Oubliez le charme suranné des veilles bibliothèques à la lumière tamisée, au silence religieux et à la légère odeur de poussière… Ici, c’est la vie au milieu de la culture, la culture au milieu de la vie !
Évidemment, comme dans toute médiathèque, on y trouve des livres, des livres-lus, des CD et des DVD. Et pas qu’un peu car, au-delà du fonds déjà conséquent (plus de 13 000 documents), des nouveautés arrivent toutes les semaines grâce à la bibliothèque départementale de prêt. Mais on y trouve tellement plus… À commencer par un lieu chaleureux et accueillant. Tout frais rénové, l’ancien centre de secours de la commune est devenu un endroit baigné de lumière, coloré et qui respire la joie de vivre. Et ici, point d’archiviste qui passe sa vie à dire “chut !“, mais des bibliothécaires et bénévoles aux voix douces, aux yeux rieurs et aux sourires plus larges qu’une encyclopédie. Des transats ou des poufs pour vous installer et même un coin café-tisanerie... Bref, un endroit où l’on a envie de passer du temps et de revenir même si on n’est pas un inconditionnel de la lecture (Et que dire si on l’est!).
D’autant que de nombreuses animations y sont proposées tout au long de l’année : lectures, rencontres avec des artistes, expositions mais aussi ateliers de bricolage, de relaxation, de sophrologie, d’activités musicales et cinématographiques… Ce lieu est celui de ceux qui le font : chacun est invité à y suggérer voire animer des activités. C’est ainsi que Marta et Susan vous plongent dans un bain de langues en proposant des lectures en espagnol et en anglais ou que Lili et Monique vous initient à la couture.
Les activités sont éclectiques et peuvent parfois soulever quelques interrogations. Quelle drôle d’idée par exemple que d’inviter une médium à venir parler de ses expériences et de ses livres… Mais si cela sort des sentiers battus, ça répond bien aux envies des gens. Preuve en est les quelques 200 personnes qui sont venues l’écouter.
Lorsqu’en 2011 la municipalité a décidé (car, oui, c’est une médiathèque municipale) de développer les activités de la bibliothèque dans des locaux plus spacieux que le petit appartement dans lequel elle était jusqu’alors, le but était d’offrir à la population une “médiathèque troisième lieu“, c’est-à-dire un endroit qui soit à la fois un lieu culturel mais également un espace de vie et de rencontres ouvert à tous, où pourraient se côtoyer jeunes et moins jeunes. Elle y a mis les moyens et continue de les mettre : grâce à deux employés (Nathalie et Rémi) et des bénévoles (Christine, Dominique et Ève) très impliqués, la médiathèque est ouverte quatre jours par semaine en hiver et cinq jours l’été sur de larges plages horaires, et ses services sont gratuits pour tous. Mais nul doute que cela en valait la peine puisque la médiathèque compte désormais environ 1 200 abonnés. L’an passé, pas moins de 11 000 visiteurs ont franchi ses portes et ils y restent de plus en plus longtemps. D’ailleurs, si vous regardez bien, au milieu de toutes les décorations, vous apercevrez une petite plaque signalant que notre petite médiathèque a bien tout d’une grande, puisqu’elle a reçu le prix du meilleur accueil des bibliothèques francophones (rien que ça !).
Au service de tous, la médiathèque noue de plus en plus de partenariats avec des écoles, EHPAD ou associations de la commune ou alentours. Et, se voulant véritable actrice du bien-vivre ensemble, elle a encore plein d’initiatives dans sa besace. Par exemple, pensant à ceux qui ne se déplacent pas si facilement, elle envisage des manifestations hors-les-murs, par exemple des spectacles ou veillées chez l’habitant ou la mise en place d’un cinéma itinérant “ciné d’hiver“...
Alors, si vous ne la fréquentez pas encore, venez faire un petit tour à la médiathèque de Royère. Que vous y croisiez un groupe d’enfants en pleine écoute de contes ou en train de suivre assidûment une course de bateaux autour du monde, un télétravailleur connecté à la toile, un joueur vidéo ou un passionné de bandes-dessinées, vous y ferez probablement de belles rencontres et passerez un bon moment. Et il y a fort à parier que vous aurez envie d’y revenir !
C’est avec un article de lui qu’il y a six ans nous ouvrions, comme une profession de foi que nous partagions, le premier numéro d’IPNS. Titre du texte d’Alain : “Pour un plateau vivant“. Et ces lignes, qui sont les siennes, et qui disent tout ce qui le motivait à agir ici : “J’ai acquis la certitude que l’avenir de notre pays est plus dans les représentations que nous en avons que dans les statistiques : l’optimisme ou le pessimisme, la confiance ou la défiance, notamment entre catégories professionnelles, la solidarité ou le corporatisme. Le développement est d’abord dans les têtes. Ce sont ces sentiments, ces conceptions partagées ou non du territoire et de son devenir qui sont à mon sens la source de tout le reste“.
Et cette source, Alain Fauriaux n’a cessé de l’alimenter en lançant de nombreuses initiatives devenues de véritables bornes dans le paysage culturel et associatif du plateau : les fêtes du chemin il y a 20 ans, les bistrots d’hiver qui célébreront leurs dix ans en 2009, le festival “Chemin de rencontres“. Au sein de l’association Pays Sage qu’il avait créée et qu’il présidait, il n’avait de cesse de relier sur le plateau les initiatives et les hommes. Son souci constant – son obsession oserais-je dire – était de réunir, rassembler les populations différentes du plateau (anciens et néos, agriculteurs et artisans, résidents permanents et secondaires, habitants et vacanciers, jeunes et vieux). Son credo : créer les conditions d’une conscience commune du territoire comme espace d’avenir et de créativité. Son attention aux dynamiques culturelles était liée à la conviction qu’il avait que la culture était devenue aujourd’hui l’élément moteur d’une forme possible de renaissance.
Il lui fallait convaincre, expliquer, convertir les uns et les autres à cette vision du pays, mais toujours avec patience, tolérance et attention aux autres, en particulier celles et ceux qui avaient le plus de mal à comprendre des mutations souvent déstabilisantes. Lui, l’enfant de Flayat élevé dans la boulangerie paternelle, il avait quitté le plateau pour les études et le travail (il enseignait à l’université de Clermont-Ferrand et se rendait souvent en Chine dans le cadre d’un partenariat avec une université chinoise). Je le revoie encore animer dans les années 1980, au bord de l’étang de la Ramade, une réunion d’information pour expliquer l’intérêt d’un PNR sur le plateau. Je le revoie l’année dernière, à Masgot après un superbe concert tzigane des bistrots d’hiver haranguer les spectateurs en leur disant en quoi le pays pouvait revivre par la culture. Je le revoie enfin, tout récemment – c’était fin juillet lors du festival Folie ! les mots – nous parler de ses nouvelles fonctions de maire de Flayat auxquelles il venait d’être élu. Il se préparait à affronter une charge lourde et écrasante, mais qui le passionnait, et il se réjouissait d’avoir quelques jours plus tôt réuni dans un moment de fête une large partie de la population de sa commune : toujours ce besoin de rassembler et d’agir ensemble.
Ce sont encore ses mots, dans le n°9 d’IPNS : “Sur la Montagne limousine, il y a de la musique, des rêves, du courage, de l’action. Un nouvel imaginaire se développe, présent, vital, et qui trace le début d’un incertain mais possible avenir“. Un avenir qu’il ne pourra partager avec nous, mais que, sans conteste, il aura largement contribuer à construire.
Depuis un an nous avons voyagé à travers la France à la rencontre de compagnies africaines et franco-africaines de cirque, de théâtre, de musiques, de danse. Nous avons parcouru les sentiers du Plateau et imaginé la Grande traversée à pied. Dans nos villages nous avons pressenti les lieux des bivouacs, et prévu l'implantation du grand chapiteau…
Mais voilà, en février, il nous fallait prendre une décision sans avoir la certitude de rassembler les financements nécessaires. Trop d'incertitudes sur ce point. Trop de risques ! Nous avons donc joué la prudence et réorganisé son déroulement. Nous n'avions d'ailleurs guère le choix si nous voulions être à la hauteur des éditions précédentes et des attentes du public. Situation familière à beaucoup d'associations et d'organisateurs d’événements culturels : travailler avec des objectifs de moyen et long terme, être efficace sur le court terme, mais avec une visibilité financière en partie annuelle sur la réalisation d’événements.
Il est légitime que les institutions et collectivités fassent des choix dans une réalité budgétaire contraignante. C'est même leur raison d'être. Et nous ne sommes pas du tout dans la posture infantile et capricieuse d'exiger des sous pour notre joujou ! Mais que c'est énergivore de recommencer sans cesse les démarches, les très lourds dossiers, surtout d'attendre des mois les positions des partenaires financiers alors que les engagements vis à vis des artistes, des techniciens, des imprimeurs, des communes, de la presse, doivent être pris bien avant. C'est de la haute voltige sans filet !
Il ne s'agit pas d'entrer dans le chœur des lamentations. Après tout, à nous de rassembler les fonds de roulement tampons pour tenir compte de ces réalités. Mais bon sang quel combat ! A nous de prouver tout l'intérêt de notre travail pour l'économie, le social, le culturel, les relations humaines, le territoire… Mais quelle énergie il nous faut et sur des années ! A nous aussi de chercher des synergies ! Car notre certitude est que la Montagne limousine a un besoin essentiel de ce genre de fête : liens sociaux, fierté des habitants de produire chez nous des spectacles populaires de haut niveau, de faire connaître, fréquenter et aimer notre pays. Certes le Conseil Régional du Limousin et le Conseil Général de la Creuse avaient annoncé leur soutien -confirmé depuis- comme ils l'avaient fait l'année précédente. La version 2005 du festival avait aussi été soutenue par le Parc Naturel régional de Millevaches à travers l'opération "le Parc en fête". Mais combien d'années de preuves répétées d'efficacité pour qu'un territoire tout entier porte vraiment des réalisations si utiles pour ses habitants, pour sa notoriété, pour sa fréquentation ?
Pour reprendre la belle formule de Jean Viard, les territoires les plus dynamiques sont les lieux qui sont "mis en désir". En effet l'attrait des territoires est devenu un facteur essentiel de leur vitalité du fait des liens qui existent maintenant entre attraits, dynamique générale et créations d'entreprises. Mais comme les fonds publics sont par définition limités c'est aux responsables publics à tous les niveaux de faire des choix. Quels choix dans le domaine culturel pour la Montagne limousine et de quelle manière ? Comment sur des choix partagés entre collectivités, institutions et associations organisatrices tendre vers plus de sécurité ? Prenons aussi notre part : n'est-il pas temps d'en parler entres organisateurs pour chercher des synergies vraiment efficaces ( logistique, communication, frais de personnel,…)? Et sommes-nous mûrs pour cela ? Quelques contacts dans ce sens nous encouragent.
En attendant… nous commençons les ateliers des "Chemins de rencontres" dont le déroulement se fera sur plusieurs mois jusqu'au final de juillet 2007 si, comme nous l'espérons, tout se passe bien. Se passer bien cela veut dire que sur ces deux points, l'engagement territorial et la solidarité entre organisateurs, nous avançons très concrètement dans les toutes prochaines semaines.
