Quoi de plus simple, de plus évident pour une petite commune comme la notre que de se réunir pour discuter et fixer ensemble les orientations et les choix dans la gestion des affaires communales.
Les premières assemblées des habitants à Saint Martin-Château sont ainsi nées de cette réflexion initiale au sein de la dernière équipe municipale. Une douzaine se sont déroulées depuis cinq ans et elles ont rassemblé entre trente et quarante participants en moyenne, ce qui constitue une belle proportion dans une commune de 150 habitants. La dernière avait justement pour objet de faire le point sur cette pratique : comment mieux formaliser les prises de position de l'assemblée ? Le vote est-il nécessaire ? Faut-il tenir compte de ceux qui ne participent pas et comment ? Le conseil municipal doit-il toujours traduire en termes de décisions les choix de l'assemblée ? Bien des questions demeurent car l'assemblée des habitants n'applique pas des règles préétablies. Quelques points-clés sont toutefois reconnus par tous comme la nécessité d'annoncer à l'avance les questions abordées pour permettre à chacun de se préparer mais aussi l'importance de laisser certaines assemblées ouvertes aux choix des participants. Enfin il semble difficile d'envisager un hiatus entre les positions adoptées par le conseil et les choix de l'assemblée. Dans les faits les discussions et les décisions au sein du conseil sont facilitées dans la mesure où elles s'appuient sur les orientations et les choix établis par les assemblées des habitants.
fichier grande taille à télécharger pour mieux lire...926.52 Ko
Saint-Martin-Château, des maisons habitées, des résidences secondaires et des maisons vides. Mais vides ne veut pas dire abandonnées ou “vacantes“, et encore moins “à vendre“ ou “à louer“. Les propriétaires sont plus ou moins lointains, parfois empêtrés dans des successions, souvent attachés aux souvenirs de la maison familiale, ou encore ignorants totalement l’existence de ces biens.
Après les rares petites annonces, ceux qui cherchent des maisons pour s’installer ici passent par la mairie et le cadastre de la commune, les archives, les notaires en espérant identifier les propriétaires de maisons vides. Ils contactent les propriétaires et leur expliquent leur démarche. Parfois, cela suffit, souvent pas.
En 2014, un couple qui cherche depuis plusieurs années à contacter les propriétaires d’une maison abandonnée de la commune, apprend l’existence de la procédure des “biens vacants sans maitre“. La mairie de St Martin Château étudie cette piste et constate que comme aucun impôt local n’a été perçu depuis plus de 30 ans sur ces biens, ils peuvent être soumis à cette procédure relativement simple. Au bout de 6 mois d’affichages et de démarches légales, aucun propriétaire ne s’est manifesté. La maison est incorporée dans le patrimoine communal et revendue à ceux qui sont à l’origine de ces recherches. Les terrains attenants sont revendus aux personnes voisines des parcelles concernées pour y faire ici un épandage ou du pâturage. Sur les parcelles restants propriété de la commune, une demande est faite par des habitants d’y installer un potager. Depuis d’autres parcelles non bâties ont été intégrées de la même manière dans le domaine communal.
"Les maires des communes creusoises dont les conseils municipaux ont décidé de ne pas adhérer au projet de Parc Naturel Régional, réunis le 26 janvier 2004, après avoir pris connaissance de votre journal de décembre 2003 (IPNS n°6), à l'unanimité :
Considèrent que tant les illustrations qui y figurent que les qualificatifs employés dans son article par Philippe Simon et les jugements qu'il porte constituent une atteinte à l'honneur et à la probité de tous les élus de leurs communes ;
Estiment que leur caractère insultant constitue une diffamation, et que de tels agissements sont indignes de personnes qui invoquent leur conscience citoyenne, et revendiquent un rôle déterminant dans notre société par l'intermédiaire de groupes informels, associations ou autre forum social ;
Expriment leur solidarité vis-à-vis de tous les élus de ces communes, quel que soit le sens du vote émis par chacun à propos du Parc Naturel régional ;
Décident qu'ils s'abstiendront d'entretenir la polémique sur les qualités respectives des élus et des divers rédacteurs du journal, et qu'ils laissent à chaque lecteur le soin de se faire sa propre opinion devant la violence du réquisitoire publié ;
Rappellent que, élus au suffrage universel, les conseillers municipaux administrent leur commune conformément aux règles de fonctionnement des institutions de notre démocratie républicaine, tout en restant à l'écoute de toutes les opinions dès lors que leur expression demeure courtoise et non partisane".
"Concernant le PNR, que l'on soit pour ou contre, à chacun sa position, mais je trouve inadmissible, maladroit et mal fondé qu'on puisse accuser d'incompétence et d'incapables les maires et conseillers municipaux qui ont voté contre l'adhésion (…).
Qu'il y ait adhésion ou non au PNR, je ne pense pas que ce soit la raison principale qui puisse nuire à l'installation de familles à St Moreil ou ailleurs.
Pour ma part, issue de famille espagnole, de nationalité française, je suis mariée et mère de trois enfants, j'habite la commune de St Moreil depuis 1967, soit bientôt 37 ans, nous nous sommes très bien adaptés et intégrés. Mes parents ont travaillé dans la forêt durement et ceci jusqu'à leur retraite, puis comme nous, ils ont acheté une maison dans la commune et y vivent paisiblement (…). Nous avons choisi de vivre dans cette jolie commune que nous aimons et depuis 37 ans, nous n'avons jamais eu honte d'y vivre et nous en sommes fiers !"
"J'aime la région dans laquelle je vis depuis cinquante ans pour sa rage de vivre, l'opiniâtreté, l'esprit rebelle, le sens du vrai, de la république qui transpire de l'histoire limousine. Tout ceci nous le devons aux personnes qui nous ont précédés et qui ont su nous le transmettre. Ces sept communes ont attiré depuis de nombreuses années des jeunes et moins jeunes grâce à l'extraordinaire qualité de vie de notre belle région. Toutes ces nouvelles personnes apportent leurs coutumes, leur mode de vie. Mais il est regrettable de voir que parmi celles-ci, une minorité a une approche "particulière" vis à vis de nous. Si on n'est pas d'accord avec eux, on est des moins que rien, des pauvres types, bref des RINGARDS ! Non, non et mille fois NON !"
“L'esprit critique de notre conseil municipal a jugé que le fait d'adhérer au PNR n'était pas un moyen d'améliorer le sort de ses administrés. Pourquoi les traiter de ringards ? Ils ont été élus à la majorité et ont parfaitement le droit au refus. Cela est la démocratie. Cette lettre est la réaction d'un habitant qui pendant plus de quinze ans a participé activement à la vie associative de sa commune et ne permet à personne de lui donner des leçons sur la manière de gérer son espace, qui n'est pas d'être parqué et visité comme une bête curieuse”.
Difficile on le voit de ranger Eclats de Rives dans une case avec une étiquette. La sauvegarde et la mise en valeur du patrimoine ? Ce sont bien les objectifs fondateurs de l’association et des réalisations se sont multipliées depuis. La “convivialité” ? c’est vrai on apprécie les échanges et les moments chaleureux, on aime faire la fête à Eclats de Rives et la faire partager. Des passionnés militant pour une nature à la fois mieux respectée et ouverte? Cette forme d’écologie qui associe protection, accueil et activités de découverte fait bien partie de notre culture. Sans oublier la défense des chemins ruraux pour qu’ils redeviennent accessibles et conservent leur caractère de chemin public ouvert à tous. Et depuis quand ce beau programme ? Quelle en est l’origine ?
Souvenez vous : 1994 on prépare la future vidange du lac de Vassivière. A St Martin Château ça discute dur entre copains venus de tous les horizons: 9 m3/seconde voilà ce que sera le débit de la Maulde pendant 1 ou 2 mois. Inquiétude d’abord pour ceux qui risquent de se retrouver les pieds dans l’eau, inquiétude aussi pour ces ponts anciens plus ou moins stables, ces planches de pierres résisteront elles au courant ? Et au fait, combien y a t’il de ponts depuis le barrage jusqu’à Peyrat le Château ? Comment faire pour les sauvegarder ? C’est de ces interrogations et de cette situation d’urgence qu’est née l’idée de constituer une association et pourquoi pas l’appeler Eclats de Rives ?
Beaucoup de chantiers se sont succédés depuis : il y a eu d’abord les ponts de Villegouleix et du Chataignoux avec le difficile apprentissage de la collecte des aides, des subventions et autres partenariats. Le besoin de dresser en même temps un inventaire des ponts et de l’élargir ensuite à l’ensemble du patrimoine rural et naturel. les expositions estivales de peintures et de photos ont matérialisé les inventaires et fait découvrir et apprécier ces richesses oubliées à de très nombreux visiteurs. Beaucoup de sédentaires les ont aussi redécouvertes. L’action d’Eclats de Rives a ainsi été reconnue. Les réalisations se sont multipliées avec le puits du Mas Faure, le four à pain du bourg, la fontaine du village, la réouverture de plusieurs chemins. Aujourd’hui l’association évolue et se tourne davantage vers les partenaires extérieurs en particulier à travers les chantiers de jeunes depuis 2 ans.
Nos actions sont recentrées et fédérées autour du projet de réalisation d’un chemin de découverte de la vallée de la Maulde. L’assainissement du chemin, la signalétique, l’aménagement d’un petit étang, la labellisation du circuit par le comité départemental du tourisme font l’objet d’un partenariat très constructif avec la municipalité de St Martin Château. Reste à faire connaître et apprécier cette réalisation et à lui donner vie à travers des activités. On envisage diverses actions éducatives avec des jeunes de la région dans le cadre d’un Contrat Educatif Local par exemple. Parallèlement l’inventaire du patrimoine se poursuit, une exposition regroupera l’été prochain des photos sur le thème de l’eau dans nos villages: fontaines, abreuvoirs, puits, et aqueducs seront à l’honneur. On retrouvera aussi le rituel de la Fête sur la place de St Martin Château, les balades et toujours beaucoup de discussions et des projets encore des projets…
En rentrant de Bourganeuf, je fus surprise par un spectacle inhabituel sur le bord de la route. Un piou-piou de 14/18 marchant avec son âne ! L’accompagnant un peu en chemin, il me relata rapidement son périple, pressé d’arriver à Saint-Martin pour une halte avant de repartir pour Mirande, en passant par Rocamadour.
Marc Charlier, 66 ans, est un passionné de la Première Guerre mondiale. Il s’est glissé dans la peau d’un soldat avec son compagnon, l’âne Lucky. C’est le jeudi 2 mai 2019, entouré des arrières petites-filles, Joëlle Mouton-Castex et Noëlle et Marie-Laure Descadeillas, des capitaines Castex et Descadeillas, morts ensemble à 28 ans à Verdun, qu’il prenait le départ après un petit café et du tourteau pour Lucky. Marc et Lucky ne connaissent pas leur parcours exact. Quelques étapes sont cependant essentielles : les champs de bataille du Nord et la tombe du soldat inconnu à Paris.
