Nous en avons conscience, nous avons quelque peu détourné le sens de l’Utopie, en proposant pour cette 4ème édition de la Décade “Cinéma et société“ d’explorer le champ multiple des “topies“, c’est à dire des expériences souvent modestes au regard de l’Histoire, qui ont cherché à bousculer l’ordre des choses quand il est injuste.
Pourquoi avoir distordu ainsi le sens de l’Utopie ? En effet, si on plonge dans le dictionnaire, l’Utopie serait un non lieu, un idéal indéfiniment à atteindre. Mais à quoi sert de courir après ce qu’on n’atteint jamais ?
Curieux que nous sommes, les films ne manquaient pas. Il nous a fallu choisir, 10 jours c’est peu et beaucoup à la fois... Fidèles à notre démarche d’explorer le passé et le présent, d’interroger la réalité française, comme celle de la planète, nous avons choisi des films qui témoignent tous à leur manière, sur le mode de la fiction comme celui du documentaire, de l’aspiration à changer le monde ou, comme Jacques Krier le fait si magnifiquement, dans un film comme Les Matinales à en rendre compte, en portant sur “les gens“ un regard en empathie et en cinéma.
Merci à tous nos partenaires fidèles, le CNC, l’INA-Atlantique, de nous accompagner dans cette décade pour découvrir des films rares comme Les Castors ou Une raisonnable utopie, l’expérience de Grenoble.
Merci aux réalisateurs de nous faire découvrir des films jubilatoires comme l’Argent fait le bonheur , Louise, son père, ses mères, son frère et ses sœurs, ou Milestones
Que serait l’Utopie, sans la résistance à l’insupportable. On tire, on pleure, La Dignité du peuple ou Rue de la banque de Michaël Hoare, nous le rappellent fort opportunément.
Résister aujourd’ hui prend tous son sens, sur des terrains fortement menacés par l’arbitraire, la course au profit, le retour d’un ordre établi qu’on aurait plutôt envie de qualifier de vaste désordre. Sur les terrains de l’école et de la psychiatrie, des films témoignent d’un autre possible. En d’autres temps, l’expérience des Enfants de Sumerhill a représenté une alternative inventive à l’école classique suivie avec attention par toute une génération. Quant au film Radio la Colifata, il invente un autre possible pour le devenir des malades mentaux en Argentine, que ce qu’on leur propose ici, en France.
Fidèle à sa démarche, la Décade organisera des débats avec les spectateurs après chaque projection, au cinéma le Palace de Tulle, notre partenaire fidèle, comme dans les villages ou chez les habitants du pays de Tulle qui nous font le plaisir de nous accueillir. Les réalisateurs Jean-Michel Carré, Michäel Hoare, Richard Prost seront présents lors de la projection de leur films.
Nous avons, par ailleurs, choisi d’accueillir à la Décade, la pensée des grands visionnaires de l’ Utopie que sont Georges Orwell, et son roman prémonitoire La Ferme des animaux et la parole de celui qui nous manquera toujours, André Gorz.
Que serait l’esprit d’utopie sans rencontres , sans échanges, sans débats ?
Confronter ensemble nos regards pour imaginer d’autres possibles à partir de pratiques alternatives, c’est faire œuvre de vigie afin de contribuer à provoquer des basculements et des questionnements, qui, nous l’espérons, feront advenir d’autres modes de “vivre ensemble“ et qui donneront tout son sens au mot Utopie.