Contrechamps intitule son projet : “Construire ensemble une nouvelle ruralité”. Il s’agit d’inventer, de mettre en œuvre et de soutenir un développement local ancré dans un territoire rural en déprise et porté par ses habitants. Notre conviction est que conjointement à la dimension économique du développement (souvent confondu avec croissance) doivent co-exister une dimension sociale appropriée (reconnaissance, échange, partage, solidarité) et une dimension culturelle de qualité (diversité, accessibilité, participation, etc.). Ces trois dimensions sont indissociables et elles doivent s’interpénétrer pour se féconder mutuellement. Ainsi, dans la transversalité et le décloisonnement des activités, se construisent du sens et du lien entre les personnes.
Depuis le 1er janvier 2002, Contrechamps loue par bail emphytéotique à 99 ans, un ensemble de bâtiments situé à Trasrieux sur la commune de St Julien le Petit. Il s’agit d’une ferme fortifiée du 17ème avec granges, cour intérieure, et petit château qui vient de faire l’objet d’une demande de protection auprès de la commission régionale du patrimoine historique.
L’association souhaite sauvegarder l’ensemble de ce patrimoine architectural dans le respect de son caractère d’origine tout en lui donnant une destination conforme aux attentes d’une partie des habitants du territoire et aux objectifs de l’association.
L’idée maîtresse est de faire de ce site remarquable, un lieu d’accueil, de rencontre et d’expérience pour tous publics dans les domaines de l’animation pédagogique, de la formation et de l’expression artistique. Ces activités se développeront dans un rapport étroit avec le domaine agricole de Trasrieux (du GAEC Champs Libres) et la dynamique locale.
Parmi les aménagements, il est prévu de réaliser un hébergement collectif d’une capacité de 30 places, des salles d’activité, une salle d’expression artistique et de spectacles de 80 places et un ensemble de restauration.
Pour commencer tous ces travaux l’association organise cet été, du 2 au 18 août 2002, un chantier international de jeunes autour de la rénovation de la grange, pour en faire une salle de spectacles. Une vingtaine de jeunes de 18 à 30 ans sont attendus pour se rencontrer autour de quatre grands thèmes :
Bien. On ne peut le contredire. Les résultats de vote d’une partie du Sud creusois montrent en effet une propension à voter majoritairement à gauche. Je comprends tout à fait que cela puisse le contrarier mais, encore pour quelques temps (?), nous avons la liberté de voter pour qui nous voulons. Je m’interroge en revanche sur les autres éléments articulant son discours.
Au centenaire d'une habitante du Chauchet, le 27 octobre 2024 (compte Instagram de Bartolomé Lenoir)
Grâce à l’action concertée de plusieurs élu.es de ce « Sud creusois », beaucoup de personnes sont venues s’y installer au fil des décennies depuis le courant des années soixante. Ils y ont amené leurs compétences, leur savoir-faire mais aussi leurs enthousiasmes et y ont créé de nombreuses activités développant l’emploi et contribuant à la vitalité du territoire. Ils y ont fait souche et comptent, maintenant, deux voire trois générations de présence. Creusois.es ? Pas creusois.es?Leur présence a amené dans un cercle vertueux de nouvelles et nouveaux arrivants attirés par la dynamique créée et les nombreuses activités proposées. Nous constatons donc une arrivée importante de couples plus jeunes, actifs avec enfants. Ce qui nécessite par exemple d’ouvrir de nouvelles classes dans certaines communes et qui se traduit, dans d’autres, par un renversement de la tendance avec un solde migratoire désormais positif. Ils ont des projets de vie et d’activités très diversifiés et nous amènent des idées nouvelles mais aussi des énergies et des revenus. Creusois.es ? Pas creusois.es?Cette dynamique a contribué à attirer d’autres personnes recherchant des territoires solidaires qui sont venues s’installer dans ce sud à leur retraite, apportant patrimoine et revenus. Creusois.es ? Pas creusois.es?
19 novembre 2024 : avec la coordination rurale
Et oui, les nouveaux arrivants viennent aussi parce que c’est un territoire dynamique, où se créent de nombreuses activités et où de nombreuses associations sont porteuses de diverses initiatives de solidarité, de culture, de réflexions et de rencontres, creuset de nouveaux rapports au monde et de nouvelles façons de vivre. Est-ce cela les comportements inacceptables ?Et oui, il y a localement une envie d’accueillir des réfugiés que les bouleversements du monde ont mis sur la route de l’exil. Cet accueil se fait dans des conditions de dignité et de solidarité qui portent fruit en matière d’intégration puisque ces réfugiés poursuivent des études, deviennent infirmiers, couvreurs, cuisiniers… – métiers dont notre territoire a le plus grand besoin. Comportements inacceptables, là encore ?
Et oui, certains de ces nouveaux habitants mais aussi beaucoup des « natifs » souhaitent défendre un modèle de développement qui fait la part belle à l’humain, prend soin du territoire et réfléchit à des formes de développement qui ne mettent pas en danger notre patrimoine naturel commun. Ils et elles le font en manifestant, mais aussi en créant des alternatives aux solutions existantes. Comportements inacceptables, toujours ?Et oui, quelques groupes de jeunes et moins jeunes vivent des formes d’habitat communautaire, renouant avec des traditions de soutien mutuel que notre société à tendance à dissoudre. Inacceptable, donc ?
Avec son mentor, Jean Auclair à la cravate trumpiste
Monsieur le député qui est ce « nous » que vous évoquez et à quelle culture faites vous allusion ?Faites vous allusion à celle des maçons de la Creuse qui rapportaient de leurs séjours réguliers dans les villes des idées et des modes d’organisation qui venaient irriguer nos campagnes ? Faites vous référence à ce communisme rural dont nombre de nos communes ont été le fer de lance ? Faites vous référence à l’admirable comportement des résistantes et résistants de notre territoire face à un État français inféodé au régime nazi ? Ou bien peut-être à celles et ceux qui décidèrent, ici ou là, que les monuments aux morts des guerres passées devraient refléter une volonté pacifiste ?Dans notre République, la liberté de penser, la liberté de circulation et d’installation sont constitutionnelles. Que les nouveaux arrivants sur un territoire soient respectueux de celles et ceux qui l’ont construit rien de plus normal et c’est la base incontournable. Pour autant, ce qui fait la richesse d’un territoire et de sa culture, c’est bien leur capacité d’intégrer les nouvelles personnes qui viennent y vivre dans toutes leurs dimensions, y compris culturelles. Et c’est dans le débat et la confrontation des idées et des modèles que se construit un projet de territoire. Les bouleversements du monde, ceux là même qui ont conduit beaucoup de réfugié.es sur notre sol, méritent que l’on s’attaque à leurs causes de manière responsable et réfléchie.Et combien de générations faut-il accumuler pour faire partie de ce « nous » mythique que vous évoquez ? Des personnes qui ont créé ou développé différentes activités économiques sur le territoire et qui ont depuis des décennies participé à sa gestion et à son développement seraient illégitimes ? Au nom de quoi ? De quelles valeurs immanentes ?
Oui, les clivages existent. Nous ne sommes pas dans un monde où une pensée unique, quelle qu’elle soit, aurait le monopole de la raison. Nous avons à organiser le débat, accepter que l’autre pense et agisse différemment, respecter les minorités et trouver les compromis nécessaires au vivre ensemble. Voilà quelques unes des « vertus » que les élu.es, tous les élu.es, tout comme l’ensemble des citoyennes et des citoyens, doivent s’efforcer de mettre en œuvre si nous voulons éviter que notre société ne se disloque et ne sombre dans les visions totalitaires.
Le Chammet, cible récurrente des réactionnairesQuelques jours après son intervention sur France 3 dans laquelle Bartolomé Lenoir annonçait « une initiative forte contre l'extrême gauche en Creuse », il lançait une pétition pour demander l’expulsion de l’ancien centre de vacances d’EDF du Chammet et utilisait sa fonction de député pour attaquer, en question orale à l’Assemblée, les habitants du lieu.Cette lubie concernant le Chammet, c’est aussi celle de Jouany Chatoux, de Pigerolles, qui a appelé à la violence contre le Chammet dès novembre 2022 : « attaquez-vous à leurs symboles : la ZAD du Chammet, etc. La peur doit changer de camp ! » Cet inquiétant post Facebook était aussitôt liké par son ami ex-député macroniste Jean-Baptiste Moreau. Et peu après, une nuit de février 2023, les vitres d’un logement étaient effectivement explosées au Chammet, dans ce plateau de Millevaches où les fachos se lâchent de plus en plus. En février 2023 également, Alix Vermande, un militant du Figaro, publiait des photos du site dans un pamphlet à charge contre « l’ultragauche » qui « perturbait la tranquillité du Limousin ». Un stéréotype médiatique que le RN et ses alliés, de Lenoir à Retailleau, reprennent naturellement.J.-N. M.
En 2004, Hélène Domayala a réalisé pour le compte du parc naturel régional un "état des lieux des ressources culturelles" sur le plateau. Sans être totalement exhaustive son enquête balaie largement le champ culturel local sous ses formes les plus variées. Salles polyvalentes, lieux de diffusion spécialisés, art contemporain, musées, cinémas, bibliothèques, musique et chants, danse et médias sont auscultés assez précisément pour connaître ce qui se passe dans ces divers domaines. Les points faibles de chacun de ces secteurs sont relevés et quelques pistes d'actions sont proposées pour y remédier. Parallèlement à cette enquête deux autres études plus spécifiques sont en cours. La première, réalisée par la Scène nationale d'Aubusson établit un diagnostic technique de 23 salles de représentations de spectacles sur le plateau (4 en Haute-Vienne, 8 en Creuse et 11 en Corrèze). Les premiers éléments de ce travail mettent en évidence que la plupart des salles dans leur état actuel ne sont pas adaptées pour recevoir un spectacle et qu'elles doivent donc être réaménagées différemment.
Le second diagnostic, confié à l'Institut d'Etudes Occitanes, concerne le recensement des acteurs qui travaillent sur la langue et la culture occitane.
Mais l'état des lieux des ressources culturelles ne s'arrête pas aux salles et aux structures. Chacun sait qu'en la matière les acteurs, hommes et femmes, associations et groupes, sont plus importants ! Dans une seconde partie, sont donc étudiées les "ressources humaines" et les "actions culturelles" existantes : festivals (18 recensés), évènements culturels, pratiques amateurs et actions artistiques à destination des jeunes et des enfants. Enfin, un dernier chapitre fait un tour d'horizon des ressources et actions en terme de patrimoine.
Hommage est rendu aux associations : "Leur rôle est important car elles prennent le relais des pouvoirs publics dans le cadre par exemple de la diffusion de la culture, elles contribuent au renforcement du lien social au sein d'une population très dispersée et enfin elles défendent l'identité des populations locales et la pluralité de la culture".
A la suite des rencontres RELIER, une vingtaine de personnes intéressées pour développer des initiatives culturelles sur le plateau se sont réunies à deux reprises ces dernières semaines. Elles désirent échanger sur leurs projets, leurs
difficultés et leurs envies et envisagent de renouveler en septembre prochain un événement culturel comme celui organisé fin septembre dans le cadre des rencontres nationales Culture et Ruralité.