Depuis le 1er mai 2019, ce tout jeune retraité entreprend ce périple sur les traces des poilus, ces soldats de la Première Guerre mondiale, en uniforme, afin de leur rendre hommage. Les célébrations du centenaire de la Première Guerre mondiale se sont achevées l’année dernière, mais le devoir de mémoire doit continuer. Pour Marc Charlier, rendre hommage et exprimer sa reconnaissance envers ceux qui ont combattus pour la France est un véritable objectif de vie, lui qui est un passionné depuis sa jeunesse. Et pour plus de difficultés encore, Marc fait le voyage dans l’uniforme de soldat de 1914. « Quand il y a du vent et de la pluie, j’ai froid, et quand il y a trop de soleil, j’ai chaud », raconte Marc.
Le but du voyage est de rendre hommage à deux officiers originaire de Mirande, tués en 1916 pendant la bataille de Verdun. Les corps d’Anatole Castex et Noël Descadeillas n’ont jamais été retrouvés. Marc transporte un peu de terre du sol natal que lui ont confiée les arrières petites-filles des deux Poilus dans deux sacs de jute pour l’enterrer au bois de Vaux-Chapitre, près de Verdun, à l’endroit où les soldats sont tombés.
C’est au lendemain de son départ en retraite que Marc a tout vendu et s’est équipé pour son expédition. Les deux camarades sont habillés en tenue d’époque, un uniforme avec képi et épaulettes pour le cavalier, une selle mise au point par la classe sellerie harnachement du lycée agricole Valentées pour l’âne.
Au cours de son périple, Marc est aidé par des gens qu’il rencontre au hasard, comme Jérémy et son père qui lui proposent de se mettre à l’abri pendant une averse. « C’est inhabituel de voir quelqu’un habillé en uniforme 14/18, avec un âne », dit Jérémy qui habite près de Verdun. Sur leur parcours, le duo compte sur l’hospitalité des fermes et des centres équestres pour passer la nuit.
Samedi 10 août 2019, il était à Verdun et puis direction l’Alsace sur la piste des soldats du 88ème régiment d’infanterie auquel appartenaient les deux officiers disparus.
Ce n’est pas la première aventure de ce genre pour Marc et Lucky. L’année dernière, ils étaient déjà partis sur les routes à travers le pays pour arriver à Verdun et faire quelques repérages.
Après ses études à l'Ecole Centrale, Gérard Coutier est devenu professeur de mathématiques. Il l'est resté 19 ans. Ce ne sont pas les équations ou les axiomes (et encore moins les élèves) qui le lassèrent du métier, mais il se sentait un peu à l'étroit dans les cadres rigides de l'Education Nationale. Il décide donc de s'échapper du "mammouth" et avec sa femme Geneviève, de rechercher une centrale hydroélectrique pour devenir producteur d'électricité. Une profession que le public ignore en grande partie, croyant que seule EDF assure la fabrication de l'énergie électrique. Il existe pourtant en France environ 1500 centrales hydrauliques privées. En Limousin il y en a 80 environ. Parmi elles, la centrale du Theillet à Saint Martin Château que Geneviève et Gérard Coutier ont achetée en 1992. L'usine était en piteux état. Construite en 1968, passée entre les mains de deux propriétaires, elle ne fonctionnait plus lorsque le couple la reprend. Gérard qui n'a pas oublié ses leçons de Centrale reconçoit tout, achète une turbine d'occasion, la réinstalle, mobilise les compétences d'un maçon de Royère, d'un électricien et d'un chaudronnier de Limoges, bref reconstruit lacentrale qui depuis, marche sans problèmes et sans à-coups.
Une prise d'eau capte une partie du débit de la rivière 26 mètres au dessus de la centrale. L'eau suit une conduite forcée d'environ 600 mètres de long. C'est ce qu'on appelle une "moyenne chute" (en opposition aux "basses chutes" généralement installées directement sur la rivière, ou aux "hautes chutes" : il en existe une en Limousin, à Saint Augustin en Corrèze, qui fait plus de 80m de hauteur de chute). D'une puissance de 240 Kw l'usine hydroélectrique des Coutier est dans la moyenne des entreprises de ce genre. C'est l'une des trois centrales privées que compte la commune de St Martin. Pour respecter un débit minimum à la rivière sur laquelle elle est implantée (ce qu'on appelle le "débit réservé", pourcentage du débit moyen de la rivière, obligatoirement laissé pour permettre la vie piscicole) un système de régulation asservit la turbine, et l'été, la centrale est arrêtée dès que le débit réservé ne peut être assuré, ceci pendant environ un mois et demi.
Chez lui, dans la Drôme, où il réside le plus souvent, le couple a aussi une petite centrale, beaucoup plus modeste (10 à 11 Kw) pour assurer le chauffage de sa maison.
Aujourd'hui, comme la plupart des petits producteurs d'électricité, les Coutier sont inquiets. Depuis sa nationalisation en 1946, EDF avait en effet une obligation d'achat envers les producteurs privés, puisque c'est l'entreprise nationale qui disposait du monopole de la vente de l'électricité en France. Or la loi relative au statut d'EDF présentée au parlement en août 2004 lève cette obligation d'achat. Geneviève Coutier explique : "La loi ne prévoit pas le renouvellement de nos contrats, lesquels arrivent à échéance en 2012. L'abrogation de cette obligation d'achat, sous prétexte de Bruxelles, nous place dans une situation difficile : que vaudront nos entreprises, comment trouverons-nous des clients, et à quel prix ? Imaginons un éleveur, un artisan qui, ayant investi dans des équipements coûteux, se verraient, par une décision législative, privés de clients, sauf à des tarifs très bas…".
Par ailleurs, la loi d'orientation sur l'énergie changerait radicalement les seuils jusqu'alors pratiqués pour l'achat de l'électricité pour l'éolien. EDF était jusqu'à maintenant obligée d'acheter l'électricité aux unités ayant une puissance inférieure à 12 Mw. Désormais la loi ne maintiendrait l'obligation d'achat que pour les puissances supérieures à 20 Mw ! L'ancien plafond se retrouverait ainsi en dessous du nouveau plancher. Geneviève Coutier ironise : "Seules les grosses sociétés pourront bénéficier de l'obligation d'achat. C'est bien connu, les gros ont toujours intérêt à grignoter les petits…".
Au sein d'EAF (Electricité Autonome de France), le plus gros des syndicats de producteurs d'électricité qui regroupe 800 membres et dont font partie les Coutier, on ne décolère pas. L'article 33 de la loi sur EDF a été votée en plein mois d'août, au dernier moment, et sans aucune concertation avec la profession concernée. EAF et les deux autres syndicats nationaux se mobilisent donc pour tenter de faire réévaluer à la baisse le seuil de 20 Mw. Un seuil qui rendrait nul l'intérêt économique d'un projet comme celui des éoliennes de Peyrelevade d'une puissance annuelle de 9 Mw…
Facile aux yeux de Geneviève Coutier de deviner derrière ces mesures la pression du lobby nucléaire, "vous savez, l'énergie qui ne produit pas de CO2 ".
Pourtant, la France a souscrit à la Directive européenne sur les énergies renouvelables qui fait de celles-ci, en matière énergétique, la priorité (voir encadré page ci-contre). "Il y a un discours où l'on ne parle que de développement durable et d'énergies renouvelables et puis il y a la réalité qui est toute autre" tempête Geneviève Coutier qui conclut que pour l'Etat, les énergies renouvelables ne sont qu'un hochet pour amuser la galerie. "A titre d'exemple, poursuit-elle, j'ai traversé récemment l'Allemagne. Sur le trajet Bregenz, Nuremberg, Berlin, Francfort sur Oder, j'ai compté depuis l'autoroute 289 éoliennes d'une puissance approximative de 800 Kw… Alors ? Vérité au-delà du Rhin, erreur en deçà ?".
Nous avons aménagé en Creuse en Juillet 2000, dans la maison que nous avions achetée 4 ans plus tôt, dans un petit village sur la commune de Saint-Martin-Château.
L’entreprise DRIC (Dépannage et réalisations informatiques en Creuse) a été créée au mois d’octobre sous la forme d’une EURL.
Nous avons bénéficié, pour le lancement de ce projet, de plusieurs circonstances favorables :
Le fait d’être à 6 ans de la retraite, et de ne plus avoir d’enfants à charge limitait les risques de l’aventure.
L’entreprise dans laquelle j’étais salarié auparavant me garantissait des contrats représentant un chiffre d’affaire dégressif sur les 3 premières années, ce qui permettait de constituer peu à peu une clientèle.
J’avais une expérience dans la réalisation de programmes, mais aussi dans le fonctionnement des ordinateurs. Cela m’a permis de mener aussi bien un travail de création de logiciels pour des entreprises importantes mais éloignées, qu’un travail de dépannage et d’assistance informatique auprès de clients locaux.
Notre maison se trouvait au centre d’une vaste zone à cheval sur la Creuse et la Haute Vienne dépourvue d’entreprise concurrente. Un petit capital de départ nous évitait de recourir à un emprunt. L’aide de la région Limousin offerte aux immigrants qui créent une entreprise nous a permis de financer le déménagement.
L’aide à la création d’entreprise (ACCRE) nous a permis notamment de couvrir les honoraires du centre de gestion CG23 sur lequel nous nous sommes appuyés pour les formalités de création de l’entreprise.
Au nombre des aides reçues, il faut encore citer le stage de formation d’une semaine proposé par la chambre de commerce et d’industrie.
Nous aurions pu simplifier les formalités de démarrage en adoptant un statut d’entreprise personnelle. Mais nous avons estimé que les responsabilités qui résultent de la création de logiciels pour des entreprises pouvaient être lourdes, et qu’il valait mieux en protéger notre patrimoine familial.
Au fil des années, le nombre des clients locaux a augmenté. Nos opérations publicitaires ont été limitées : inscription dans les pages jaunes, et distribution de tracts à Peyrat le Château et à Bourganeuf. Mais c’est le «bouche à oreille» qui a été le principal vecteur d’arrivée de nouveaux clients.
Ce travail a été enrichissant pour moi, riche en contacts, idéal pour connaître le pays. Je pense qu’il a apporté à mes clients un service précieux. Car l’informatique réserve parfois des mauvaises surprises, et beaucoup ont apprécié de pouvoir être secourus sans aller chercher trop loin ni attendre trop longtemps. En revanche, on ne peut pas dire que ce soit un travail facile. Etre seul face à des problèmes complexes est parfois lourd. Et puis, l’autre question essentielle : peut on en vivre ? Sans doute, à condition de mieux faire payer à sa juste valeur le service rendu.
