Le 13 juillet 2011, un grand titre barrait la “Une“ de La Montagne : “Fiasco de la cogénération à Felletin“,un dessin légendé “çà sert à quoi au juste ? à creuser les déficits publics“ l’accompagnait. Une véritable exécution pour une réalisation qui devrait être un exemple de développement des énergies renouvelables. Heureusement l’article de la page 8, titré “la belle idée tourne au fiasco financier“, était plus informatif et nuancé.
Rappelons que l’installation de Felletin permet, en utilisant comme combustible les “produits connexes du sciage“, issus des scieries de la région :
En 1999, et pour 20 ans, la société SOCCRAM est devenue concessionnaire ; elle a construit l’installation et supporté les charges et les bénéfices de son exploitation.
Or depuis le début de la délégation de service public (DSP) le déficit a été constant. Plusieurs raisons à cela :
Les pertes générées par l’exploitation de l’installation de l’ordre de 2 millions d’€ par an, ne se sont pas résorbées en dépit de l’amélioration constante de fonctionnement : l’équipe technique (10 salariés) a su mettre au point et peaufiner les réglages d’une installation pourtant très pointue.
Face à cette situation, la société SOCCRAM a espéré jusqu’au début de l’année 2011 trouver des solutions
Mais le groupe GDF-Suez, qui était déjà entré au capital de SOCCRAM, en est devenu le propriétaire exclusif en mars 2011. On a pu dès lors constater dans les faits et les projets ce qu’est la brutalité d’un grand groupe capitaliste.
En effet, alors qu’on aurait pu espérer que le poids de GDF-Suez permette d’obtenir de meilleures conditions économiques de fonctionnement, la prise de pouvoir du groupe s’est traduite par la volonté de limiter immédiatement le déficit en arrêtant dès le mois de juin et pendant 4 mois la chaudière bois, les fournisseurs se sont vus signifier l’arrêt sous huit jours de leurs livraisons (10 000 m3/mois).
Les nouveaux dirigeants souhaitent au-delà des 4 mois prévus actuellement, pérenniser pour une année au moins le fonctionnement exclusif au gaz.
Qui plus est, ces mesures ne suffiraient pas à résorber le déficit !
Face à une perspective aussi catastrophique, la mairie de Felletin, et ses partenaires publics et privés sont mobilisés pour rappeler la SOCCRAM à ses obligations, la DSP, en effet, prévoit expressément l’utilisation du bois comme source d’énergie.
Si l’on en reste à des arguments techniques (financiers ou juridiques) et si l’on continue à considérer, avec GDF-Suez, que la seule finalité de l’installation est de faire du profit, il sera difficile de sortir de l’ornière actuelle. En revanche ; replacer la question dans le cadre du développement des énergies renouvelables, doit ouvrir des voies vers la pérennisation de l’installation.
Malheureusement en France, la politique énergétique réussit le tour de force de se prétendre raisonnable et de jeter le discrédit sur les antinucléaires en les présentant comme irrationnels et “porteurs de peurs moyen-âgeuses“. Pourtant on peut penser que “ce qui est irrationnel, ce n’est pas de sortir de l’énergie nucléaire, mais de continuer à la défendre après Fukushima“. Après les discours sur la croissance verte claironnés au Grenelle de l’environnement, on peut constater :
Ce tableau général est sombre, mais il nous semble qu’il est vital, face au lobby nucléaire et à une logique étroitement financière, de soutenir le maintien en activité du site felletinois dont l’apport pour le développement local et celui des énergies renouvelables est essentiel.
Jean-François Pressicaud