Soucieux de mieux se tenir au courant des initiatives des uns et des autres ce collectif informel d'acteurs culturels du plateau s'est constitué une liste internet de diffusion de l'information interne baptisée : Cette adresse e-mail est protégée contre les robots spammeurs. Vous devez activer le JavaScript pour la visualiser.. Par ailleurs le site millecultures.net lancé par Télé Millevaches et Activeprod s'est également associé à cette démarche.
Le groupe, largement ouvert, poursuivra ses réflexions dans les prochaines semaines. Vous pouvez le rejoindre.
La vie culturelle en France est foisonnante, tout le monde nous l'envie.
Toutes ces créations, toutes ces compagnies, tous ces théâtres, et pourtant toute cette vie culturelle est plate, terriblement plate, désespérément conformiste, formatée, attendue. Pourquoi si peu de secousses ? Si peu d'étonnement ? Explications :
Quelle municipalité, quel ministère, aurait envie d'attribuer une subvention à Antonin Artaud ?
On lui demanderait un dossier 21 x 29,7 avec ses intentions, et un budget dans lequel il lui faudrait montrer ses partenaires, scènes nationales, festivals, il aurait rendez-vous avec le maire qui ne sentirait pas ce créateur assez proche des électeurs. Il ferait un peu peur avec son regard étrange. On ne voudrait pas de lui non plus pour les animations scolaires de classe A 3.
Et voilà pourquoi aujourd'hui l'avenir appartient aux artistes propres sur eux, ne faisant pas trop de vagues, tranquilles, et sachant surtout ficeler de solides dossiers rassemblant de bons partenaires.
Pour avoir un compte rendu des rencontres RELIER des 24, 25 et 26 septembre 2004 sur le plateau il faut lire le dernier numéro d' Alternatives Rurales qu'on peut se procurer auprès de Peuple et Culture, 108-110 rue St Maur, 75011 Paris, tel : 01 49 29 42 80. La revue Cassandre a publié deux numéros sur les initiatives culturelles en milieu rural, en donnant la part belle à de nombreux témoignages, sous le titre : "Retour aux sources rurales". Ce sont les numéros 52 (mars-avril 2003) et 53 (mai-juin 2003) qu'on peut se procurer pour 5,5 euros chaque numéro auprès de Co-Errances, 45 rue d'Aubervilliers, 75018 Paris, tel : 01 40 05 04 24.
Cette agréable revue offre avec ces deux numéros un bouquet d'articles qui prouve la vitalité, le dynamisme et l'inventivité des campagnes en matière culturelle. Festivals, théâtres, associations d'éducation populaire, artistes installés à la campagne, fêtes ou musées, il y a de quoi glaner tout au long de ces pages. La devise de Cassandre : "l'art principe actif", n'est pas volée !
Une autre revue, éditée conjointement par les Ministères de la culture et de l'agriculture mérite de retenir l'attention. Son titre : Champs culturels. Si de nombreuses initiatives, menées tout particulièrement dans les établissements d'enseignement agricole, y sont présentées, la revue ne craint pas d'aborder les problématiques les plus larges qui traversent le domaine culturel. En témoignent les trois derniers numéros dont les thèmes sont : "Corps, art et culture" (en 2002), "Arts, sciences, culture et technologies" (2003) et "Jardins et création" (2004).
Pour se procurer ces numéros, il faut s'adresser en Limousin à Elisa Goulier : lycée des Vaseix, 05 55 48 44 00.
Après 25 années d'agriculture, j'ai cédé mon exploitation de production de petits fruits à un jeune agriculteur. Le temps de la retraite n'étant pas encore venu, il me fallait envisager une autre activité professionnelle. C'est dans cette perspective que depuis quelques temps un travail autour des livres me trottait dans la tête. En effet, ils font partie intégrante de mon univers tant pour leur contenu que pour l'objet qu'ils représentent. L'envie de transmettre ma passion de la lecture m'a conduit petit à petit vers le projet d'ouverture d'une librairie. Une opportunité de boutique à Eymoutiers, petite, mais avec des volumes intéressants et bien placée s'est présentée. Quelques mois de travaux et la librairie "Passe-temps" s'est ouverte fin mai 2004.
J'ai choisi de proposer des livres neufs et d'occasion, un peu d'ancien pour le plaisir. L'espace restreint m'oblige à opérer un choix minutieux en fonction de mes goûts, de l'actualité et des conversations avec les gens. Je commande aussi tous les ouvrages que les clients souhaitent lire. Le livre d'occasion permet de remettre dans le circuit quelques titres oubliés.
A l'étage une petite galerie d'exposition offre un espace à des artistes afin qu'ils montrent et qu'ils partagent leur création avec des gens et d'autres artistes. Raymond Valente a été le premier à présenter un travail sur son appartement avec des dessins en relief. Cet été, Golo, dessinateur de bande dessinée qui vit au Caire nous a fait découvrir la vie bouillonnante d'une ville égyptienne. Puis Isabelle Rousseau a présenté un travail très rigoureux qui demande qu'on s'y attarde et qui apporte beaucoup de sérénité.
Deux soirées ont eu lieu en octobre et en décembre. Chacune d'elles a permis à une vingtaine de personnes de découvrir et d'échanger à propos de René Char, puis du roman policier. Au cours de l'année 2005, plusieurs rencontres sont prévues : soirée mathématique, poésie, polar, conte.
En définitive j'espère pouvoir créer un lieu, une petite poche de résistance où il peut faire bon passer même quelques instants.
Les rencontres nationales sur le thème "culture et ruralité", c'était du 24 au 26 septembre 2004 sur le plateau.
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Une idée simple : sortir le théâtre et les mots des lieux convenus et permettre ainsi au plus grand nombre de se les approprier. Faux la Montagne accueillera donc durant trois jours des auteurs, des metteurs en scène, des comédiens. Il s'agira avant tout de favoriser la rencontre et l'échange de créateurs et d'une population qui accueillera chez elle (pour l'hébergement) ou qui mettra à disposition un garage, une grange ou un jardin (pour les représentations).
Metteur en scène, comédien, j'ai, au fil des années, mis en place plusieurs projets de compagnies, créé différents espaces de création, additionné un certain nombre de postes dans différents services culturels (programmation et développement). Je suis, depuis sept années, un creusais saisonnier qui sillonne la région, curieux des lieux et des gens qui y vivent. C'est ainsi que j'ai découvert Faux La Montagne et ses environs. Depuis quelques temps, je cherchais un endroit où construire un projet de rencontre culturelle. Une fois pris un certain nombre d'informations nécessaires à la mise en place de ce type de projet, je rédigeai une première esquisse et considérai Faux La Montagne comme une terre d'accueil possible. Ma rencontre avec le Maire et son adjointe devait très vite confirmer mes impressions.
L'essence du projet : un énorme désir de rencontre et de partage. Ca pourrait s'intituler : paroles estivales, variations théâtrales... Une rencontre de L'homme et de sa parole. Il y serait question de mots et d'usage de mots. Un univers festif avec comme toile de fond, un carré de verdure, un jardin potager, un banc public, une forêt de feuillus, une grange... Des lieux insolites où il ferait bon se rencontrer, où l'on prendrait le temps de distiller les mots de porteurs d'histoires venus d'ici et d'ailleurs.
A l'heure où je rédige ces quelques mots le projet est devenu réalité, il s'intitule "Folie les mots... ". Un groupe s'est constitué, le bénévolat est de rigueur même si une aide financière (au total 800 euros), nous a été généreusement allouée par la commune et l'association culturelle et sportive de Faux la Montagne. De nombreux artistes nous ont rejoint au nom d'un militantisme des mots, la population est mise à contribution, chacun s'investit avec ce qu'il sait faire et rien ne serait possible autrement. La Bibliothèque départementale de prêt, la Maison des auteurs des Francophonies du Limousin nous soutiennent et participent au projet.
J'aime à penser que ce projet est et restera une terre des possibles et donc de découverte (les spectacles sont pratiquement tous des créations). Ce sera n'en doutons pas trois jours de folie. Les mots seront à la fête et feront tourner à plus d'un la tête !
De la production de chanvre, on tirait des fibres textiles servant à fabriquer le linge d’utilisation courante pour la famille : draps, chemises, torchons, cordages. Vers 1900, sa culture occupait environ 1 500 hectares en Haute-Vienne, sur une surface globale cultivée de 549 000 hectares. À titre de comparaison, le lin n’occupait que 88 hectares. D’après le Larousse Agricole de 1921, qui donnait les rendements à l’hectare, on peut évaluer la production de chanvre en Haute-Vienne à environ 13 000 quintaux de filasse et 6 800 quintaux de graines. À cette époque, les échanges commerciaux s’étaient développés. Mais, sans doute plus par tradition que par nécessité, les paysans limousins continuaient à cultiver le chanvre pour le travailler et fabriquer les vêtements de base. Jusque dans les années 1870, il semble que tous les moyens étaient mis en œuvre pour vivre en quasi-autarcie, surtout dans les régions les plus pauvres. C’étaient les mêmes hommes qui labouraient la terre, semaient le grain, le récoltaient et le faisaient moudre, fabriquant ensuite le pain. Chaque maison possédait un four. Les femmes, elles, étaient peigneuses de chanvre, fileuses, couturières et cuisinières. Pendant des centaines d’années, cette population a vécu sans échanges suivis, ni avec les villes régionales, encore moins avec les provinces voisines.
C’est à la fin du XIXe siècle que les mentalités commencèrent à changer : les communications devenaient plus faciles et la révolution industrielle était en marche. On commença ainsi à vouloir porter d’autres habits que ceux fabriqués localement, essentiellement à partir du chanvre. Cela entraîna une décroissance rapide des surfaces cultivées en France : 20 000 hectares en 1904 (à comparer avec les chiffres limousins), 12 000 en 1913. En Haute-Vienne, il ne restait que 16 hectares de chènevières en 1929 !
Chaque ferme ou presque possédait sa chènevière (chenebieras en langue limousine). Il suffit de consulter les anciens cadastres pour s’en persuader. C’était une parcelle de petite taille, située le plus près possible de la maison d’habitation. En effet, les oiseaux, domestiques ou sauvages, étaient friands des graines. La proximité des habitations avait un avantage évident : les enfants ou les femmes, tout en surveillant le bétail ou en cousant ou filant, pouvaient éloigner les dévoreurs de graines en les effrayant. La plante ne poussait bien que dans les terrains relativement humides, soigneusement préparés, labourés et bêchés le plus profondément possible, puis richement amendés. On y enfouissait les fumiers les plus riches en matières azotées et potasses (fumiers de volaille, brebis ou lapin). Il semble également que cette culture nécessitait un chaulage généreux.
Il convenait ensuite d’achever la préparation des parcelles, en brisant les mottes résultant du bêchage, puis en éliminant au maximum les cailloux et mauvaises herbes. Le chanvre avait aussi des ennemis : la grande cuscute, parasite voisin du liseron, et l’orobanche rameuse. Cette dernière, dépourvue de chlorophylle, puisait sa nourriture dans les racines de ses plantes-hôtes. Lorsque les risques de gelées tardives avaient disparu, on pouvait procéder aux semis. La croissance de la plante étant achevée en deux mois, la récolte pouvait commencer à la fin du mois d’août. Elle se déroulait en deux étapes : on arrachait d’abord les pieds mâles et on laissait les pieds femelles quelques jours supplémentaires pour permettre aux graines de mûrir. Ces dernières, appelées « chènevis », devaient provenir de semis clairs et avoir une couleur gris brillant. C’étaient les gages de bonne qualité des graines qui servaient de nourriture aux volailles et oiseaux de volière. Elles servaient aussi de semences l’année suivante, soit dans la même chènevière, soit en échange avec un autre producteur, pour « changer l’espèce ». Les tiges, assemblées en bottes et liées en trois endroits, étaient ensuite portées au rouissage.