La question pouvait se poser de vendre ou transmettre l’entreprise.
Les circonstances nous ont amené à un autre choix. D’une part, j’ai été en contact avec un collègue de la région de Guéret qui était intéressé à venir jusqu’à Bourganeuf. D’autre part, il y avait depuis peu sur Peyrat un nouvel artisan qui souhaitait inclure l’informatique dans sa gamme d’activités, et sur Royère une association qui souhaitait travailler sur ce créneau. J’ai préféré favoriser l’essor de ces entreprises, plutôt que susciter l’implantation d’un nouveau qui aurait peut être créé un surnombre. J’ai donc tout simplement écrit à mes clients pour leur indiquer où ils pouvaient s’adresser désormais. Et la DRIC sera en principe dissoute dans les mois qui viennent.
Elle fait bien plus trembler les éleveurs que les moutons eux-mêmes. La tremblante est une vieille encéphalopathie avec laquelle on vit en parfaite compagnie depuis des lustres. Elle n’affecte que quelques moutons parmi quelques races. Mais dans les laboratoires on a trouvé là de quoi fouetter un chat. Bien entendu, que le ciel ne nous soit pas tombé sur la tête ne prouve pas que cela n’arrivera jamais. Et par conséquent, en application du principe de précaution mieux vaut tendre les filets. Aussi par crainte de voir la tremblante masquer l’encéphalopathie spongiforme bovine, on lui déclare la guerre. Une guerre préventive cela va sans dire.
Cette guerre, comme toute guerre a sa propagande. Elle pare les bons vieux sordides massacres d’animaux - sur lesquels devraient se fonder le bonheur de nos sociétés "modernes" - d’un aspect scientifique novateur et infaillible : la génétique ; voilà le mot magique. Pas la génétique de pépé avec ses beaux culs, ses grosses mamelles, la tête moirée, ses cravates et les pampilles. Mais celle du fiston avec son génome, et tout son charabia d’allèles, de polygènes et autres pléiotropes : la scientifique, quoi !
Voilà donc que surgissent dans nos campagnes des besogneux de l’éprouvette et autres agités de la calculette. Ils brandissent un décret émanant de politiques échaudés par les crises passées. Le mot d’ordre : éliminons les gènes sensibles pour ne garder que les résistants à la tremblante. La profession semble tétanisée. Vous comprenez : la vache folle, les médias, la traçabilité. Avant tout pas de bruit, pas d’ennuis avec le consommateur. Un cas est-il signalé à l’équarissage ou à l’abattoir, le troupeau est aussitôt génotypé et les animaux porteurs de gènes sensibles abattus.
Le plan d’éradication prévoit, en amont de l’éleveur : la sélection et la commercialisation des seuls béliers résistants de père et de mère. En aval, la fourniture à la consommation d’agneaux résistants au moins de père. De l’OGM rampant en quelque sorte. La biodiversité ? on n’en a cure. Est-on bien certain que les animaux dits résistants le sont effectivement ? Ne risquent-ils pas plutôt d’être des porteurs sains rendant, à terme, l’espèce ovine totalement désarmée face à telle ou telle agression pathogène ? On en est quasi certain. Il y a bien eu le cas d’un tel bélier au Japon, mais il est "de plus en plus inexpliqué" (en français dans le texte).
Le ministère débloque 13,3 millions de francs pour mener l’affaire sur cinq ans. Foin des qualités zootechniques jusqu’ici sélectionnées par les éleveurs. Ignorants ! Génotrucidons vous dis-je, c’est çà le top ! Reste aux éleveurs isolés, éprouvés, victimes d’abattage à discutailler des indemnités. Sur ce point là, l’Etat se révèle nettement moins spontané.
Mais l’addition ne s’arrête pas là. Au nom de la prophylaxie, un patrimoine génétique et certaines races de l’espèce ovine sont d’ores et déjà menacés d’extinction. Quand d’autres s’échinent à maintenir des zones cache-misère de biodiversité. Prophylaxie prétendue telle en effet, car tout récemment un bélier résistant ne vient-il pas de contracter l’ESB concrétisant les craintes suscitées ? Quand la machine est lancée, il est difficile de l’arrêter.
Et tout çà pour une maladie non transmissible à l’homme. Une maladie qui touche un animal sur 2 000 et dont les éleveurs se sont toujours parfaitement accommodés. Et sur la base d’une hypothèse fausse fondée sur le principe d’un déterminisme antique, contredit par la réalité des faits.
On est à l’amorce d’une filière d’exclusivité. Autant dire un tuyau dont un bout vient gicler de la bouffe normalisée, aseptisée dans l’entonnoir vissé sur la tête du citoyen publiconditionné en consommateur. Il exige, nous dit-on, de l’agneau génétiquement garanti. L’exigence remonte le tuyau jusqu’à l’éleveur. Il est prié par ses "responsables professionnels" de s’aligner bon gré au nom du progrès, mal gré sous peine d’être disqualifié comme fauteur potentiel de tremblante. En conséquence de quoi, son approvisionnement dépend de l’UPRA (Union pour la promotion des races) habilitée à fournir ou estampiller les béliers exigés, dûment génotypés contre rétribution évidemment.
La paysannerie est une fois de plus dépossédée de la gestion du vivant. Une fois de plus elle devient tributaire de la marchandisation de la semence animale ; après l’être devenue largement de la semence végétale comme, plus généralement, de tout substitut aux facteurs naturels de production jugés pas intéressants puisque renouvelables et gratuits. Quand à la rétribution, elle rejoint les laboratoires et les détenteurs d’exclusivité sur les béliers. L’INRA (Institut national de recherche agronomique) a beaucoup investi dans l’affaire par l’intermédiaire de LABOGENA, un groupement d’intérêt économique qu’il gère avec des groupes privés spécialisés dans la biotechnologie . A ce niveau on découvre que la pompe ne fait pas que refouler la bouffe dans le tuyau ; elle est aussi aspirante. C’est une pompe à fric, actionnée par des intérêts qui ne sont pas que philantropiques. On découvre aussi que la préoccupation sanitaire de la prophylaxie n’est pas essentielle. Ce qui importe, par contre, est que celle-ci serve de modèle à d’autres prophylaxies ciblant toute maladie parasitaire ou infectieuse, élargissant ainsi le champ de l’exclusivité et du gain financier. Et qu’importe le chaos biologique qui en résulte.
Cet épisode d’une prise de suprématie de la biotechnologie financière sur tout projet social n’est pas sans nous éclairer sur les choix qui doivent guider une nécessaire réorientation de la politique agricole planétaire. Soit la vanne alimentaire sera tenue par les rabatteurs de dividendes ; la société devra alors payer au prix fort les conditions de sa survie. Soit cette société passera contrat avec une paysannerie redevenue nombreuse et soucieuse de restaurer la fertilité de sols menacés par la désertification ou l’artificialisation outrancière de la production de nourriture. Cette seconde alternative ne semble-t-elle pas la condition nécessaire à l’exercice futur des libertés humaines ?
Vous souvenez-vous de l’expérience menée de 2011 à 2014 à Saint-Martin-Château, Gentioux (à la ferme de Lachaud) et à La Villedieu – et en moult autres endroits – du collège associatif ?
Une expérience qui avait suscité quelques débats dans nos colonnes entre ceux qui regrettaient que l’école publique ne soit pas le lieu légitime de l’éducation de tous et ceux qui, partant du constat d’une Éducation nationale bien peu émancipatrice, plébiscitaient cette expérimentation alternative (Cf IPNS n°36, 37 et 40). Six ans après la fin de l’aventure, une partie de ses promoteurs reviennent dans un livre sur ces trois années où ils ont tenté de « faire l’école » en espérant d’une certaine manière que leur démarche puisse aussi « faire école » comme le suggère le double sens du titre de l’ouvrage. Racontée par le menu (280 pages !) et à travers de nombreux témoignages (de parents, d’ « enseignants », de « jeunes »), l’histoire du « collège asso », entièrement bénévole et forcément hors contrat, se présente comme « une invitation à réinventer notre propre expérience de l’école ».
Le collège associatif a été conçu comme une alternative au système classique d’enseignement, qu’il soit public ou privé. Il a permis à des jeunes pour qui le système classique ne convenait pas de trouver d’autres formes d’enseignements et d’accès aux connaissances, basées sur les pédagogies actives. Outre les matières les plus classiques comme les mathématiques, la littérature ou les langues, bien des domaines ont été explorés : artistiques, créatifs, manuels autant qu’intellectuels, apprentissage de la vie de groupe, découverte du monde, réalisation de grands projets individuels ou collectifs. Celles et ceux qui ont côtoyé l’expérience pourront revivre les questions et les réponses qui se sont multipliées au cours de ces trois courtes mais denses années ; les autres découvriront (entre autres) toute la complexité d’enseigner autrement dans un monde éducatif qui fait le maximum pour l’empêcher.
À cet égard les pages sur les relations entre le collège asso et les inspecteurs de l’Éducation nationale ne manquent pas de piquant, en particulier celles qui racontent la visite de la directrice d’académie avec son chauffeur et pas moins de quatre inspecteurs... pour huit élèves ! Comme quoi le mammouth peut être effrayé par un moucheron...
Pour comprendre l’histoire des Limousins de la maçonnerie de Lyon au cours de la première moitié du 20e siècle, il faut d’abord se pencher sur le moment de rupture que constitua pour eux la fin du 19e siècle. Cette période constitua le moment d’apogée des migrations temporaires venant du plateau de Millevaches pour alimenter la corporation des maçons de Lyon, mais aussi le signal de leur déclin. A partir des années 1880, plusieurs facteurs se conjuguèrent (crise économique majeure et début de la seconde industrialisation, connexion du plateau au réseau de chemin de fer…) pour favoriser les départs définitifs qui s’amplifièrent dans les décennies suivantes.
Ces départs définitifs, de même que les transformations urbaines de la seconde moitié du 19e siècle, permirent à cette population, qui vivait jusqu’alors complètement repliée sur elle-même, de s’insérer peu à peu dans l’espace urbain et de se fondre dans le monde ouvrier pour la plupart, ou de connaître une promotion sociale pour une minorité. Les transformations industrielles qui touchèrent le bâtiment pendant cette période permirent aussi aux maçons de prendre une place plus importante au sein de cette industrie, au point de devenir la corporation centrale du bâtiment de Lyon au tournant du 19e et du 20e siècle.
