Mon expérience, en tant que maire, et donc représentante de ma commune dans la communauté des Portes de Vassivière, s’est déroulée selon différentes étapes.
Au tout début, je tiens à dire que je m’y suis engagée avec motivation et respect pour mes collègues élus, avec curiosité aussi et sans a priori. Si quelques réticences avaient légitimement été exprimées par certaines communes, pour ma part, je tenais à me faire ma propre opinion, et je voulais croire à la bonne volonté des élus en faveur du territoire dans sa globalité. Je comptais bien aussi conserver mon esprit critique et ma liberté de parole, quitte à ce qu’ils passent pour de la naïveté.
Au bout de quelques mois, j’avais déjà quelques interrogations par rapport au fonctionnement et à l’attitude quelque peu arrogante de certains élus, principalement d’Eymoutiers, et détenteurs des pouvoirs exécutifs. Dans cette ambiance peu propice à la convivialité, bien que l’esprit de solidarité soit prôné avec emphase par les mêmes élus, les rivalités entre communes, au lieu de s’atténuer ne faisaient que s’amplifier.
Après environ une année d’observation, j’ai commencé à intervenir et à poser quelques questions sur le manque de concertation et de débat avant les prises de décision, le manque de partage dans le travail (sous-entendu : la concentration des pouvoirs aux mains d’une oligarchie d’élus).
Quelle conception d’une communauté de communes avaient donc mes collègues élus ? Pourquoi les sujets de fond n’étaient- ils jamais abordés ? Le plus surprenant, pour moi, a été, à ce moment, de découvrir que je me retrouvais le plus souvent seule à m’exprimer ouvertement. La critique ne se conçoit pas autour de la table, mais dans les couloirs ou dehors. Les réactions sont devenues alors de plus en plus agressives et méprisantes quand il s’est agit d’écouter mes critiques ou de prendre en compte mes demandes.
Par exemple, il y a eu un refus catégorique face à mes demandes d’aide dans le domaine du logement, pour ma commune. La formulation de cette compétence dans les statuts de la communauté a même été modifiée ensuite, pour éviter que je puisse réitérer ma demande. Le refus m’a été notifié sans aucune étude ni réflexion préalables, seul l’argument que “le rôle de la Communauté n’était pas d’acheter toutes les ruines du territoire“ m’a été opposé... alors que ma proposition concernait une maison habitable de suite ! Mes tentatives de plus amples explications n’ont pas retenu l’attention de qui que ce soit.
De manière plus générale, il y a un manque total de transparence dans l’organisation interne : les différentes commissions sont présidées par différents élus, pour la majorité vices présidents, issus de différentes communes, mais dans la réalité tout se passe dans le petit microcosme de la mairie d’Eymoutiers, où l’on peut penser que seuls les délégués issus de cette commune ont toute la latitude pour contrôler les dossiers et recevoir en direct les informations. La confusion entre Communauté et commune d’Eymoutiers est sans cesse entretenue par le simple fait que les locaux des deux collectivités se confondent et sont situés dans le bâtiment de la mairie d’Eymoutiers. Les réunions communautaires ont toutes lieu à cet endroit, dans les différents bureaux de la mairie et salle du conseil municipal. Les arguments essentiels à cet état de faits sont financiers et logistiques.
Le domaine particulier des embauches est significatif à cet égard : aucune offre d’emploi à pourvoir dans la communauté n’est diffusée dans les communes et le choix des personnes recrutées est exclusivement fait par le président (maire d’Eymoutiers), avec parfois l’appui d’un des vices présidents, issu de cette même commune. J’ai tenté de demander la création d’une commission de recrutement, demande très mal accueillie, car susceptible de “remettre en cause l’honnêteté du président“... La seule amélioration dans ce domaine a été dernièrement l’embauche du nouveau directeur avec l’avis de plusieurs vices présidents. C’est la première fois en 8 ans !
Un autre exemple : le vote du délégué communautaire (un élu d’Eymoutiers) au comité syndical du Parc naturel régional. Il a voté en faveur du retrait du conseil général de la Haute-Vienne, sans débat préalable en réunion de la communauté de communes, et en contradiction avec les votes respectifs des communes membres ! A mes questions, ce délégué a répondu en prétendant connaître mieux que tous les autres, les enjeux du problème et le PNR en général, et en considérant “qu’il avait agit dans l’intérêt du parc, sans avoir besoin de consulter les représentants des communes“ : fin du débat ! Le président approuve, les autres suivent ou se taisent. Du reste le PNR ne figure jamais à l’ordre du jour des réunions. Ce sujet n’est abordé que dans les “questions diverses“, si quelqu’un le demande.
Dans le domaine culturel, il y a des épisodes similaires dans le fonctionnement de la commission musique, de laquelle j’ai démissionné l’an dernier toujours pour les mêmes motifs : aucune concertation, rétention d’informations, etc... Je m’occupais depuis plus de dix ans de l’école de musique, devenue communautaire en 2009.
J’en suis arrivée d’abord, début 2011, à “boycotter“ toutes les réunions communautaires pendant cinq ou six mois, après l’envoi d’un courrier expliquant mes raisons, ceci dans l’indifférence générale. Si la monopolisation des pouvoirs et toutes ses conséquences représentent un grave dysfonctionnement, le manque de réaction officielle de la part des autres élus est également très inquiétant. Les seules explications apparentes que je trouve face au mutisme et à la passivité affichés de ces élus, seraient trop caricaturales et accablantes ; mais pour certains le carcan politique est une réalité tenace.
Ce triste constat est à l’opposé de ma conception du rôle d’élu au sein d’une communauté de communes. Les valeurs de solidarité, de collégialité et de démocratie, qui sont dans tous les discours, ne sont dans les faits qu’une façade et une mascarade. La vision du territoire dans son ensemble est inexistante. Son caractère rural avec ses particularités et notamment son appartenance en partie au plateau de Millevaches, sont déniés.
Mon intention n’est pas de tout juger, ni de dire que j’ai raison sur tout. Mais l’isolement dans lequel on me cantonne aujourd’hui a toutes les apparences d’une stratégie destinée à ne pas répondre aux questions qui dérangent... Ce sont toutes ces constatations, que je trouve insupportables et catastrophiques pour l’avenir de notre territoire rural, et qui s’apparentent si étroitement aux méthodes du conseil général de la Haute-Vienne, qui m’ont poussée en janvier dernier, à écrire une lettre ouverte aux élus (voir ci-contre).
Je n’ai reçu, à ce jour, aucune réponse d’aucune sorte, si ce n’est par compte rendu de réunion interposé. C’est en effet la méthode utilisée par le président de la communauté de communes, qui n’a jamais répondu à aucun de mes courriers, mais qui se sert des comptes rendus de réunion du bureau communautaire pour s’exprimer, de manière détournée. On peut y lire au sujet de la “Lettre de Maryse Dupont adressée aux conseillers communautaires“ que “le Président indique qu’il avait inscrit cette lettre à l’ordre du jour car il voulait proposer une analyse collective de cette lettre, chacun pouvant intervenir à tous moments. Il tient à ne pas cacher son écoeurement face à ce déferlement de fiel, face à une telle acrimonie. Le Président ajoute qu’il pense avoir été conciliant et patient mais que devant ce tissu d’insultes et cette avalanche de leçons données il n’a pas l’intention, pour ce qui le concerne, de continuer à prendre des coups sans rien dire. Mais en l’absence de Maryse Dupont, il ne veut épiloguer pour l’instant et souhaite donc repousser ce débat.“ Il me semble que cette “réponse“ parle d’elle même et montre comment sont traités les maires “récalcitrants“.