Le but premier du rouissage était de séparer les fibres textiles du chanvre des substances pectiques qui les agglutinent dans les tiges des plantes. L’opération était rendue possible par les actions conjuguées de plusieurs bactéries évoluant en milieu humide. Une fois l’opération terminée, les fibres pouvaient être isolées.
Il existait un rouissage industriel, mais nous ne parlerons ici que des trois autres techniques naturelles : à l’eau courante, à l’eau dormante et sur la terre, ce dernier mode étant aussi appelé « à la rosée ». Dans ce dernier cas, les tiges étaient étalées en couches minces sur une surface végétale vivante : chaume de céréales ou de prairie. Le rouissage se produisait sur la surface des tiges en contact avec le sol, il fallait donc les retourner pour compléter l’opération.
Le rouissage à l’eau courante était plutôt employé dans les régions du nord, comme la vallée de la Lys. Les bottes, confectionnées de la même façon qu’en Limousin, étaient mises à tremper, soit dans de grandes constructions à claire-voie, soit dans des enceintes faites de pieux plantés dans le lit de la rivière. Quand l’égouttage était jugé suffisant, on déliait les tiges, qui étaient dressées en faisceaux pour achever leur séchage. On faisait de même après le rouissage à l’eau dormante, le plus couramment utilisé en Limousin. Il se pratiquait dans des mares où les bottes étaient immergées dès la récolte. Le rouissage devait être suffisant en deux ou trois semaines quand les tiges se détachaient facilement sur une longueur supérieure à 10 cm. Ce procédé dégageait des odeurs très désagréables. Le Larousse médical de 1921 mettait d’ailleurs en garde contre les dangers du rouissage : maux de tête, vertiges et vomissements.
On appelait teillage, qui ne pouvait commencer qu’avec des tiges parfaitement sèches, le traitement suivant : si le séchage à l’extérieur n’était pas suffisant, on le complétait dans un endroit intérieur, mais peu chauffé, pour éviter l’altération des fibres. Venait enfin le broyage à l’aide d’une lourde machine, appelée broie. Manoeuvrée à la main, ses deux lourdes mâchoires s’encastraient et brisaient totalement les tiges. L’écancage avait pour résultat de débarrasser les fibres textiles du bois subsistant au passage dans la broie. On utilisait un outil de même type que la broie, appelé bargue, qui était plus précis, ses mâchoires s’encastrant dans des espaces plus fins. Les restes de bois étaient ainsi séparés de la filasse. Le peignage enfin consistait à passer la filasse entre des piques de fer, nombreuses et serrées, plantées sur une planche.
Au terme de ces étapes bien distinctes, le chanvre pouvait être filé. Auparavant, on classait les produits obtenus en trois catégories : le brin servait à fabriquer les lingeries les plus fines, comme les chemises. Les étoupes constituaient la matière première du linge de maison, par exemple les draps. Le produit le plus grossier était utilisé pour les cordages.
Evidemment, seuls les brins et les étoupes étaient filés. Les femmes se chargeaient de cette tâche effectuée de manière complètement artisanale. Dans son livre La société rurale traditionnelle en Limousin, Albert Goursaud décrit ce travail. La fileuse attachait la filasse à une quenouille, puis se munissait d’un fuseau en bois très léger, lequel était surmonté d’une coche en fer. Sur cette dernière était façonnée une rainure terminée par un petit crochet.
Prenant entre ses doigts une petite partie de la filasse, la fileuse commençait par confectionner un fil grossier. Une fois ce dernier fixé au crochet, il fallait faire tourner le fuseau très rapidement, de manière à tordre ce fil sur toute sa longueur, tout en l’amincissant. Le fil devait être humidifié avec la salive de l’ouvrière. Pour obtenir plus de salive, elle suçait soit une noisette, soit un noyau de prune, voire une châtaigne sèche. Quand un fuseau était plein, on préparait le suivant après avoir retiré la coche du fuseau garni.
Le fil, lavé et blanchi, puis séché une nouvelle fois, était conditionné en pelotes, prêtes dès lors à être travaillées par les tisserands. Chemises, draps, torchons ainsi tissés avaient une solidité indiscutable, aux dires des usagers. Ces derniers avaient cependant le souvenir d’un manque de souplesse, les tissus étant encore plus rêches que ceux appelés « métis ».
On a longtemps connu les veillées limousines, instants de convivialité et de repos largement mérités. Dans ces veillées, autour du « cantou », les « gnôrles » (nhôrlas) fusaient, des mariages se concluaient, les légendes locales se transmettaient, de préférence l’hiver quand les jours sont plus courts. À certaines occasions, on utilisait une machine appelée « grille-orge », ou plus généralement « grille-grains ». Des anciens ont rapporté qu’elle servait à griller des graines de chanvre. L’origine de cette pratique est amusante, mais ce n’est qu’une hypothèse. Des soldats des guerres napoléoniennes auraient vu d’autres peuples procéder de cette façon. N’auraient-ils pas confondu le chanvre cultivé en Limousin (cannabis sativa) avec le chanvre indien (cannabis indica) ? Plus sûrement, il faudrait reconnaître à nos ancêtres un don d’essai et de comparaison. Une telle machine était en effet déjà utilisée pour griller orge et blé, appréciés à ce stade. Les paysans les mangeaient ou les mâchouillaient à la manière de chiques. On mettait des braises dans la partie du demi-cylindre percée de trous, la combustion des braises était ainsi activée et les trous laissaient tomber la cendre. Les graines chargées dans le cylindre, actionné par une petite manivelle, étaient grillées régulièrement. Cet usage a été pratiqué assez longtemps en Limousin. Il est perdu depuis près de 80 ans, mais la mémoire collective n’a pas effacé une autre pratique : un ersatz de café, était obtenu dans cette même machine, à base de glands ou orges grillés.
A l'origine de cette initiative, la présence d'une forte identité culturelle liée aux savoir-faire et aux métiers d'art, l'installation récente de jeunes entreprises dans le secteur de la création et la volonté de soutenir activement cette dynamique par l'ouverture et le croisement avec de nouvelles pratiques.
Quartier Rouge se propose donc d'accueillir des artistes et des projets dans une optique d'échange, de rencontre et de coopération. Cette invitation, autant tournée vers les artistes que vers la population et les acteurs locaux, cherche à produire les conditions nécessaires à un enrichissement mutuel.
L'objectif est d'accompagner, par le biais d'initiatives artistiques et culturelles, la dynamique de développement présente sur le territoire et de proposer à ses habitants une offre culturelle ouverte de qualité.
Autour de chaque projet s'articulent des phases de réflexion, de production et de diffusion.
La vocation de Quartier Rouge est d'être un outil de développement culturel dont l'action se situe sur le plan de l'intégration de projets dans une réalité locale, qu'elle soit culturelle, sociale, géographique ou économique.
Envisagé comme le point de départ nécessaire à toute action, cet axe s'appuie sur les expériences et les réflexions menées dans ces différentes directions par les acteurs locaux (collectivités locales, associations, entreprises, artisans, habitants …) tout en invitant des intervenants extérieurs spécialisés à participer à ces réflexions. (Thèmes de réflexion : Mutualisation et mise en réseau - Richesses et identités locales - Valorisation du patrimoine - Développement du territoire - Processus artistique et contexte de production - L'art et ses lieux de représentation,…)
En lien avec le volet de recherche, Quartier Rouge active son engagement en faveur des artistes contemporains à travers la production et la coproduction d’œuvres pouvant toucher à des domaines artistiques variés.
Deux axes sont envisagés :
L'objectif dans les deux cas est de proposer un contexte dynamique de création et de susciter l'échange et l'ouverture par le croisement des pratiques et de l'environnement de chacun, qu'il s'agisse du public, des acteurs locaux, ou des artistes invités.
En écho aux deux axes précédents, il s'agit de mettre en oeuvre pour chaque projet un dispositif de diffusion cohérent et adapté permettant de proposer à la fois :
Cette programmation donne ainsi lieu à différents types d'événements : débats, colloques, expositions, concerts, spectacles, projections,…
Du 28 juillet au 28 août 2007, l'exposition "de passage…" pensée comme les pages d'un livre à venir, présentait les photographies et les textes de Benjamin Dubourg. A travers ses photographies et ses mots Benjamin nous invitait à partager un regard humaniste sur tout ce qui fait notre quotidien ici et ailleurs.
Qu’on l’appelle patois, langue d’oc, limousin, la vieille langue parlée dans la région, c’est l’occitan.
Comme le catalan, le portugais, le sarde, le corse, l’italien, le roumain, l’espagnol, le franco-provençal, le rhéto-roman ou le français, l’occitan est une langue romane qui résulte d’une transformation progressive du latin populaire importé lors des conquêtes romaines.
Cette altération étalée sur près de dix siècles est le fait des survivances linguistiques héritées de peuples antérieurs à la romanisation et des modifications postérieures à l’implantation latine imposées par les différents peuples d’envahisseurs du début de notre ère.
Le morcellement à l’infini semble être l’état naturel de tout langage, les frontières linguistiques sont rarement rigides et proviennent parfois d’interventions historiques et politiques. Ainsi le français parlé en Poitou n’est pas le même que celui parlé en Wallonie. L’occitan est lui aussi fragmenté en dialectes (Auvergnat, Limousin, Vivaro-Alpin, Languedocien, Provençal, Gascon) ce qui n’empêche pas l’intercompréhension. Cette langue est parlée dans trente trois départements du sud de la France, une douzaine de vallées alpines d’Italie et dans le Val d’Aran en Espagne.
A partir du 10ème siècle l’occitan s’est imposé comme une grande langue de culture à l’influence européenne, à travers la littérature des Troubadours dont les premiers et plus célèbres sont limousins (entre autres Bernart de Ventadour, Gaucelm Faidit, Bertrand de Born).
L’occitan n’était pas uniquement réservé pour la création littéraire mais aussi dans la vie de tous les jours (actes notariés, chartes des villes) .
L’ordonnance de Villers-Cotterêts du 10 août 1539 imposa l’usage du français dans tous les actes administratifs et juridiques et accéléra, du même coup, la disparition des langues locales dans le domaine de l’écrit.
L’occitan restera cependant la langue d’usage de la grande majorité des limousins jusqu'à la première moitié du 20ème siècle et, à ce titre, partie intégrante de leur identité.
Après une période de fort déclin, elle est encore présente aujourd’hui et la population y est attachée.
L’occitan (appelé “patois”) éveille un fort courant de nostalgie chez les anciens, on regrette sa future disparition. Cette nostalgie trouve son origine dans la blessure encore vivace provoquée naguère par l’interdiction de parler “patois” à l’école. Mais force est de constater que ces regrets s’accompagnent le plus souvent d’un fatalisme, voire d’un sentiment d’impuissance face à la disparition progressive de la langue d’Oc.
Sa situation dans la zone de la montagne limousine est néanmoins très fragile et appelle des actions de sensibilisation, de valorisation et de re-dynamisation.