La fin du 19e siècle vit aussi naître le phénomène syndical. Le syndicat des maçons fut créé en 1877 mais resta relativement marginal jusqu’au début du 20e siècle. Il fallut attendre la grande grève de 1910, qui dura quatre mois, pour que le syndicat prenne une place centrale dans la corporation. Lors de cette grève, une nouvelle génération d’ouvriers nés dans les années 1880, apparut sur le devant de la scène. Cette grève fut notamment dirigée par un maçon de 25 ans, Antoine Charial, originaire de Gourdon-Murat, qui s’imposa par son sens de l’organisation et sa capacité à mener cette grève qui fut une victoire pour les ouvriers. Antoine Charial devint secrétaire du syndicat des maçons de 1910 à 1913 puis secrétaire de l’Union Départementale CGT du Rhône jusqu’au déclenchement de la guerre.
A l’issue de la grève de 1910, l’organisation dirigée par Charial imposa le syndicalisme obligatoire sur les chantiers lyonnais de la maçonnerie. Pour faire respecter la «discipline syndicale», le syndicat imposa, par le rapport de force avec les patrons, des délégués de chantier chargés de vérifier régulièrement que les ouvriers avaient leur carte de la CGT en règle. Le syndicat devint ainsi le centre de gravité de la corporation pour les ouvriers et comptait, en 1914, 3000 adhérents sur environ 4800 ouvriers.
La 1ère Guerre mondiale eut un fort impact sur la corporation des maçons. Le bâtiment fut le secteur industriel le plus marqué par les saignées de la guerre. Les pertes furent massives dans les villages du plateau de Millevaches. Aussi, il manquait de nombreux bras sur les chantiers au moment de l’armistice et l’on se mit à pratiquer un recrutement massif d’ouvriers étrangers. Les Italiens notamment devinrent de plus en plus nombreux sur les chantiers pendant que la population limousine ne cessait de se réduire. La 1ère Guerre mondiale marqua donc le point de départ d’un lent déclin de la filière migratoire limousine au profit des filières venant de l’étranger.
Les maçons de Lyon furent touchés par le conflit mondial d’une autre manière, toute aussi traumatique, à travers un événement qui se déroula au début de la guerre : le 19 avril 1915, à Flirey, commune de Meurthe-et-Moselle, la 5e compagnie du 63e Régiment d’Infanterie de Limoges fut désigné pour participer à un assaut. Les hommes, exténués par les attaques successives des jours précédents, refusèrent d’obéir à cet ordre. Pour les punir, quatre d’entre eux furent fusillés : le caporal Antoine Morange, né à Champagnac (Haute-Vienne), le soldat Félix Baudy, né à Royère-de-Vassivière (Creuse), le soldat Henri-Jean Prébost, né à Saint-Martin-Château (Creuse), le soldat François Fontanaud, né à Montbron (Charente). Les trois premiers étaient connus pour leur action syndicale avant guerre et auraient, semble-t-il, été désignés pour cette raison. Ils étaient tous trois installés à Lyon ou Villeurbanne avant leur mobilisation et Baudy appartenait au syndicat des maçons de Lyon. Après guerre, ce syndicat mena une campagne active pour la réhabilitation de son ancien adhérent et, en 1925, il organisa un rassemblement autour de sa tombe, à Royère-de-Vassivière, où il fit apposer une plaque commémorative sur laquelle il était écrit : «Maudite soit la guerre. Maudits soient ses bourreaux. Baudy n’est pas un lâche mais un martyr». Ce n’est qu’en 1934 que les quatre hommes furent réhabilités. La plaque est, encore aujourd’hui, sur la tombe de Félix Baudy (sur cette affaire, voir le dernier article du journal).
Pendant l’entre-deux-guerres, les constructions de HBM (Habitations bon marché), le développement des grandes usines, la croissance des banlieues et de l’habitat pavillonnaire, d’importants travaux publics permirent au BTP d’avoir une activité relativement soutenue mais qui connut un rythme très irrégulier et une chute importante après 1932-33. Cette époque fut marquée par un début d’industrialisation du bâtiment. La construction en pierre disparut presque complètement et fut remplacée par le pisé de mâchefer ou le béton armé. Les constructions monolithiques à l’aide de coffrage de bois s’imposaient sur les chantiers en même temps que se développait l’utilisation d’engins de chantiers : bétonnières, wagonnets Decauville sur rail pour le transport des matériaux, grues élévatrices, etc.
Ce phénomène d’industrialisation favorisa une certaine concentration du secteur et l’émergence de quelques entreprises de taille importante, capables de mener de très grands chantiers. La plus importante, Pitance, avait été créée, à la fin du 19e siècle, par un migrant limousin originaire du Chalard, en Haute-Vienne.
A côté des entreprises privées, un autre acteur important de l’industrie du BTP de Lyon apparut en 1919. Il avait un caractère atypique puisqu’il s’agissait d’une coopérative ouvrière de production, l’Avenir, qui fut créée et dirigée par Antoine Charial, l’ancien responsable du syndicat des maçons de Lyon. La création de l’Avenir fut étroitement liée à l’action du maire de Lyon, Edouard Herriot, qui avança la moitié des fonds de départ (200 000 F) et dont Charial devint un étroit collaborateur à partir de 1920, date à laquelle il fut élu conseiller municipal SFIO et devint adjoint de Herriot pour le 3e arrondissement.
L’Avenir devint rapidement un acteur majeur du BTP à Lyon. Elle participa à de nombreuses grandes réalisations de l’entre-deux guerres : construction de la faculté de médecine et de pharmacie (1928-29), de l’Hôtel-de-Ville de Villeurbanne, et d’une partie du quartier des Gratte-Ciel (1931-34), du quartier des Etats-Unis (1931- 34), de l’Hôtel des Postes de Lyon (1935-38). Cela lui permit de réaliser un certain nombre d’institutions sociales au profit des coopérateurs et des ouvriers de l’entreprise : acquisition, en 1920, d’une propriété servant de maison de retraite et de maison des jeunes ; création, en 1923, d’une caisse de retraite, etc. L’Avenir était un véritable rassemblement de Limousins. Les fondateurs étaient presque tous originaires du plateau de Millevaches, de même que la plupart des ouvriers qui devinrent coopérateurs pendant l’entre-deux-guerres. L’Avenir devint une sorte de niche pour les Limousins, au sein d’une corporation où ils étaient de moins en moins nombreux.
L’entre-deux-guerres constitua un moment d’intense activité syndicale dans le bâtiment lyonnais. Dès la fin du conflit mondial, le syndicat des maçons se restructura et compta rapidement 4000 adhérents. Après 1920, il conserva cet effectif et constitua, à ce titre, une véritable anomalie dans le paysage syndical local et national car, après le grand mouvement de grèves de 1920, qui toucha l’ensemble de la France, les mobilisations ouvrières s’écroulèrent et les syndicats se vidèrent de leurs adhérents dans toutes les branches industrielles.
Le syndicat des maçons fut confronté aux conflits entre les différents courants syndicaux (CGT confédérée proche de la SFIO, CGT unitaire liée au PCF, CGT syndicaliste révolutionnaire proche des anarchistes) qui s’affirmèrent après 1918 et qui menacèrent son unité. Pour éviter les risques de division et rester fidèle à la Charte d’Amiens – qui revendiquait l’indépendance des syndicats par rapport aux groupes et partis politiques – le syndicat décida, en 1924, d’entrer dans l’autonomie et la plupart des syndicats du bâtiment de Lyon le rejoignirent dans ce choix. Ils créèrent ensemble le Cartel autonome du bâtiment de Lyon dont le moteur fut incontestablement le syndicat des maçons du fait de sa structure organisationnelle très puissante qui s’appuyait sur plusieurs piliers.
Le premier pilier était son journal. Depuis 1911, le syndicat publiait L’ouvrier maçon qui paraissait tous les 15 jours. En 1927, il acheta une imprimerie et, grâce à cette autonomie, donna de l’ampleur à son journal qui prit le titre de L’Effort et s’adressait à l’ensemble des ouvriers du bâtiment de Lyon. L’Effort paraissait toutes les semaines et était tiré à 10 000 exemplaires. C’était un journal de grande qualité, qui ne s’intéressait pas seulement aux questions professionnelles mais aussi aux nouvelles tendances de l’architecture, aux questions sociales et politiques, à la littérature.
Le deuxième pilier sur lequel s’appuyait le syndicat était constitué par les “roulantes”. Le principe du syndicalisme obligatoire, mis en place avant la 1ère Guerre mondiale, fut rétabli dès 1919 et les moyens de son contrôle renforcés grâce à la mise en place de roulantes qui étaient des groupes de militants chargés, contre rémunération, de faire, en vélo, le tour des chantiers pour contrôler les cartes syndicales des ouvriers. Ces roulantes comptaient le plus souvent deux ou trois personnes mais pouvaient réunir, quelques fois, quelques dizaines de militants pour contrôler de manière systématique un gros chantier. Elles se mettaient aux portes du chantier à l’arrivée ou au départ des ouvriers et demandaient les cartes aux ouvriers. Si un ouvrier n’avait pas de carte, il était sommé d’aller au syndicat ou de s’adresser au délégué de chantier pour obtenir la carte et les timbres afin d’être en règle. S’il ne le faisait pas, s’il était “récalcitrant”, il risquait d’être malmené physiquement. Les roulantes se généralisèrent dans l’ensemble des corporations du bâtiment pendant l’entre-deux-guerres et assurèrent une discipline syndicale presque sans faille.
Du fait de ce contrôle très serré de la corporation, un ouvrier pouvait difficilement travailler, sauf sur de très petits chantiers, s’il n’avait pas sa carte ou s’il se la voyait retirer. Cela arrivait notamment, après les grèves, pour punir les ouvriers non grévistes, ceux qui étaient appelés les “renards”. Privés de leur carte, ces ouvriers étaient d’une certaine manière exclus de la corporation et prenaient de gros risques s’ils essayaient de se faire embaucher sur la place de Lyon. Le syndicat, pour éviter de laisser trop d’ouvriers hors du syndicat, ce qui constituait un risque en cas de nouveau conflit, pratiquait régulièrement “l’amnistie” et réintégrait certains ouvriers, contre paiement d’arriérés de cotisation. Toute une “justice” syndicale, difficile à décrire dans le cadre de cet article, fonctionnait ainsi, au sein de la corporation afin de la réguler.
Grâce à sa force et à son organisation, le syndicat des maçons mena des mouvements revendicatifs d’ampleur, extrêmement structurés et encadrés, comme ce fut le cas lors de la grève de 1920 ou lors du lock-out du bâtiment de 1930 qui dura trois mois et à l’issue duquel les maçons obtinrent 75 centimes et les cimentiers un franc d’augmentation. Ces mouvements conduisirent à une hausse conséquente des salaires lyonnais qui furent, entre le milieu des années 20 et le milieu des années 30, supérieurs à ceux des maçons parisiens qui n’avaient pas su garder une organisation syndicale dynamique. A l’inverse, l’organisation syndicale patronale de la maçonnerie ne connaissait pas la même vigueur, du moins jusqu’en 1936. Peu d’entrepreneurs étaient syndiqués et une ligne de fracture existait entre les quelques grandes et la multitude des petites entreprises. De plus, l’existence de l’Avenir constituait une faille dans l’organisation patronale puisque la coopérative acceptait automatiquement toutes les revendications du syndicat des maçons.
