, battu ou élu, depuis 1908.
Après 1945
Dans les années d’après-guerre : toujours deux listes, une communiste et une socialiste. Les seconds ne réussissent pas à renverser les premiers (1947 : mon “pépé“ revient).
De 1878 à 1961, les Pelauds ont toujours choisi la plus à gauche des listes. Après, ça se complique.
De 1962 (élection partielle) à 1971 : deux listes communistes. Les dissidents battent toujours les orthodoxes.
En 1971, des socialistes rejoignent les communistes indépendants. Le Dr Jules Fraisseix (qui venait de la SFIO) leur avait fermé la porte en 1925. C’est son neveu, Jean, qui l’entrouvre à nouveau.
Dans les années 1970-1980 : deux ou trois listes, avec en 1977 la réapparition notable de la droite (RPR), cette fois officiellement (dans les années 1930, elle s’intitulait “Républicains de gauche“, dans les années 1945-1950, elle s’alliait aux socialistes). À y bien regarder, tout le monde était donc DE GAUCHE. 1977 : mon “pépé“ s’en va (82 ans).
Jules Fraisseix, l’opposant de 1908
En 1989, il y avait des communistes de diverses sensibilités sur 3 listes ! Certains s’alliant au PS de Perducat, nouveau maire, avec cette évidence : depuis 1959, aucun communiste encarté n’a pu être élu. Pour ce faire, il aura fallu soit quitter le parti, soit se renier, parfois les deux d’ailleurs. Il y en a qui sont toujours là en 2014, mais qui ne ressemblent pas à mon “pépé“.
... And so on, jusqu’en 2014. Durant toutes ces décennies de panachage démocratique, les Pelauds avaient toujours élu les listes gagnantes entières ! Seule exception : 1908, Jules Fraisseix est élu unique de la liste socialiste ! Forme l’opposition à lui tout seul, les registres de délibérations sont passionnants à cet égard. Autrement résumé, durant plus de 100 ans, plus de 80 % des Pelauds votaient toujours liste entière. Les choix étaient très tranchés.
2014 : Eymoutiers accède au rang de “grande“ collectivité avec la fameuse proportionnelle que l’on connaît, qui permet d’attribuer 2 sièges sur 19 à la liste ayant réuni un quart des voix ! Çà, c’est de la démocratie ! Mais grâce à cette grande réforme, le conseil municipal d’Eymoutiers a ENFIN une opposition. Jules Fraisseix peut ainsi dormir en paix, il ne restera pas seul opposant pour l’Histoire. (Si j’ai bonne mémoire d’ailleurs, la liste “une commune en commun“, ouais, bof ... a toujours proclamé qu’elle ne se voulait pas “d’opposition“ !)
Et pis, log alors ... Que ce serait-il passé si on avait pu panacher à Eymoutiers en 2014 ? Il y a fort à parier que les stylos auraient beaucoup plus fonctionné que par le passé, et que certains élus n’auraient pas obtenu 75 % des voix comme leurs colistiers...
Michel Patinaud
Digression : mon pépé Antoine a toujours été un natif-néo, ou l’inverse : en 1925, il était “étranger“ car venant de Domps, et en 1947, il revenait de Faux-la-Montagne, après un passage à Peyrelevade ! En 1959, il pouvait cependant se considérer comme “natif“. À l’époque, l’un ou l’autre ne posait vraiment aucun problème (il faut dire que mon pépé ne buvait pas du cidre bio, lui !).
- À Bujaleuf, le blaireau était viking !
L’inénarrable maire de Bujaleuf, traqueur de blaireaux et fournisseur officiel de mascotte pour IPNS, est né en... Normandie. Ses parents sont de ces Normands venus dans les années 1960 repeupler les fermes limousines. On n’en avait pas vu depuis les Vikings sur la Maulde, c’est dire !