Lorsqu’en 1998, un petit groupe de personnes décida de remettre sur pied et de professionnaliser l’association “Institut d’Etudes Occitanes du Limousin”, il y eut beaucoup de sourires en coin, voir de franches rigolades. Cependant le constat que nous pouvons faire quatre ans après est loin d’être négatif et dépasse largement nos espérances.
Nos inspirateurs furent l’Institut d’Etudes Occitanes du Cantal, qui, à cette époque, par son dynamisme, son champ d’action, faisait figure de modèle.
Le potentiel patrimonial culturel de la Haute-Auvergne nous semblait fabuleux, nous ne nous rendions pas compte qu’on avait la même richesse sous nos pieds : pays à forte tradition, riche littérature. Partout dans l’espace occitan, nous avons rencontré des volontés identiques et la même motivation.
Dans un premier temps il a fallu motiver les vieux militants, les encourager à nous donner la main (certains ont tout de suite compris l’enjeu), tisser des réseaux, se faire connaître par les institutions et avant tout définir nos axes de travail et d’actions.
En avril 2007, suite à la triste disparition de Huub, l’association Appelboom constitue une nouvelle équipe. Fidèle à la notion de transdisciplinarité, elle choisit des artistes dont le travail se fonde sur une certaine porosité avec le contexte dans lequel ils envisagent ou réalisent leur travail. Ainsi, Appelboom s’affirme avant tout comme un lieu d’expérimentation dédié à la jeune création où les propositions artistiques sont envisagées dans un aller/retour avec le territoire et ses habitants et met en place un programme annuel qui alterne résidences d’artistes, concerts et ateliers pédagogiques.
La nouvelle équipe achève sa première saison. Une saison qui a parfaitement su s’ancrer au territoire.
Le projet de Jacques Loeuille est à l’image de cet ancrage. Ce jeune artiste vit et travaille à Lille et définit “sa pratique de la vidéo comme des films d’artistes à caractère documentaire“. Fin 2007, il répond à l’appel à résidence lancé par l’association et propose un projet de vidéo dans lequel il dégagera le contenu narratif des images quotidiennes du Plateau de Millevaches.
Jacques Loeuille échelonne ses séjours à La Pommerie d’avril à novembre 2008 au cours desquels repérage et définition précise du sujet de la vidéo laissent place à la prise de vue et à la construction même de l’œuvre. Puisant dans la réalité un potentiel narratif, Jacques Loeuille s’intéresse aux stations essence désaffectées et réinvesties du Plateau de Millevaches. Il construit ainsi une dramaturgie en dialogue avec le territoire et ses habitants qui prend la forme d’un documentaire de 35 minutes : Essence Ordinaire.
Jacques Loeuille nous parle de son film : “Quiconque pratique les routes nationales connaît ces stations abandonnées qui constellent le réseau routier de France ; la célèbre nationale 7, la pittoresque nationale 20, la froide nationale 17 abritent ces bicoques de verre, de tôles, de masses maintenant poussiéreuses ou moussues et qui semblent dévier de cette route où elles furent jadis appontées. Toutes véhiculent cette indiscernable et singulière saveur qui nourrit la légende de la route en l’ornant de petits satellites abandonnés.
Mais quiconque est étranger au plateau de Millevaches et à ses routes communales et départementales qui strient un paysage plié, ignore sûrement que ces stations délaissées ailleurs sont ici le point d’approvisionnement du pays.
Le caractère de ce paysage échancré et dépeuplé conditionne, on s’en doute, une adaptation du commerce. Les stations qui restent ne peuvent pas vivre seulement de la vente de carburant et doivent cumuler des activités pour joindre les deux bouts ; et ces activités transforment ces stations en véritables cavernes d’Ali Baba qui ne se dévoilent souvent qu’à celui qui veut bien pousser la porte. Mi-caverne, et mi-souk parfois, ces stations partagent un certain secret allant parfois jusqu’à la pudeur. La présence de ces commerces multiservices témoigne manifestement d’une disposition espiègle au bric et broc de laquelle émerge une tension poétique.
C’est sur cette poésie du commun que je souhaiterais me focaliser.“
Essence Ordinaire a été programmé à La Pommerie et dans les cinémas de Tulle, Eymoutiers, Neuvic et Aubusson du 19 au 22 novembre 2008, dans le cadre de Pause, événement vidéo initié par 5,25-réseau d’art contemporain en Limousin et dans le cadre du mois du film documentaire. Suivie chaque fois d’une discussion avec Jacques Loeuille, la projection d’Essence ordinaire a également donné lieu à la programmation de films sélectionnés par l’artiste, différents pour chaque soirée, et qui ont influencé son travail d’une manière ou d’une autre.
L’accueil de Jacques Loeuille à La Pommerie a donc permis à l’artiste de disposer de moyens financiers et de temps pour réaliser un film, mais aussi d’inscrire sa démarche artistique au cœur du territoire. Ainsi, dans une volonté de médiation et de sensibilisation à l’art contemporain, l’association a créé les conditions favorables à la rencontre entre le réalisateur et le public, en cours et en fin de processus de création.
Appelboom-La Pommerie prépare désormais la saison 2009 au cours de laquelle elle proposera 3 résidences dans les domaines de l’art sonore et des arts visuels, des événements musicaux et performatifs à La Pommerie et ailleurs, et des ateliers pédagogiques.
Je l'ai connue aussi la "grande nuit" de la Montagne limousine ! C'est dans les années soixante que je l'ai ressentie avec le plus de douleur. Nous avons très mal vécu les volets fermés, les maisons abandonnées, les boutiques vieillissantes, l'éclatement géographique des grandes familles, le repli des foyers chacun chez soi, l'extension des grandes plantations de résineux se rapprochant de plus en plus de nos villages. Aussi pénibles ont été la mort des fêtes de villages et des bals ou, de manière pathétique, leur tentative de maintien alors que ce qui leur donnait vie avait disparu, les départs au collège et au lycée qui débouchaient sur les emplois urbains. Et puis, peut-être le pire, après quelques paroles citadines ironiques de temps à autre, l'enfant qui a presque honte d'être d'ici. Tout ceci et d'autres choses ont fait que les hautes terres limousines allaient connaître le long hiver, le dernier soubresaut croyions-nous, la mort dans l'âme.
Bien sûr il y avait bien longtemps que le déclin de la civilisation qui lui donnait vie avait provoqué le début de son agonie, mais avec la modernisation de l'agriculture des années soixante, la réduction accélérée de la diversité sociale, la dernière étape de l'exode rural, nous arrivions au bout du voyage.
C'est pour cela que je lis parfois Richard Millet. C'est aussi plus généralement pour son souffle romanesque, même si je ne partage pas son pessimisme profond et systématique. Son écriture trouve un écho en moi, moins à propos des relations humaines que vivent ses personnages et que j'ai vécues autrement, que d'une atmosphère générale mettant l'accent sur un monde allant sur sa fin et que je connais bien.
Et pourtant j'éprouve de la colère à l'encontre de ce qu'il a écrit dans le Nouvel observateur (voir IPNS n°8). Il nous faut donc encore et encore lutter pour dire notre vérité. A chacun la sienne !
Je pense que cet écrivain n'a pas senti que quelque chose de vivant était à l'œuvre. Il ne suffit pas d'être écrivain ("Nous le savons bien nous autres écrivains") pour toujours sentir et comprendre mieux que les autres, même si c'est souvent le cas. S'y mêle aussi, et c'est ce qui fait l'intérêt de son oeuvre, une désespérance personnelle qui, sans doute, lui masque bien des choses. J'ai le sentiment que cet auteur projette sur une région et ses habitants ce désespoir intime. Mais c'est aussi faire comme si la liberté, l'engagement, la vie, de ceux qui l'habitent ne comptaient pour rien. Il ne faut donc pas s'étonner qu'en le publiant dans la presse il entraîne colère et réactions.
Partir, ne pas oublier, revenir, comprendre, agir, ne pas maudire, il y a pourtant du monde ici à qui ces verbes pourraient s'appliquer. S'agit-il seulement de Don Quichotte ?
Oui les forces de mort n'ont pas disparu. Cependant la vie sociale, la conscience collective, l'imaginaire des habitants des hautes terres, fécondent en même temps de la vraie vie, une vie différente fondée sur d'autres valeurs et d'autres formes de liens sociaux.
Bien sûr la mondialisation sous direction américaine homogénéise les modes de vie, tend à gommer les différences culturelles, à rendre marchands la plupart des aspects de la vie sociale. Dans ce "jeu" là la Montagne limousine ne pèse rien. Mais en même temps cette tyrannie des marchés donne aussi paradoxalement naissance à de la vie, comme un antidote.
Oui la civilisation rurale des 19ème et 20ème siècles est bien morte, et le pire, la presque non-existence de ce territoire n'est pas impossible. Mais sur ce terreau hommes et femmes (mais oui ils sont là, et bien que pas nombreux, bien vivants !) sont en train d'inventer ici aussi une autre civilisation, intégrée à la mondialisation, mais donc aussi ouverte, plus mobile, où des initiatives fleurissent, imaginatives, créatives, et pas forcément naïves.
L'un des domaines, le plus révélateur selon moi, où naissent ces initiatives est celui des festivités. En effet "elles permettent aux collectivités de se mirer dans ce qu'elles sont ou projettent d'être, dans l'image de la perfection qu'elles prétendent détenir ou qu'elles cherchent à atteindre. Les fêtes sont là aussi pour créer de l'entre soi" (Anne Marcovich, A quoi rêvent les sociétés ? Editions Odile Jacob).
La quasi-disparition des pratiques festives anciennes est très révélatrice du déclin mortel de toute la vie passée. Leur régénération actuelle sous d'autres formes me semble la pointe la plus visible d'une possible renaissance. Elle peut permettre aux habitants de la Montagne limousine membres de cette société locale, elle-même immergée dans un tout plus large, de prendre conscience qu'elle existe et fait partie d'une entité qui a ses propres ressources tout en étant reliée aux autres.
Créateurs et amateurs de musiques et de spectacles s'y répandent. Il n'y a qu'à voir comment les jeunes se rassemblent sur nos terres limousines dans les tout petits villages pour écouter et voir les artistes d'autres cultures : par exemple les musiques tsiganes de grand niveau, les chants et danses de flamenco revus par des madrilènes issus de la danse contemporaine, ou les chants du Fado. Ils se déplacent nombreux aussi pour des groupes de rock locaux ou non et de musiques "traditionnelles" rénovées et revisitées. Après la tentation du "bon vieux temps" et de la mise en musée de cette musique, beaucoup s'autorisent maintenant à innover, créer, aller dans le présent et l'avenir, en intégrant de nouvelles sonorités, et en s'ouvrant à d'autres univers musicaux.
Des auberges jusque là en déclin commencent ici et là à se régénérer, parfois avec de nouveaux patrons venus de loin, à l'image de cette mobilité géographique qui fait partie désormais de nos vies. Des concerts s'y déroulent tout l'hiver et rencontrent un tel succès que si l'on ne réserve pas on n'a aucune chance de trouver une place tellement elles sont pleines à craquer ("Les Bistrots d'Hiver"). Des spectacles de toutes sortes, et pas seulement l'été, et pas seulement pour les touristes, mais aussi pour eux, sont créés toute l'année. Il existe en effet à la fois des pôles culturels et une multiplicité de lieux qui travaillent davantage en synergie (même si ce n'est pas toujours facile) comprenant qu'en s'unissant une nouvelle richesse se déploie avec plus de force. Et l'on est bien loin des grandes escadrilles du marketing culturel.