Les choses changèrent à partir du moment où la crise s’installa de manière durable à partir de 1933, et jeta de nombreux ouvriers sur le pavé. Le syndicat eut de plus en plus de mal à faire respecter les tarifs et la durée du travail et connut des conflits internes. Le Parti Communiste prit alors les rênes du Syndicat des maçons et du Cartel du bâtiment. Il donna un caractère plus politique aux mobilisations ouvrières et les patrons montrèrent, de ce fait, de plus en plus de résistance face à l’action des syndicats. A partir de 1934, on assista à une longue montée en puissance des conflits entre patrons et ouvriers, et des violences qui les accompagnèrent. On a gardé de juin 1936 et, plus largement du Front Populaire, une image de grande solidarité populaire. Cette image renferme une part de vérité, mais elle dissimule aussi l’ensemble des conflits très âpres de cette période marquée par une crise économique persistante, des tensions internationales régulières, une montée lente de la xénophobie dans tous les milieux, et des luttes sociales extrêmement violentes. Dans la maçonnerie lyonnaise, patrons et ouvriers n’étaient plus en état de négocier à partir de cette date. Ils le montrèrent aussi bien lors du conflit de juin 36 que lors de celui de 1938 qui marqua, cette fois, l’échec des mobilisations ouvrières et le recul du syndicat des maçons, épuisé par la guerre menée pendant plusieurs années.
A cette date, la filière migratoire limousine s’était fortement affaiblie. Les hommes originaires du limousin ne représentaient plus que 1,6% de l’électorat de Lyon en 1936. Le lieu où leur concentration était la plus importante était toujours le quartier de la Guillotière mais ils s’étaient largement disséminés dans les communes de banlieue, notamment à Villeurbanne.
Les natifs du Limousin représentaient un tiers des maçons français de Lyon. Mais cette corporation comptait alors au moins 50% d’étrangers. Les limousins ne représentaient donc plus que 15% des maçons de Lyon et n’étaient plus en mesure de structurer cette corporation comme ils le faisaient encore à l’issue de la 1ère Guerre mondiale. Parmi l’ensemble des facteurs expliquant la déstructuration de la corporation et la montée des conflits, c’est un élément qu’il faut prendre en compte. La diaspora limousine avait toujours montré sa très grande cohésion. La forme du syndicalisme prise par la maçonnerie lyonnaise fut fortement marquée par la manière de se comporter de cette population limousine qui s’était toujours montrée très unanimiste et développait des pratiques d’auto-contrôle très grandes.
Les bien connues, parce que les plus originales “planches“ dont le tablier est constitué de grandes dalles de granit, et les piles comme les culées, de pierres sèches assez grossièrement appareillées. Le terme de “planches“ ne doit pas surprendre, car dans le parler ancien une planche n’était pas forcément de bois comme aujourd’hui une poutre peut être métallique ou en béton armé. Selon la largeur du cours d’eau et la taille des dalles, on a une à quatre travées. L’étroitesse de l’ouvrage et le poli de la pierre ne permettent pas aux troupeaux, ni aux charrois d’utiliser ces ponts qui étaient donc toujours doublés par un gué aisément repérable encore de nos jours. La faible hauteur du tablier par rapport à l’étiage pose problème en période de crue. De ce fait il n’était pas rare qu’une ou plusieurs planches soient emportées et nécessitent des travaux. On rebâtissait le pont de manière semblable, mais pas forcément à l’identique et cela de siècle en siècle. Le dernier chantier de cette sorte a été effectué pour ce qui concerne la commune de Saint-Martin-Château, sur les planches de Pont en 1953.
Ce 2éme type est plus proche de l’image traditionnelle du pont tel que chacun se le représente : le pont à une ou plusieurs arches en pierres soigneusement appareillées. Pour ce qui concerne nos petits ponts cet agencement est plutôt rare du fait de la facilité qu’offre les massifs de granit partout affleurant et qui permet de débiter en grandes dalles, nos “planches “. Les ponts à arches existent encore sur la partie amont de la Maulde, en sortie de la retenue de Vassivière, au Chataignoux et Fafreix. Ce dernier est remarquable par son importance et le fait que ses trois arches ne suivent pas le même dessin. Cette particularité est peut-être dû à une ou des reconstructions partielles. Là encore la datation en est difficile. Comme pour les autres types, il n’y avait pas de parapet et comme pour le type mixte la chaussée était recouverte de terre pour le passage des animaux. Sur de vieilles cartes postales on voit un vieux pont de Saint-Martin-Château. Il s’agit de la passerelle la plus connue, celle des Jarrauds qui jouxte le moulin éponyme et qui en permettait l’accès direct à partir du bourg. Le terme de passerelle a été souvent employé dans des écrits officiels, comme les délibérations du conseil municipal, et souvent pour des planches comme Verrières ou Pont.
Les ponts de construction mixte, ouvrages plus importants et certainement plus récents. Peut-être remontent-ils au XVIIIe siècle, mais la majorité est du XIXe. Deux culées et une pile centrale en belles pierres de taille, assemblées à joints vifs confèrent beaucoup d’allure à ces ouvrages et ce d’autant plus que la pile est souvent pourvue d’un avant-bec face au courant. Il peut être de plan triangulaire ou arrondi et même décoré d’un quart de sphère en granit, du plus bel effet comme à Villegouleix. Le tablier de ces ponts du “3ème type“ repose sur de grosses poutres parallèles (de 2 à 4 chaque) joignant une culée à la pile centrale, puis cette pile à la culée de l’autre rive. Sur ces ponts, on disposait transversalement bastaings ou rondins, recouverts au final de motte de terre, pour éviter au bétail de glisser.
La conséquence de cet agencement est que le tablier avait tendance à pourrir rapidement si on n’y prenait pas garde et aujourd’hui, en dehors de réhabilitation comme à Villegouleix, ces ponts sont souvent malheureusement ruinés comme le pont dit “Paslin“ du nom d’un ancien propriétaire.
Tout peut arriver, même la création d'un parc naturel régional sur le plateau de Millevaches ! Après des années de surplace, de laborieuses querelles politiques et des tonnes de réunions, il se pourrait bien que nous approchions du but. Début janvier les gros morceaux d'une charte encore incomplète arrivaient dans les mairies. Six mois plus tard l'ultime version de la charte était rendue publique et envoyée à toutes les collectivités locales (sur cette charte lire ci-contre : "s'approprier un territoire'). Les communes, les communautés de commune et les départements étaient appelés à délibérer et à se positionner vis à vis du projet. Elles avaient un peu plus de quatre mois pour cela, le 20 octobre 2003 ayant été fixé comme date butoir des délibérations. Au-delà, les collectivités qui n'auraient pas pris de position seraient réputées avoir rendu un avis défavorable.
Les communes étaient donc appelées à approuver la charte, à adhérer au futur parc et à désigner leurs représentants dans l'organisme de gestion (le syndicat mixte de Millevaches qui se transformera en syndicat de gestion du parc dès que celui-ci sera effectivement créé). Les résultats sont globalement favorables au projet, puisque sur les 121 communes concernées, seulement huit n'y adhèreront pas. Il s'agit en Corrèze de Feyt (canton d'Eygurande), et en Creuse - où dans la partie nord-ouest du territoire se situent toutes les communes récalcitrantes - de Pontarion, Vidaillat, St Pierre Bellevue, St Moreil, St Junien la Brégère, Faux Mazuras et St Martin Château : les "7 ringards" que notre dessinateur épingle à la une de ce numéro d'IPNS. Pour la plupart d'entre elles les arguments opposés au projet de parc reprennent les vieux refrains rabâchés sans esprit critique depuis des lustres : "on ne pourra plus chasser", "on ne sera plus maître chez soi", "ça va coûter cher", "une structure de plus", etc.
Le parc se fera donc avec 113 communes. Heureusement, se félicite-t-on au Conseil Régional aucune défection ne provoque une enclave à l'intérieur du futur parc. Tout juste au rat- on un peu de dentelle du côté des cantons de Royère et Bourganeuf.
La défection de sept communes de Creuse renforce la prééminence de la Corrèze représentée par 63 communes sur les 113. On entend déjà, ça et là, quelques creusais qui s'en inquiètent. Mais il faudra faire avec, car les délibérations qu'ont prises les communes ne peuvent pas être remises en cause dans un an ou deux (à l'occasion d'un changement d'équipe municipale par exemple). En effet, le parc n'est pas une auberge espagnole dans laquelle on rentre ou dont on sort comme on. veut. Les décisions qui ont été prises aujourd'hui engagent l'avenir de chacune des communes sur une durée de dix ans, et c'est bien ce délai que devra attendre une commune qui déciderait de rejoindre un jour le parc.
C'est pourquoi l'option prise par St Martin Château, membre du syndicat de Vassivière et la moins périphérique des communes opposées au parc en a étonné plus d'un. Comment une commune si liée à Vassivière et aux dynamiques touristiques, environnementales ou économiques portées par le parc a-t-elle pu s'en exclure ?
Le 31 octobre 2003 le Conseil Régional a, à son tour délibéré favorablement sur le parc. Du coup, la procédure de validation du parc est désormais enclenchée. Le président du Conseil régional a transmis au Préfet de Région l'ensemble des délibérations favorables. Celui-ci fera suivre auprès du Ministère de l'écologie et du développement durable. La demande de classement en parc sera alors soumise à trois avis : celui du bureau de la fédération des PNR ; celui de la commission PNR du Centre national de la protection de la nature ; celui, enfin, du Ministère de l'écologie. Ceux-ci ont trois mois pour rendre leurs avis qui seront donc théoriquement connus avant fin janvier.
Ensuite, on attendra le décret du Premier Ministre qui instituera, enfin, le parc naturel régional du Millevaches. Peut-être y aura-t-il encore quelques retards car, comme chacun sait on sera alors en période électorale (les élections régionales et cantonales auront lieu les 21 et 28 mars). Ce ne serait pas la première fois... Mais si ça pouvait être la dernière!
Un récit en plusieurs point de vue : une retranscription à l’état brut du témoignage de Nicolas à son retour de la ZAD. Choqué, il ne dort plus et demande à des copains d’écrire son récit pour déposer un peu de sa colère. Inter-coupé du récit d’un témoin de l’arrestation et pour finir par un récit plus factuel de son procès et des suites des condamnations qu’il subit encore.
Témoignage de Nicolas (mai 2018) « L'annonce, le lundi 9 avril, du débarquement des 2500 gendarmes avec leurs blindés et les destructions de cette semaine là m'ont hyper-concerné. Ça m'a paru aberrant, je n'ai pas compris cette volonté de tout raser. Je veux dire que ça a été une décision personnelle : j'étais outré par ce qu'il se passait là bas, je me suis dit qu'il fallait y aller, comme si c'était un impératif. C'est la première fois que j'envisageais d'aller à la Zad de Notre-Dame des Landes. Je suis arrivé à Vigneux à 3 heures du matin. A 11h, vers la Wardine, au fond d'un champ, il y a des affrontements à la barricade des Lascars que les gendarmes veulent démonter. Vers l'heure du repas, j’ai été à Bellevue pour écouter les prises de paroles.Vers 15h30, je fais un passage par mon camion, à Vigneux, pour aller livrer une récup' de légumes.Retour à la Wardine, 16h30, il y avait plus de 2000 personnes dans le champ. Regroupement au carrefour de la Saulce : on essaye d'encercler les gendarmes, il y a eu quelques répliques de lacrymogènes et de grenades de désencerclement mais ils sont restés à distance. La tension monte. Il y a des tirs de lacrymos très près sur les gens et très loin sur l'arrière. Y'a tellement de gaz, on ne voit plus rien. Un assaut des gendarmes mobiles. Ça pète dans tous les sens. Au moment de la charge, ça a créé un mouvement de foule, les gens paniquent, on est des centaines à vouloir franchir le même talus, seul passage pas très large vers un autre champ. Une grenade assourdissante explose à un mètre de moi. Je suis en bord de champ, le long de la haie. Je me dis que je n'aurai pas le temps d'arriver vers cette sortie et je choisis de passer au pied de la barricade. J'arrive sur la route et je vois surgir à 15 mètres un blindé qui fonce, avec une lame devant. J'essaie de repartir par là où je suis arrivé mais je vois par là à ce moment des gendarmes mobiles. Le blindé est à ma hauteur, je suis seul, je me précipite vers le talus, glisse en tentant de le grimper, je tombe à terre et je reçois un premier coup à l'épaule gauche et plusieurs autres coups. Ils sont cinq gendarmes mobiles. Je me relève, c'est un peu la confusion, ils me disent "dégage". J'ai les bras levés en signe d'approbation et de défense. Finalement, ils me rechoppent, me mettent à terre puis me frappent à la tête avec la pointe de leurs tonfas, me mettent des coups de pieds. Pendant qu'ils me tabassent, ils me disent: "tu vas pouvoir dire à tes copains ce qu'on leur fait aux zadistes !"
"Le jour du rassemblement j’étais face aux gendarmes mobiles (GM) dans un champ près de Lascars quand ils ont attaqué. (...) Pendant 2h ils ont bombardé en continu. La résistance a été conséquente. La barricade des lascars, ce jour là, a piégé des camarades qui tentaient d’échapper à la charge des gendarmes. Moi et mon collègue étions sur les côtés en hauteur et avons tout mis en œuvre pour les dégager de là. Chaque regard que je croisais était terrorisé. On les a presque tous sortis. Je déblayais encore lorsque le dernier camarade est arrivé et est tombé au sol devant nous, derrière la barricade. J’ai hurlé « lève-toi vite, viens ! ». Au même moment, je lève les yeux et je vois le regard haineux de 3 GM qui arrivent en furie, matraque déjà en l’air, prêts à le défoncer, lui qui était déjà au sol en position de faiblesse. La demi-seconde avant le premier coup de matraque, j’ai croisé son regard terrifié qui me glace encore le sang aujourd’hui. On a dû le laisser là, impuissants. Le flashball ne m’a pas lâché du viseur tandis que le copain derrière la barricade s’est fait matraquer par 5 GM pendant bien 2 minutes. »
Ils me relèvent, m'arrachent mon sac et le jettent sur le talus. Ils me fouillent, me menottent. J'ai la boue plein la figure, je saigne du nez. À un carrefour, des journalistes, dont un de l'AFP qui me regarde, le GM(gendarme mobile) qui me garde reçoit l’ordre de me faire une clef de bras.A la 2e fouille, un GM qui a l'air d'être médecin enjoint mon escorte de m'emmener à l'hôpital. A la vue de ma tête, ensanglantée, y' a des GM satisfaits qui disent "Tiens, on en a tabassé un, il a pris cher". A la 3ème ou 4ème fouille, je suis debout, un GM fait délibérément et ostensiblement tomber mon couteau à mes pieds et attend. Si j’y touche, ils me chargent. Je ne bouge pas. On me signale la garde à vue. Dans le fourgon, on sort de la Zad. Un GM a une grenade dégoupillée à la main, il joue et dit à son collègue "regarde, il va chialer". Nouveau fourgon de GM. Pendant les transferts, je ne vois pas grand-chose, ils me font toujours baisser la tête. Ils me cherchent, m’insultent, me poussent, ils cherchent ma « rébellion ».A l'hôpital : Le médecin qui m'ausculte me dit "ils vous ont bien arrangé". L’examen clinique révèle une série d’ecchymoses, d’érythèmes et conclu à 1 jour d’ITT. A la caserne: Première audition. Il doit être vers 23 heures. L'avocat commis d’office, arrivé, me dit "ils ont fait une bavure, ils ont déconné". 48 h de garde à vue, auditions et humiliations en série jusqu’à la comparution immédiate.
18 Avril 2018 : Comparution immédiate au tribunal de grande Instance de Saint Nazaire. Nico est condamné à un emprisonnement délictuel de 18 mois avec sursis mise à l’épreuve et obligation d’indemniser les victimes pour : violence aggravée par 3 circonstances suivie d’incapacité n’excédant pas 8 jours, (sur 4 gendarmes), violence sur une personne dépositaire de l’autorité publique sans incapacité (pour 1 gendarme), port sans motif légitime d’arme blanche ou incapacitante de catégorie D,(un opinel).Marianne L. et Laura B. ont également été condamnées à des peines similaires. Benoît L. a refusé la comparution immédiate et a été relaxé lors de son procès. Total frais d’avocats commis d’office = 2 323 €20 avril 2018 : Nicolas fait appel conjointement avec Marianne L. et Laura B. 9 octobre 2018 : Cour d’appel de Rennes : l’avocat des gendarmes demande un report pour permettre d’intégrer Benoît L. (relaxé) dans l’appel. 8 janvier 2019 : Cour d’appel de Rennes : le juge confirme la peine prononcée lors de la comparution immédiate mais réduit de 18 à 6 mois l’emprisonnement délictuel avec sursis ainsi que l’obligation d’indemniser les victimes.Total frais d’avocat pour l’appel : 1 113 € 25 juin 2019 : Procès – intérêts civils : Condamnation solidaire de Nicolas, Marianne L. et Laura B. à verser : 1500 € par gendarme en réparation pour préjudice moral pour 4 des 5 gendarmes ayant subi des violences ayant entraîné des ITT et 1 000 € pour le 5ème gendarme. Total des frais d’avocats pour « Intérêts civils » : 1 113 €Total des indemnités à verser aux gendarmes : 7 000 € Ni l’avocat de Nicolas, ni l’état, ni personne ne communique la procédure pour payer ses indemnités. De Janvier 20219 à Février 2022, Nicolas se présente devant un contrôleur judiciaire tous les trois mois. Mars 2022 : Nicolas reçoit un courrier du Fonds de Garantie des Victimes des actes de terrorisme et autres infractions lui demandant le règlement de sa dette et des intérêts supplémentaires. Un accord de remboursement à hauteur de 50 € par mois est négocié à partir 10 juillet 2022. 23 mars 2023 : Courrier d’un huissier de justice présentant la signification de décision jugements sur intérêts civils du 12 novembre 201903 avril 2023 : Courrier d’un huissier de justice informant la saisie de 11 379,13 euros. Total des intérêts 4 879,13 € Grand total d’une journée en soutien à la mobilisation de la ZAD : 16 428,13 €Total payé à ce jour par Nicolas : 5 176 €
Chaque mois qui passe alourdi sa dette puisque les intérêts augmentent. Aucune nouvelle ni de Laura ni de Marianne. Nicolas a besoin de votre aide pour solder cette dette solidaire, car aujourd’hui il est seul à faire face. Il n’était pas seul à manifester ni à être arrêté, ne le laissons pas seul aujourd’hui.
Comme chaque 11 novembre depuis 1990 (à la veille de la première guerre du Golfe), à l’initiative du Comité laïque des Amis du Monument aux morts de Gentioux, il fut organisé un rassemblement devant ce fameux monument (plus ou moins unique en France) dont le petit écolier, le poing dressé, nous rappelle sans aucune ambiguïté que « Maudite soit la guerre ». Ce fut, encore une fois, l’occasion pour quelques centaines de pacifistes de tous horizons, Libre Pensée, Mouvement de la Paix, Fédération Anarchiste... de se retrouver et d’affirmer par différents discours leur dégoût de ces boucheries orchestrées par un ordre capitaliste dont l’avidité financière est sans limite.
Le rassemblement attire de plus en plus de personnes venant des différentes régions de France : il est devenu, au fil des ans, une sorte de symbole pour tous ceux qui ne se résignent pas à accepter une certaine « fatalité » guerrière. Il est suivi pour certains d’un dépôt de gerbe, à Royère-de-Vassivière, sur la tombe de Félix Baudy, « Fusillé pour l’exemple » en 1915 et d’un banquet. Pour d’autres dont les libertaires, c’est l’occasion d’organiser un « repas des partageux » au cours duquel, des liens anciens se renouent, de nouveaux se tissent, des projets s’élaborent...