Avec des échecs et des réussites un nouvel univers se travaille et s'invente.
Rien n'est facile, rien n'est acquis, mais avec fragilité la vie est là qui germe. Ne pas voir cela aussi, c'est donner de la réalité une seule facette et donc tromper.
Dans ce long cheminement de l'imaginaire certaines visions que l'on croyait figées sont en fait travaillées par l'évolution globale. Je veux parler de ce repli de l'agriculture sur elle-même, de l'attitude de crispation d'une partie des agriculteurs celle là même qui tendait à repousser hors de nos terres toute autre initiative. Cette posture trace des frontières invisibles plus dures que du béton, une grande muraille de prison ! Il est vrai que beaucoup de citadins avaient et ont encore souvent une image bien irréelle et plutôt condescendante de la vie rurale. Ces imaginaires parallèles se renforcent mutuellement et créent un puissant frein au déploiement des initiatives. Mais les observateurs attentifs perçoivent au quotidien sur le plan relationnel comme dans des réalisations concrètes que ces barrières sont parfois poreuses. Nous ne sommes qu'au tout début de ce mouvement encore bien fragile et nul ne sait ce que réserve l'avenir. D'un côté, tirés par des lobbies les corporatismes résistent, enfermant les représentations dans un carcan, et de l'autre, les métiers se transforment et comme une vague soumettent lentement à l'érosion les visions caricaturales. Que sortira-t-il de ces forces contraires ? Le désert sous les résineux ou un patchwork dessiné par des activités multiples ? Tellement d'éléments peuvent faire penser que le combat est perdu.
Pourtant ce jeune souffle de vie est bien là qui pousse à inventer dans une société globale qui a des besoins auxquels on peut ici répondre en partie.
Il existe ici, sur nos hautes terres limousines, à la fois cette vie mondialisée qui se révèle par la consommation de produits mondiaux mais aussi, et c'est heureux, par les influences culturelles multiples, et en même temps l'émergence de cultures vivantes maintenant plus visibles bien que fragiles.
Nous savons bien les obstacles qui se hissent devant le déploiement de cette jeune énergie liée à l'ouverture culturelle. C'est pourtant un point d'appui générateur d'un nouvel imaginaire qui lentement se diffuse dans l'ensemble des activités.
En parlant d'écoles de danse de Madras, de clubs d'œnologie, d'élevages andalous, l'anthropologue Jean Pierre Warnier dit : "les sujets vivent mieux en dansant, en soignant du vin ou les animaux qu'en regardant les spectacles de marketing. Tous portent bluejeans et boivent Coca Cola, mais leur vie est ailleurs et /'observateur superficie/ n'y verra que du feu" (La mondialisation de la culture, Editions La Découverte).
Richard Millet n'est pas un observateur superficiel, ni des noirceurs de l'âme, ni de la fin d'une époque. Mais quelque chose se passe qui, peut-être, peut permettre dans la pensée et l'action de dépasser ce qui a fait notre douleur commune. Les hommes portent aussi en eux des facettes plus légères. Et la vie ne s'arrête pas au milieu du 20ème siècle !
Même étroites et soumises à des forces bien plus larges notre collectivité humaine dispose de marges de manœuvre si elle sait s'adapter aux opportunités.
Reconnaître ce qui existe dans sa complexité, comprendre, ne pas accepter, s'engager, c'est permettre de progresser. "Sans musiques, pas de rêves. Sans rêves, pas de courage. Sans courage, pas d'acte". Cette idée qui me semble si juste du cinéaste Wim Wenders, nous en avions fait notre devise avant même qu'il ne l'écrive récemment avec talent dans Le Monde.
Sur la Montagne limousine, il y a de la musique, des rêves, du courage, de l'action. Un nouvel imaginaire se développe, présent, vital, et qui trace le début d'un incertain mais possible avenir.
Le Limousin est mort ; c'est !'écrivain Richard Millet qui l'affirme. Il date même son décès : dans les années soixante. Reste une entité administrative. Mais son territoire n'a pas d'avenir parce qu'il n'a plus d'âme : déserté par l'imaginaire, il est incapable de produire une vraie culture. Le Limousin est une fiction; il n'existe plus.
Pour ceux qui, comme moi, vivent dans la Montagne limousine, la proclamation de Millet est rude. Nous donnons-nous à une illusion ? Défendons-nous une chimère ? J'ai lu et relu ses arguments. Ils sont vrais. Mais, en même temps, ils sont faux. Le Limousin a deux faces. Millet n'en décrit qu'une. Il ignore l'autre. Sa démonstration s'arrête à mi-chemin. Il croit mort ce qui est invisible de Paris.
Il est vrai que le verbe "limoger" résume un aspect de notre province. Il est synonyme de renvoi dans un lieu éloigné qui accepte les pires incapacités, parce que rien ne s'y passe jamais. Il vient, comme chacun le sait, de la première guerre mondiale. Le haut commandement mutait à Limoges les généraux qui avaient montré leur nullité sur le champ de bataille. Notre province leur a assuré une paisible fin de carrière. C'est une face du Limousin qui nous expose à la risée universelle. Jusqu'en Amérique, on connait cette expression. Il est dommage qu'elle cache une autre face, celle du sacrifice consenti par la jeunesse limousine à cette même guerre. Le plateau de Millevaches détient le record - horrible ou glorieux, comme on voudra - du rapport le plus élevé d'Europe entre le nombre de tués au combat et le chiffre de la population. Il a failli périr de son hémorragie. L'humble monument aux morts de Gentioux garde le souvenir de cette malédiction. En échange des officiers pleutres qu'elle accueillait sous la moquerie générale, notre terre a sans rien dire envoyé presque tous ses fils mourir en soldats de la liberté universelle.
Richard Millet cite l'escholier pédant de Rabelais, le Pourceaugnac de Molière, comme autres symboles du Limousin. Ils composent eux aussi la face ridicule de notre province, bien connue de tous les Français. Mais au premier, il faut opposer les grands papes que l'Eglise humiliée et exilée en Avignon est venue chercher chez nous. Au second, l'étonnant Turgot, qui a choisi notre terre pour expérimenter les idées les plus fécondes de son siècle. C'est notre autre face. On en parle peu. Elle n'est pas moins réelle que la première. Le Limousin ne se laisse pas enfermer dans une catégorie. Il est signe de contradiction.
Peu importe. Selon Millet, tous ces symboles appartiennent à un passé révolu. Il fixe son regard sur les années soixante. Il y voit l'exode définitif de notre paysannerie et en déduit que l'âme limousine a disparu avec elle. Mais, au même moment, l'art de la tapisserie brillait chez nous d'un éclat qu'on sait maintenant Immortel. Les plus grands peintres et les plus grands architectes se précipitaient à Aubusson et à Felletin - dans la "sinistre Creuse" 1 - comme vers un lieu unique de culture. Le Limousin ne mourait pas. Il passait une épreuve de contradiction aiguë.
Et aujourd'hui? Millet raille ces "lieux inaccessibles" qui s'étourdissent d'une activité culturelle artificiellement gardée en vie grâce aux deniers de l'Etat. Il moque ces élus qui savent si bien cacher leur invincible inertie sous un concert assourdissant de plaintes. C'est encore et toujours la face ridicule du Limousin. Elle s'impose aux regards. Un peu d'attention en fait découvrir une autre. Chez nous aussi, on volt avec inquiétude Paris, ce Paris auquel nous avons toujours confié notre part d'universel, en voie de provincialisation. Un empire, dominé par l'Amérique, le soumet à sa tyrannie financière et culturelle. Le recul de nos terres, leur pauvreté font qu'il tient le plateau de Millevaches pour négligeable et le laisse à sa solitude. Nous ne nous en offusquons pas. Nous utilisons la liberté qu'il nous laisse pour essayer d'autres manières de travailler, de vivre et d'imaginer. Elles seraient impensables à Paris. Peut-être échouerons-nous. Mais peut-être la force symbolique de notre recherche dépassera-t- elle les limites de notre modeste forteresse. Ce n'est pas la première fais que le cœur de notre province est le refuge d'une résistance et l'espoir d'un renouveau.
Nous étions tous réunis devant le fait accompli : manque important d’animation culturelle dans nos campagnes, surtout à la morte saison ; besoin évident de rencontres, de partages, d’expressions et de créations.
Aussi, en janvier 2000, Lez’Arts & Salamandre voit le jour, avec comme objectifs :
Bref, Lez’Arts essaye de contribuer à l’éveil culturel et citoyen ainsi qu’à la redynamisation d’un territoire rural.
Trois années se sont écoulées depuis et l’association a tracé son petit bonhomme de chemin, avec un atelier théâtre sur Lapleau, un atelier "jeux de rôle" à Egletons et différents événements, humbles et diversifiés alliant concerts, théâtre, conte, BD, photos, musiques électroniques, danse…
Lez’Arts tient de plus en plus a œuvrer dans un réseau d’associations, permettant la mise en place d’événements communs. Ceci afin d’unir les envies, les compétences, les volontés et les villages (comités des fêtes, mairies, associations locales). Ces partenariats permettent de proposer des spectacles de plus en plus riches, de qualité grandissante et ayant une "aura" que nous souhaitons assez grande pour réussir à intéresser un public le plus large possible.
Il est pourtant bien difficile de réunir des anciens, des jeunes, des personnes socialement et idéologiquement éloignées autour d’une même animation… Mais n’est-ce pas là la source de nos motivations ? N’est-il pas vrai que les utopies d’hier sont les réalités d’aujourd’hui ?
Cette difficulté reste un véritable défi et nous pousse à remettre en question ou à améliorer nos actions.
L’union, ce fil conducteur, nous a permis de rencontrer et de travailler avec de jeunes associations ("Les mauvais glaçons", "Composite", "L’Atelier Conte Corrézien"), des structures plus importantes ("La Luzège", le Foyer de Chanteix , la FAL, "Elizabeth My Dear"), et différents comités des fêtes. Tous ces acteurs locaux contribuent à la vie de nos campagnes… Campagnes souvent fatiguées par la routine sociale, l’ordre économique établi et l’abrutissement audiovisuel. Il est important de souligner aussi l’appui de nombreuses communes qui cachent derrière la rigidité de l’institution, des personnes plus ouvertes qu’on ne pourrait le croire - qu’elles en soient ici remerciées.
Aujourd’hui nous pensons que notre action contribue à une certaine qualité de vie en milieu rural. Nous sommes convaincus que nous devons rester nous mêmes, garder notre sens et non nous plier aux attentes des financeurs… Preuve est faite par la participation du public et l’augmentation du nombre d’adhérents !
Lez’arts & Salamandre, un tantinet non conventionnelle et militante, essaye d’avoir une démarche critique et constructive afin de mieux faire, mieux agir, mieux dire. Nous espérons rencontrer encore de nouvelles associations, de nouveaux amis et de nouveaux bonheurs ! Alors œuvrons, rencontrons-nous, pour que nos campagnes soient plus ouvertes et plus accueillantes. Otons de nos esprits, les mots concurrence, sectarisme, et transformons les en respect, tolérance, échange, cohésion... pour mieux vivre en ruralité !