Koumba : Je m’appelle Koumba, j’ai 35 ans, je suis taureau. J’étais partie pour être infirmière dans ma vie. Mais après 5 ans en tant qu’aide soignante, j’étais fatiguée de ce métier et j’ai arrêté. Il y a 8 ans, j’ai décidé de partir au Canada et je me suis lancé dans la cuisine. Cuisiner ça a toujours été une passion pour moi mais je n’aurais jamais cru que ça deviendrait mon métier. J’ai bossé dans des petits restos, ça m’a plu et j’ai fini par passer un BEP pâtisserie au Québec. De fil en aiguille je me suis retrouvée cheffe de cuisine dans une crêperie bretonne dans le grand nord canadien. Forte de cette expérience je m’étais dis « tiens je me lancerais bien dans une ouverture d’établissement en France ». J’’ai rendu visite à ma cousine en Creuse il y a un an déjà et je m’étais dit que je pourrais peut-être me lancer dans cette région. Bobi : Je m’appelle Bobi j’ai 28 ans, je suis vierge ascendant sagittaire. Comme tu peux voir on est toutes les deux d’un signe de terre donc on a les pieds sur terre ! Moi mon parcours est plus orienté vers les métiers du cinéma et de l’audiovisuel à la base. J’ai passé 5 ans à Paris où j’ai fait de la communication dans le cinéma. Après avoir travaillé dans ce domaine j’en avais un peu marre, et il y a un an, je suis venue sur le Plateau. Je suis arrivée en rencontrant le collectif du CAC 23 (cantine autogérée de Creuse), et j’ai vachement accroché avec la dynamique du Plateau. Ma cousine est venue me rendre visite en Creuse une première fois et elle a adoré. Quand elle est revenue, je lui ai montré l’appel à projet de la mairie de Saint-Martin Château et de là on s’est dit : on y va ! Au départ je pensais simplement l’aider sur le montage du projet et finalement on s’est dit qu’on ferait ça toute les deux. J’ai souvent été serveuse dans des restos ou en bar avant de bosser dans le cinéma et j’ai beaucoup aimé ce métier.
K : Je crois que ce qui m’a donné envie c’était de changer de cadre. On trouvait ça superbe que l’auberge appartienne à la mairie. Quand on a visité le lieu on y a vu un potentiel incroyable. On sait que ce sera du boulot mais on est super excitées de s’y mettre !B : Moi j’étais déjà allée dans cette auberge que j’avais perçue très agréable, et je trouve que Saint-Martin Château c’est le plus beau village du Plateau (rires). Aussi, on nous avait dit qu’à Saint-Martin la mairie était engagée, et qu’elle travaillait à établir un lien fort avec les habitant.es. Ça nous a donné d’autant plus envie de répondre à l’appel à projet. Et finalement, ça m’a rappelé des souvenirs, il y a longtemps, quand on était ados, avec Kumba, on s’était dit un jour pendant un trajet en voiture, « un jour, toutes les deux, on ouvrira un resto ».
K : On a été super bien accueillies, c’était très chaleureux. Vendredi 31 mai 2024, l’association Aux berges de Saint-Martin a organisé un pot d’accueil, et il y a eu du monde qui est passé. Les gens sont heureux que l’auberge rouvre, c’est important pour la vie du village. Alors maintenant on sait qu’on est attendues. B : L’équipe municipale et l’association Aux berges de Saint-Martin se tiennent vraiment à disposition pour nous aider ! Par exemple, elle organise un chantier participatif avec nous pour nettoyer l’auberge et la remettre en état ! C’est aussi par des habitant.es de Saint-Martin que l’on a été mises en relations avec d’autres organismes du Plateau comme La Solidaire, qui soutient les initiatives locales.
Vous avez décidé de monter une Scop (Société coopérative de production) pour la reprise de l’auberge, il semble que c’est important pour vous. K : Effectivement, il a fallu à un moment donné se pencher sur les statuts. Moi j’avais déjà travaillé dans un resto en Scop et c’était vraiment différent. On se réunissait régulièrement pour se dire ce qui n’allait pas, ce qui se passait bien, et tu étais entendu. Il n’y avait pas de patron désigné, bien sûr il y avait un responsable de cuisine, de salle, etc. mais c’était une personne élue par les membres de la Scop. B : En créant une Scop on espère que le lieu pourra être pérenne. Personne ne peut repartir avec le capital. Un jour quelqu’un d’autre pourrait reprendre, ou intégrer la Scop, et cette personne aurait le même statut que nous. Si on s’en va, le statut continue d’exister. C’est un statut qui nous permet de travailler avec nos valeurs.
K : Pour cet été, on va commencer avec une offre type tapas, avec des assiettes de charcuterie, des planches apéros, des proposition végétariennes, il y en aura toujours ! On aura aussi commencé le coté salon de thé et pâtisserie. Ce sera possible de venir manger sur le pouce à tout moment.On va développer le côté restaurant à table dans un second temps, pour l’automne. Pendant l’été on fera certainement quelques soirées « test ». L’inspiration de notre cuisine est basée aussi sur nos origines, sénégalaise et algérienne, mais aussi nos différentes expériences. Moi j’aime beaucoup la cuisine asiatique par exemple, et j’ai aussi travaillé dans un resto italien. Donc ce sera varié !B : On essaye au maximum de travailler avec des producteurs locaux et de saison, avec les œufs de Nina, la boucherie Rimareix à Aubusson qui a sa propre ferme, avec la Ferme de Lachaud, avec une association qui produit du tofu sur le Plateau, l’Attrape miel à Saint-Martin etc. En légumes on continue de prospecter, et ce sera aussi du local. En tout cas l’idée c’est de pouvoir venir à l’auberge, pouvoir boire un coup mais aussi trouver des boissons sans alcool et pas chères. On aimerait aussi que les gens puissent manger bien pour pas grand-chose.
B : dans un premier temps il y a l’association Aux berges de Saint Martin qui va proposer une programmation pour l’été, notamment des animations et des concerts. Pendant l’année on organisera des soirées repas à thème, des bingos, des projections, des folles soirées dansantes, des rencontres, des moments d’échanges et d’ateliers. Il y aura le camion Pizza Pop qui viendra tous les mardis, on fera buvette et musique ces soirs là. On imagine aussi une fois par mois mettre à disposition notre cuisine pour soutenir des cantines solidaires. On veut que ce lieu puisse être utilisé et pris en main par des collectifs, associations et habitant.es du coin. Nous sommes ouvertes à plein de propositions, n’hésitez pas à nous écrireK : Plus tard, on a aussi l’idée de mettre en route un service de portage de repas pour les personnes âgées sur la commune et aux alentours. Tout ça reste à construire.
K : La date d’ouverture n’est pas encore posée, mais on espère que ce sera courant juillet ! En tout cas, on a hâte de prendre en main les lieux et de commencer cette aventure.
Entre le séjour à la semaine, avec les gîtes communaux, et la résidence permanente, avec cinq maisons louées, il manquait encore un mode de logement sur la commune. Nous avons désormais des « logements intergénérationnels d’hébergement temporaire à vocation multiple ». Derrière cette clinquante appellation se cachent trois appartements qui doivent permettre d’héberger facilement de nombreuses personnes de passage pour une durée plus ou moins longue.
Ce projet a été lancé dans la foulée des assemblées des habitants consacrées à la reprise de l’Auberge de la Cascade. Il a toujours été un peu périlleux de penser la réhabilitation du rez-de-chaussée pour le bar-restaurant séparément de celle du premier étage avec ses neuf chambres d’hôtel fermées depuis de très nombreuses années. Mais rapidement, l’idée de proposer de nouveaux logements s’est imposée à tous. Accompagnée par l’Arban, la commune a opté pour l’aménagement de deux studios et d’un deux-pièces avec kitchenette et salle d’eau, mais aussi d’un espace commun.
Le côté « temporaire » de l’hébergement a été davantage discuté. Cependant, il permet de répondre à des besoins très variés. Une personne âgée qui vit seule l’hiver dans un hameau envisage d’y passer la mauvaise saison. Les stagiaires des multiples associations y trouvent un pied-à-terre. Les nouveaux arrivants y prennent le temps d’atterrir pour chercher une grange à retaper… Voilà pour la « vocation multiple », liste évidemment non exhaustive. La location est donc possible de quinze jours à quelques mois. Le tout donne l’aspect « intergénérationnel » du projet et pour assurer l’accessibilité de ces logements au plus grand nombre, un monte-escalier a également été installé.
L’idée est aussi de créer un lieu où, tout en préservant l’intimité et l’autonomie de chacun, les personnes hébergées peuvent se retrouver dans un espace collectif. Cet espace commun à l’étage permet aux locataires de recevoir de la famille ou des amis de passage sans être à l’étroit dans leur logement. Au rez-de-chaussée, l’auberge permet de nombreuses rencontres. Plus haut dans le bourg, la mairie est aussi un lieu plein de vie, entre le secrétariat et les bureaux loués à des « travailleurs à distance ».
Le projet a connu de nombreux rebondissements au point qu’il a été envisagé de l’abandonner. L’aménagement des appartements avait été budgété à 112 000 euros par l’architecte missionnée par L’Arban. Cependant, le projet ne rentrait pas forcément dans les cases des financeurs et nous avons essuyé plusieurs refus de subvention, notamment de financement public, et notamment du fameux Plan Particulier pour la Creuse du Gouvernement... Après plusieurs mois de démarches, seule la Fondation AG2R La Mondiale s’était engagée à nous soutenir à hauteur de 20 000 euros. Cela impliquait donc un autofinancement d’un peu plus de 90 000 euros.
Suite à une nouvelle assemblée des habitants, il a été décidé de poursuivre le projet même si les financements ne suivaient pas. Dans les mois suivants, nous avons obtenu un accord de la MSA Limousin (1 500 euros par logement), puis nous avons répondu à un appel à projet de la Région Nouvelle Aquitaine qui a retenu le dossier et nous a accordé 40 000 euros.
Les travaux ont commencé et les mauvaises surprises sont arrivées. Entre des entraits inexistants à remplacer, des solivages trop faibles, et quelques oublis, la note finale du projet a grimpé pour atteindre 179 402 euros TTC, ameublement compris. Heureusement, en cours de chantier, nous avons obtenu un financement supplémentaire de 54 721 euros, dans le cadre de la DETR (Dotation à l’équipement des territoires ruraux, dispositif de la préfecture de Creuse). Au final, la réalisation de ces trois logements aura couté 63 181 euros d’autofinancement à la commune. Et surtout cela aura permis de continuer la politique d’accueil de Saint Martin-Château !
Prochaine étape : la réhabilition de la « maison Forest » sur la place du bourg. Après discussions en assemblée des habitants, la commune a acheté cette maison abandonnée. Les projets foisonnent pour lui trouver à elle aussi une nouvelle « vocation multiple ».
Le collectif d’habitant.e.s « Les Tisserands », installé sur la commune de Saint Moreil, et que nous avons présenté dans le n° 72 d’IPNS, lance une cagnotte pour réaliser un « tiers lieu nourricier ». « Le tiers lieu nourricier émerge actuellement comme nouveau modèle de tiers lieu dans lequel l’entraide paysanne remplace le coworking. Cela nous semble une réponse précieuse pour faire face aux enjeux actuels posés au monde agricole, aux habitant.e.s de petites communes rurales et au vivant plus généralement : changement climatique, appauvrissement des sols, raréfaction de l’eau, pressions économiques, difficultés d’accès à la terre... » Le projet se déploie dans plusieurs directions : production collective de patates pour une dizaine de familles ; mise en place d’un drive fermier ; acquisition de 12 hectares de forêt pour une gestion sylvicole douce, de préservation, nourricière (bois de chauffage, bois d’œuvre, agroforesterie) et pédagogique pour une meilleure connaissance de ce milieu naturel ; location de terres agricoles (20 hectares) pour de multiples projets portés par des jeunes et moins jeunes qui cherchent de la terre pour s’expérimenter et produire avec le soutien d’un collectif : cultures de plein champs, petit élevage, foins et agro-foresterie... ; expérimentation d’une production maraîchère en collectif et acquisition de 2 maisons dans le bourg de Saint-Moreil pour répondre à un fort besoin de logements de personnes nouvelles sur le territoire qui souhaitent rejoindre la dynamique locale.