Le Limousin intrigue et rebute, quand il ne prête pas à sourire : plus qu'une région, il est un désert vert, à peu près inconnu, un territoire maudit de l'imaginaire français. On n'y voit le jour que pour s'en aller, comme le cardinal Dubois a fui Brive, Giraudoux Bellac, Jouhandeau Guéret, Rebeyrolle Eymoutiers, Rohmer Tulle. Une terre inhabitable, que mes ancêtres quittaient pour aller travailler comme maçons à Paris ou négociants en vins à Bordeaux. Avec Guéret, Tulle ou Brive, Limoges, sa capitale, est un des symboles de l'ennui provincial : comment ne pas périr dans une ville qui a donné le verbe limoger ? Comment ne pas se souvenir du pédant charabia de l'escholier limousin de Rabelais ou du Limougeaud Pourceaugnac de Molière, parangon du ridicule de province ? Quant aux hommes politiques qui y naissent, ils continuent d'incarner le vieux rêve "rad'soc" d'une France où tout le monde serait de gauche, même à droite.
Voilà donc une région qui a rempli sa fonction de terre balzacienne : on nait en Limousin pour devenir Parisien, c'est à dire en reniant son origine provinciale.
On me dira que la littérature n'est plus le référent idéal français, que l'opposition entre Paris et la province est dépassée. On ne croit pas si bien dire : c'est peut-être Paris, donc la France, qui est en train de se diluer dans l'Union européenne, de se provincialiser au sein d'un monde remodelé par l'Amérique. D'aucuns me soufflent que c'est justement maintenant que les régions ont un rôle à jouer, que les nations sont des cadres obsolètes, et les racines nécessaires, une fois lavées de leurs connotations barrésiennes ; et de redéployer le "potentiel" de la "région Limousin" (label auquel je préfère, somme toute celui de province). Je leur réponds que le Limousin n'existe pas : que, des trois départements qui le composent, la Haute-Vienne est tournée vers les Charentes, la sinistre Creuse soupire vers les plaines du Bourbonnais, et la Corrèze vers le Quercy et le Bordelais. Le Limousin est une fiction à quoi la Montagne limousine a donné un semblant d'unité, comme un ensemble de terres rassemblées autour de sa forteresse. Une forteresse, dont le donjon est le plateau de Millevaches, bientôt classé parc naturel régional, donc muséifié. Le régional contre le provincial. Tel serait le salut de ces terres perdues mais sauvées par ses traditions anciennes et récentes : la porcelaine, la liqueur de noix, les bovins à robe rousse, les pommes golden, l'école de Brive, les cèpes, le festival théâtral des Francophonies de Limoges, les centres d'art contemporain de Vassivière et de Meymac, le tourisme vert, le haras de Pompadour - autant dire pas grand chose puisque tout cela est inclus dans une économie qui ne produit plus de symbolique. Le Limousin est mort dans les années soixante avec ses paysans, ses maçons et sa langue ; il n'est plus qu'une entité administrative qui se rêve un avenir que ses villes ne sauraient lui assurer, puisque géographiquement inaccessibles, et un destin culturel sous perfusion des deniers publics. La vraie culture, nous le savons, nous autres écrivains, est ce que Paris transforme en universel. C'est pourquoi je refuse d'être considéré comme un écrivain limousin. Non que je renie mes origines ; bien au contraire, je tâche dans mes livres de faire entendre ce qu'ont été les hivers interminables, le souffle des bois et de la grande nuit contre laquelle mes ancêtres ont lutté sur le haut plateau granitique. Mais le fait d'être originaire de cette province ne saurait m'assigner à résidence : la vraie culture a lieu hors territoire, sur les terres de l'imaginaire, là où les paysans limousins rejoignent les pauvres hères du Mississippi ou d'ailleurs.
Palais des Papes. Avignon. La vieille dame contemple les Demoiselles exposées là, devant elle, sur le mur de pierres claires. Perplexe, elle s'approche de l'artiste pour lui dire son incompréhension. " Parlez-vous le chinois ? ", lui demande Picasso. " Non ", répond-elle et le peintre d'ajouter alors : "cela s'apprend, madame ! " Saint - Priest - Taurion. Soixante ans plus tard. Une initiative privée fait venir dans ce petit village du Limousin plusieurs dizaines de dessins du même Picasso pour trois jours d'exposition publique.
C'est avant que ne s'ouvre à Eymoutiers l'Espace Rebeyrolle situé non loin du Centre National d'Art et du Paysage de Vassivière, lui-même proche de Meymac, cet autre bout d'une route d'art contemporain unique en France et qu'ouvre, aux confins charentais, le merveilleux château de Rochechouart.
En ce même Limousin se dessinent d'ailleurs chaque jour d'autres œuvres (codeurs optiques, interrupteurs, voitures, assiettes, rotules, parfums, aliments, veaux, vaches, moutons, jouets... ) qui font le tour du monde 1 Tiens, j'entends dans la merveille des prairies jaunes et vertes de notre printemps passer les airs baroques, électroniques ou électro - acoustiques, de musiques vivantes qui font connaitre cette région de France partout en Europe et au - delà.
Et cette Montagne Limousine qui dessine, elle, les contours de nouvelles solidarités ; et cette Région (r majuscule) qui est la première en France, et l'une des premières en Europe, à utiliser les outils de la prospective pour penser, écrire et construire son avenir (Limousin 2007, Limousin 2017) ; tout cela fait des choses qui sont un peu autre chose que pas grand chose. Ici s'inventent aussi entre Corrèze, Creuse et Haute-Vienne, de nouveaux matériaux, d'intelligentes manières d'utiliser l'eau pour ici et pour le monde, et puis du théâtre, et puis des meubles en châtaignier et puis de la cuisine, une Technopole rien moins que symbolique et puis... Et puis, c'est tout simple : ici c'est vrai qu'on est bien !
Evidemment, ici l'on a aussi des problèmes, voyez-vous, ici l'on meurt, ici l'on a parfois des envies d'ailleurs comme d'ailleurs dans le métro de Bastille à La Défense ou de Place d'Italie à Bobigny. La région, d'ailleurs, accueille ici chaque année quelques survivants désireux de vivre autrement. Bien sûr que j'aime aussi d'amour Paris, lie de France, contre les raisons mêmes de désespérance que suscite cette région (car région là aussi il y a). Je l'aime pour ce qu'elle est et m'apporte d'universel et de singulier. Comme toutes les régions, elle est un lieu inventé par cette relation unique que tissent entre eux les hommes et la terre. Tout territoire est une œuvre d'art disait Greppi, géographe italien paraphrasant Heine, le poète allemand.
Chaque jour, ici, les habitants, comme ailleurs, créent leur vie et leur région. Avec le Limousin la vie a dessiné une œuvre singulière. Pour la comprendre dans toute sa réalité, sinon l'aimer dans sa vérité, encore faut-il l'apprendre, donc la connaitre. A la préciosité ridicule des brochettes à poncifs même bien cuits sur la culture et sur le Limousin, j'ose donc préférer le jus savoureux de nos viandes qui expriment dans leurs fibres leur histoire, leur terre, leur matière, leur sol. Aux bavardages hors sol, j'ose préférer nos œuvres d'ici ; aux "universaux" mal pensés, nos moissons vraies qui sont, comme toute création, de la culture ; et à tous les métropolismes même intellectuels, nos résistances, fussent - elles modestes.
Vivent toutes les régions, tous les lieux, vive notre Limousin battant, de toute sa sacrée nature, de toute sa création et de toute son histoire.
Et bien le bonjour à tout le monde !
Lo Sendaron (pour les nons-occitanophones prononcer " Lou chendarou ") , (le sentier, le petit chemin qui serpente et qui n'est pas forcément un raccourci), est une association née il y a environ un an à l'initiative d'un groupe de personnes ayant en premier lieu envie de se rencontrer, d'échanger et de s'investir dans la vie culturelle de ce coin de la montagne limousine, du côté de La Nouaille, en Creuse.
L'association a pour but "la protection, la préservation, la mise en valeur et la réhabilitation du patrimoine culturel, environnemental, naturel et bâti du canton de Gentioux et des communes limitrophes.
L'association se réserve la possibilité de mener toutes les actions de sauvetage ou de proposer de conduire toutes actions utiles, notamment sur le patrimoine protégé, ainsi que sur le patrimoine immatériel (tradition, langue, etc.)".
Vaste programme !
Nous avons depuis notre création mis sur pied un atelier de vannerie traditionnelle, des randonnées pédestres (dont une lors des journées du patrimoine), deux bals traditionnels, mais aussi organisé un spectacle de contes lors du festival Coquelicontes avec l'accueil de Monica Burg et mis sur pied une balade contée et musicale en occitan et français.
Le travail le plus motivant aura été pour cette première année de fonctionnement le nettoyage et la remise en état de la fontaine Saint-Pierre / la font Sent-Piare, qui était autrefois le lieu d'approvisionnement en eau potable du bourg de La Nouaille.
Pour 2005, des projets il y en a plein la benata (la hotte) : conférences, spectacles, bals, ateliers de peinture sur bois, de vannerie, randonnées et sorties thématiques, inventaire patrimonial et poursuite de nos chantiers sur les chemins …
Le projet "Pierrot une enfance d'avant-guerre" est né de la découverte d'une collection de films en 9,5 et 16 mm réalisés par Jean Pauty, un cinéaste amateur d'origine treignacoise, dans les années 1930 et 1950. Ces films de très bonne qualité technique constituent un témoignage d'une grande richesse sur cette période de l'avant-guerre et des années 50.
Jean Pauty était membre de l'association des Instituteurs Cinéastes Amateurs de France. Certains de ses courts-métrages étaient réalisés à des fins pédagogiques pour ses élèves. Ils sont montés et contiennent des encarts de texte. Cinéaste itinérant, Jean Pauty nous emmène de la foire de Treignac en 1935, à l'aéroport du Bourget, à l'exposition coloniale de 1931 et dans la région de Quiberon, filmant les scènes de la vie quotidienne avec l'intention manifeste de laisser aux générations futures sa vision du monde mais aussi avec un grand soin esthétique de l'image, du cadre, et une vision pleine d'humanité de ses contemporains.
Le thème récurrent, qui est l'enfance, est le fil conducteur du montage d'archives réalisé par Christelle Le Dortz et Jacques Malnou de Télémillevaches. Instituteur, Jean Pauty a filmé ses élèves lors d'excursions mais surtout mis en image avec une grande tendresse son fils Pierrot que l'on voit grandir au fil du temps entre Paris et le Limousin. Ces images sont situées dans le contexte historique de l'époqu.e et proposent des aller-retours entre l'intimité d'une famille, un regard sur le monde de l'enfance, et celui d'un homme témoin de son époque : images du Front Populaire, des premiers congés payés sur la plage de La Baule, scènes de la vie parisienne, de la ruralité corrézienne et bretonne.