Objectif de l’appel à dons lancé cet été : réunir 40 000 € d’ici le 30 novembre 2011.
En 2020 l’opportunité d’achat d’une maison du XVIIIe siècle (et de son grand jardin) mobilise un groupe d’habitants.es de Felletin déjà engagé dans l’accueil de nouveaux habitants. Le projet est de rénover cette vieille maison située 19 rue Chanteloube (d’où le nom donné à l’association porteuse du projet : Detzenou, soit 19 en occitan) pour en faire 5 logements confortables, en plein centre de la petite ville creusoise. Ces logements (du F1 au F3) seront à destination de nouveaux arrivants, jeunes, précaires, réfugiés, sans attache sur le territoire, sans droit au RSA ou sans droit tout court. Arriver dans ces conditions sur un territoire rural, où les logements disponibles sont rares, souvent indignes (les coulées d’humidité ne sont pas rares) et toujours trop coûteux en charges de chauffage, renforce en effet leurs difficultés.
Outre l’accès au logement, l’association souhaite également favoriser leur installation sur le territoire, qu’elle soit de courte durée ou plus longue. C’est pourquoi elle prévoit des accompagnements individuel et collectif via la vie de la maison, visant à faire du lien entre les résident.es et les habitant.es et acteurs du territoire. Ces réseaux locaux d’habitant.es et de partenaires seront mobilisés aussi bien pour trouver du travail, se faire des ami.es, faire la fête, être aidé sur des questions administratives, se déplacer, etc.
La priorité est de transformer cette maison insalubre en une maison très bien isolée thermiquement, résiliente et respecteuse de la santé de ses résident.es. Un appel à dons a été lancé pour acheter le matériel nécessaire et des chantiers participatifs et bénévoles ont déjà permis de démolir ce qui devait l’être et de préparer la suite des travaux.
Depuis plusieurs mois un petit groupe de personnes travaille sur le projet de ce qui est actuellement appelé un “Syndicat de la Montagne limousine“, lieu de rencontre entre acteurs du territoire qui se reconnaissent peu ou prou dans la Plateforme de la Montagne limousine écrite en 20141, et outil potentiel de coopération et de mutualisation de projets, d'idées, de moyens entre ces mêmes acteurs, quels que soient leurs statuts (particuliers, collectifs, entreprises, associations, communes...). Cet outil est apparu nécessaire afin de pérenniser et rendre plus fortes les démarches d'habitants et d'habitantes qui ont pu s'incarner dans le passé et jusqu'à aujourd'hui dans des initiatives comme les “assemblées populaires du Plateau“, les assemblées de village, le comité Montagne, la Fête de la Montagne limousine, etc.
Après plusieurs réunions de réflexion en 2018, une présentation générale du projet a eu lieu lors de la plénière de fin de la fête de la Montagne limousine à Lacelle, le dimanche 30 septembre (on peut la revoir intégralement sur le site de Télé Millevaches2. Depuis, pendant une semaine fin novembre, une délégation de huit personnes s'est rendue en Catalogne, à Barcelone et ses environs, pour rencontrer des démarches syndicales et coopératives qui, de différentes façons, sont de nature à les inspirer dans la définition plus précise de ce propre syndicat (un film réalisé par Télé Millevaches propose un compte-rendu de ce voyage que vous pourrez visionner prochainement sur son site). Une seconde étape a eu lieu au cours de la semaine du 21 au 25 janvier 2019, pour un séminaire d'une semaine au cours duquel ont été travaillés différents sujets, avec l'objectif n°1 de rendre plus concrète la dynamique du Syndicat et d'en définir les grandes lignes. Un compte-rendu de cette semaine est disponible sur le site de la fête de la Montagne3.
Le travail entamé est encore loin d’être abouti. Ne serait-ce que parce que ce syndicat n’est pas imaginé comme quelque chose de figé et de définitif, mais plutôt comme un outil en mouvement permanent. Pour poursuivre la mise en place de ce Syndicat, il est proposé trois jours de travail les jeudi 11, vendredi 12 et samedi 13 avril 2019 à Gentioux (à La Renouée). Ces journées de travail sont ouvertes à tous, et vous pouvez venir un jour, ou deux, ou les trois ! Le programme envisagé est actuellement le suivant :
N'hésitez pas à nous contacter pour plus d'informations !
Le samedi 13 à 17h un apéro-compte-rendu des trois jours aura lieu pour celles et ceux qui n'ont pas pu venir durant ces trois jours.
Depuis 1991 que le Centre international d’art et du paysage de l’île de Vassivière existe, j’ai pu voir l’évolution du parc de sculptures ainsi que toutes les expositions. Celle de cet hiver proposait de voir le bâtiment vide ou presque.
Avec un regard naturellement porté sur les œuvres, et à cause du trop grand nombre d’expositions de vidéos, j’en avais presque oublié cette architecture. C’est donc avec grand intérêt que je me suis précipitée pour cette expérience. Cependant, il est difficile d’exprimer de manière objective le désarroi ressenti face au délabrement du lieu. En effet, la plupart des murs sont abîmés par des infiltrations d’eau, de nombreuses vitres sont fêlées... Dans la tour, les murs suintaient de toutes parts la pluie qui tombait dru le jour de ma visite, et le sol de granite était une véritable pataugeoire. Ce bâtiment a pris un sacré coup de vieux et tout laisse à croire que ce problème n’est pas au cœur des préoccupations du moment. Du coup, les grands discours sur cette construction, si élogieux et récurrents ces dernières années, sonnent étrangement faux. Et je me demande si cette non-exposition « focus sur l’architecture » dans un lieu en si piteux état ne ressortirait pas plus d’un délire narcissique que d’une réelle envie de nous montrer quoi que ce soit !
Lors de cette visite hivernale, j’ai aussi été frappée par les puissants courants d’air émanant des portes et fenêtres. Ce bâtiment est devenu un gouffre énergétique sans fond et je serais curieuse de connaître le coût du chauffage. Cependant, ce sujet semble être pris en considération par la direction, car l’artiste exposée ce printemps et jusqu’à l’automne prochain fut lauréate du Prix COAL en 2016 – le Prix COAL Art et Environnement est le rendez-vous international des artistes plasticiens qui s’emparent des questions d’écologie et contribuent par la création à la construction d’un monde durable. Tout va bien alors ? Non. Tout cela n’est que bouffonnerie ! L’extravagante scénographie qui entoure les vidéos de l’exposition affirme au contraire la non-intégration de la problématique des déchets dans l’art contemporain
Sur le chemin du retour, je suis passée revoir une œuvre installée sur l’eau en automne 2011, simple et plutôt drôle (c’est assez rare). Bref, une forme d’art qui se passe des discours institutionnels et laxatifs habituels... L’illusion poétique procurée par ce « sous-marin » fonctionnait parfaitement. Malheureusement, cette œuvre semble aussi souffrir d’une absence totale d’entretien. Les tempêtes l’ont complètement déformé, il n’a plus d’allure. En huit ans, le gel et le soleil ont bien fini par dégrader la bâche qui constitue sa coque et des particules de plastique doivent se répandre en grand nombre dans le lac maintenant.
Mais que les poissons se rassurent, ils peuvent consulter la Charte paysagère du pays de Vassivière, « Boire l’eau du lac» à la librairie du Centre d’art ! À l’image de la tour souvent représentée comme emblème de l’île, cette œuvre se trouve sur de nombreuses brochures touristiques du lac, en photo ou dessinée et même sur le site internet du lac de Vassivière. Le contraste entre rêve et réalité est assez fâcheux. On vous vend du rêve, mais ce n’est pas nouveau...
Bref, quelque peu en colère, mais le dépliant « Vassivière Utopia » en main, j’ai pris la route pour voir enfin cela. Depuis deux ans de suite, et une troisième salve est prévue cet été, des paysagistes et architectes sont parachutés sur l’île pour une résidence et « intervenir » dans les communes proches du lac. Je cite : « […] pour tenter d’insuffler de nouvelles expérimentations et des approches sensibles, pour proposer avec les habitant.e.s un regard autre sur le paysage et chercher les moyens d’articuler art et société. » Et hop, un petit coup d’ingérence culturelle assez mal dissimulé.
Décidée à faire ce tour avec un trajet réfléchi en terme de distances plutôt que dans l’ordre calendaire de réalisation des œuvres, je me suis rendu compte au fur et à mesure des visites qu’il y avait deux couleurs de signalisation. Mais oui ! La session 2018 est signalée en jaune et celle de 2019 en bleu ! Quelle idée saugrenue ! Heureusement que le balisage des sentiers de grande randonnée ne change pas de couleur chaque année ! Par contre, peu importe la teinte, les textes accompagnant les « œuvres » restent fidèles au style pompeux de rigueur.
Passé ce détail chromatique, et hormis le travail effectué sur la commune de Saint-Martin-Château, on voit assez vite que la plupart des actions menées n’ont pas vraiment fait l’objet d’études sérieuses des lieux, ni de réelles concertations avec les riverains. En substance, sur la commune d’Eymoutiers, l’œuvre s’est vue affublée après coup d’un filet anti-chute. Son propos est littéralement travesti.
Pour la commune de Peyrat-le-Château, au lieu-dit Quenouille, alors que le moindre déplacement de cailloux serait presque soumis à une intervention de l’INRAP (Institut national de recherches archéologiques préventives), le Centre d’art arrive à imposer son immonde utopie sous la forme béante d’un trou d’obus ! D’après les riverains, l’œuvre n’a pas été terminée, le camion toupie de béton n’ayant pas pu accéder au chantier. L’étroitesse de la route serait en cause. Tant mieux, cela évite finalement une grosse bouse de béton au milieu de la forêt ! Quel fiasco... Mais c’est plutôt sur le bien fondé des choix du jury que je m’interroge que sur la compétence des intervenants. En attendant la nouvelle couleur de signalisation...
À travers le brouillard matinal, il s’élève encore depuis l’âtre de nombreuses chaumières la fumée froide d’âpres discussions sur cette dystopie. Et bien, au-delà des lacs et des rivières du plateau de Millevaches, il semble que l’on commence à entendre le sinistre et néanmoins annonciateur tintement du glas. À bon entendeur, salut !