C’était avant la nouvelle grande fracture qui allait encore vider nos bourgs et nos villages ! Sans doute que les années 50 ont connu leur part de difficultés, mais les souvenirs que j’en ai gardés sont ceux d’une période très vivante, et gaie. Nostalgie de l’enfance penseront certains, et ils n’auraient pas tort si le filtre de la mémoire d’enfance ne laissait pas passer quelque chose de la réalité. Mes parents travaillaient dur dans la boulangerie familiale reprise à mon grand-père à la fin de la guerre, mais les souvenirs et les sentiments qu’ils m’ont transmis, comme les gens nombreux qui passaient à la maison, sont ceux de l’optimisme et de la joie de vivre.
Pourtant, comme beaucoup d’autres je suis parti, sans vraiment partir. Et tous ceux nombreux qui l’on fait aussi ont participé à cette nouvelle étape de l’exode qui sonnera pour les corréziens et les creusois de ma génération, comme le coup de grâce du pays. Combien sommes nous sur le plateau et ailleurs à porter en nous ce sentiment de culpabilité qu’a généré ce départ ? Je me demande souvent si ce profond attachement éprouvé vis à vis de toutes les terres d’exode par ceux qui les ont quittées trouve son origine dans ce sentiment qu’en partant ils ont contribué à enlever du sens à la vie des générations passées.
Et c’est sans doute pour cette raison que je rencontre souvent au pays tant de ces gens mettant toute leur énergie à disposition de cette terre en souffrance. Ils sont devenus des amis.
Il y a aussi ceux qui sont restés et qui ont évolué au rythme de l’ensemble de la société, et qui ont contribué à ouvrir le pays et à obtenir de la considération.
Et puis il y a ceux qui sont venus, et qui ont vu dans nos hautes terres limousines un lieu où ils pourraient bâtir une vie. La vie est plus mobile et la montagne limousine est entrée dans cette mobilité, à deux sens enfin, et c’est tant mieux !
Il faut certes du temps dans nos campagnes pour que les greffes prennent. C’est pourtant vital, et nous nous y habituons. Certes tous réunis, ça ne fait pas grand monde à l’échelle des mégalopoles actuelles. Une vision statistique nous place d’ailleurs “au dessous du seuil démographique”… ce qui nous condamne pour l’avenir.
Et c’est sûr, il y a danger !
Pourtant si j’ai voulu ici parler des hommes plus que des chiffres, des sentiments plus que des structures, c’est que j’ai acquis la certitude que l’avenir de notre pays est plus dans les représentations que nous en avons que dans les statistiques : l’optimisme ou le pessimisme, la confiance ou la défiance, notamment entre catégories professionnelles, la solidarité ou le corporatisme,…
Le développement est d’abord dans les têtes. Ce sont ces sentiments, ces conceptions partagées ou non du territoire et de son devenir qui sont à mon sens la source de tout le reste.
A condition de s’en donner les moyens, le reste, c’est à dire la vie des entreprises, les relations sociales, la vie culturelle, les animations, etc. peuvent suivre. A l’inverse sans cette confiance partagée dans le futur toutes les initiatives isolées ne peuvent pas “prendre ”.
Les moyens, c’est d’abord une structure territoriale pour le “Grand Plateau de Millevaches” pouvant jouer l’effet de levier en organisant et facilitant les initiatives économiques et culturelles ayant directement ou indirectement des retombées économiques. Une structure vivante pour faciliter la rencontre entre les nouveaux ruraux et la population plus ancienne, pour accueillir de nombreux visiteurs…
Les moyens, c’est aussi se servir intelligemment de la montée en puissance d’un courant d’opinion touchant une frange de plus en plus large de la société qui porte un regard positif sur la nature et le patrimoine. Ces préoccupations actuelles concernant l’environnement, le paysage, le patrimoine, peuvent être chez nous un socle pour le développement et dans toutes les branches, de l’agriculture au secteur tertiaire. C’est pourquoi j’attends avec espoir la création du Parc Naturel Régional de la Montagne Limousine. En effet c’est un « outil » qui pourra nous aider dans ce sens.
C’est peut-être une manière d’être fidèles aux générations passées et de transmettre un territoire vivant à celles qui suivront.
En juin 2005 le Conseil général de la Haute-Vienne a proposé un questionnaire invitant les citoyens à donner leur avis et à faire part de leurs attentes en matière d'offres et de pratiques sportives, culturelles et associatives. Les questions de la partie culturelle, qui seront ici les seules à être évoquées, étaient d'une généralité confinant à l'abstraction. Aucune précision, et donc aucun choix, n'était proposé sur les activités culturelles concrètes que l'on aimerait voir développées et soutenues.
On nous demandait si l'on souhaitait que soit renforcée " l'offre de spectacle rural ". Le " spectacle rural " peut être mille choses différentes… Et d'abord qu'est-ce qui le différencie substantiellement d'un spectacle urbain ? S'agit-il de spectacles spécialement destinés aux bicanards que les villauds ne sauraient goûter ? On n'ose l'imaginer. Je dis bien "destinés au ruraux", car il n'est jamais question de création rurale dans la consultation…
De même au sujet des " spectacles de notoriété nationale ", mis en concurrence avec les premiers… Notons qu'il pourrait très bien s'agir de spectacles créés dans notre région, voire même, justement, " ruraux " et ayant eu du succès. Mais cela semble exclu par principe. Et qu'entend-on par ces " jeunes talents locaux " que l'on aimerait voir soutenus ? Quels pourraient être les critères de sélection de ces jeunes talents ? Quels types d'expression surtout sont concernés ?
Puisque le questionnaire cultive ce souci de ruralité et de localité on est tout de même très étonné de ne trouver aucune allusion, nulle part, au développement de la culture et de la langue régionales (l'occitan limousin), qui aurait tant besoin de soutien public, pas plus d'ailleurs qu'il n'est fait la moindre référence aux cultures de l'immigration, ni à celles de la grande Europe et du vaste monde, comme si d'une part rien de particulier, de véritablement localisé, que ce territoire aurait en propre, ni d'autre part rien d'international ou du moins d'extra ou de transnational, n'avait à être véritablement pris en compte dans une politique culturelle départementale ! Comme si le but suprême de la culture départementale était de parvenir à attirer des " spectacles " de renommée " nationale ", comme tels nécessairement fabriqués ailleurs (à Paris de préférence) tout en restant soucieux d'apporter aux ruraux un divertissement sur mesure. Mais comment pourraient naître, dans les conditions mêmes supposées par le questionnaire, de " jeunes talents locaux ", alors que la scène rurale et locale sont ainsi vouées à une complète passivité ? On avait bien sûr envie de parler de tout cela en répondant à la dernière question, tout à la fin : " Avez-vous des idées ou des suggestions pour développer le sport, la culture et la vie associative en Haute-Vienne ? ". Et bien sûr nous l'avons fait, exprimant clairement, précisément, ce que les autres questions évitaient de demander.
Depuis quelques semaines, les résultats sont publiés (Haute-Vienne l'express octobre 2005-n° 4). Mais ils sont aussi opaques, génériques et décevants que les questions. Il ne pouvait certes en aller autrement. Quelles aspirations, quels désirs précis recouvrent exactement la demande de développement de l'offre de spectacle en milieu rural (51 %) ou le souci de voir " favoriser la découverte de jeunes talents " ? (31 %) On ne le saura pas, et l'on peut soupçonner qu'on ne voulait surtout pas le savoir. Un résultat d'ailleurs est complètement absent. Celui concernant justement la dernière question, où le citoyen pouvait enfin s'exprimer avec précision.
RELIER (Réseau d'Expérimentation et de Liaison des Initiatives en Espace Rural) est une association nationale qui organise périodiquement des rencontres rassemblant des acteurs du milieu rural (porteurs de projets, créateurs d'activités, animateurs, institutionnels... ). Ces rencontres veulent favoriser les moments d'échanges et de construction entre les personnes présentes, qu'elles soient porteuses de projets ou déjà à l'oeuvre sur leur territoire.
En septembre 2003, l'équipe d'animation de RELIER a sollicité des acteurs du plateau de Millevaches sur la possibilité d'organiser ici des rencontres autour du thème de la culture en milieu rural. En effet, le Plateau de Millevaches et son vivier socioculturel et associatif apparaissait comme un lieu idéal pour accueillir ces rencontres.
Le thème central de ces rencontres sera la culture et son développement en milieu rural. Cinq ateliers (voir ci-dessous) se proposeront de travailler sur différentes questions : Quelles sont les spécificités rurales des questions culturelles ? Dans un contexte actuel plutôt défavorable aux acteurs culturels et aux artistes, est-il possible de vivre localement d'un métier culturel et d'être pleinement acteur économique sur son territoire ? Comment mettre en place une économie solidaire et partagée dans le secteur de la culture ?
100 à 150 personnes en provenance de toute la France sont attendues pour ce rendez-vous : porteurs de pro· jets, actifs dans les milieux artistiques et culturels ruraux, élus, personnes à la recherche d'informations et de connexions... et tous ceux qui localement se sentent concernés par ces questions.
L'objectif est de favoriser la rencontre entre les nombreux artistes et porteurs de projets à vocation culturel· le présents sur le territoire, les publics, les élus, les programmateurs, les habitants... afin de chercher ensemble des pistes pour aider à développer les initiatives culturelles de toutes sortes dans l'espace rural. Il s'agit aussi de permettre un espace d'échange d'expériences où se retrouvent des personnes et des structures d'ici ou d'ailleurs.
En cohérence avec le thème des rencontres le collectif d'organisation a fait le choix de proposer en parallèle aux ateliers et aux débats une programmation culturelle dans le cadre de trois jours de fête, de spectacles et de concerts.
Pour tout renseignement sur les rencontres : Solenne Piriou 06 10 46 18 91 ou auprès d'IPNS. Par ailleurs un programme détaillé sera édité durant l'été et sera disponible sur les lieux des cinq ateliers ainsi qu'auprès des associations organisatrices.
Ils auront lieu sur différents sites le samedi 25 septembre.
Au Centre National d'Art et du Paysage (Vassivière) : Les publics
Comment vivre une pratique artistique avec différents publics ? Comment créer les conditions d'une vraie rencontre ?
Qui est maître d'œuvre de l'accès à la culture?
A Contrechamps (Saint Julien le Petit) : Les démarches transversales
Pourquoi et comment des "non-professionnels" de la culture (agriculteurs, artisans... ) développent-ils, au sein ou en parallèle de leur activité, une dimension culturelle? Comment des actifs ruraux peuvent-ils accueillir des artistes ? Avec quels statuts ?
A Télé Millevaches (Faux-la-Montagne) : Les réseaux culturels
Comment le travail en réseau et la solidarité peuvent construire une nouvelle économie de la culture ? Comment compléter l'existant, par le biais d'échange de savoirs et par la mutualisation de matériels ou le développement de pratiques de troc ?
Au Bar-boutique l'Atelier (Royère) : Les lieux culturels
Comment des lieux qui n'ont pas a priori une vocation culturelle peuvent-ils le devenir ? Et quels échanges peut-on imaginer avec des lieux "labellisés" ?
A la Librairie - galerie d'art "Passe temps" (Eymoutiers): Entre compromis et résistances
Comment affirmer des choix culturels tout en assurant l'insertion dans le territoire et la viabilité économique d'un projet ? Quelles cohabitations entre des groupes culturels différents sur un même territoire ?
Le lendemain matin, dimanche 26 septembre 2004 aura lieu un débat général centré sur la question très vaste : "Comment vivre d'une activité culturelle en milieu rural ?" . Avec différents témoignages.