Elle est discrète, rapportée aux braillards des plateaux et réseaux. Discontinue, face à l’actualité en continue. Et pourtant, elle vit, la presse pas pareille. Dans ces mots-là : presse, et pas pareille. Presse, parce qu’on l’imprime. Avec des opérateurs de machines, de grands rouleaux de papier qui défilent, des colorimétries savantes. Pas pareille, parce que son intérêt se porte de préférence sur le non-dit vécu par les sans-voix, le pas assez explicité du monde, l’inaperçu et le trop peu formulé.
Le temps de ses analyses, la PPP, le trouve, le prend – de toutes façons, elle vit de bouts d’ficelles de ch’val, orgueilleusement pauvre parmi les opulences de la marchandise. Sous forme associative, plus rarement de SCOP, avec ses contributions bénévoles, ses petites mains démultipliées, ses graphistes militant.es, ses relectrices et relecteurs qui se proposent comme ça, « pour aider, parce que c’est bien, ce que vous faites ». Elle vit une vie qu’elle peut bien juger bonne, parce qu’elle sert de chambre d’échos à des luttes menées par des gens ordinaires qui prétendent garder des conditions de vie viables. Aussi, parce qu’en soulevant le couvercle de la normalité, elle rencontre de l’inadmissible, de la sottise décisionnaire, de la brutalité aux mains blanches. Qu’elle les désigne. Les nomme.
On le sait bien, que le prolo prolifère : la presse pas pareille, tout autant. Et elle fait des petits, partout, à Saint-Étienne, Nice, ou Mulhouse. Alors, cette année, ça y est. La PPP se dote d’un S pour « Syndicat » et « Solidarité ». Sonnez trompettes, voici né le Syndicat de la Presse pas pareille – cet avis tient lieu de faire-part.
- Et vous êtes un syndicat de rédactions ou de journalistes ? demandent des camarades pigistes, l’œil allumé. En vrai, les deux, mon capitaine. Vu comment qu’on en produit, de l’information, la distinction ne tient pas bien la route. Officiellement, nous sommes un syndicat de médias. De médias « Pas pareils », donc.
- Mais qu’est-ce que vous entendez au juste par « pas pareille » ? demande, soupçonneux, l’antifa qui suppose des « dissidents » zemmouriens sous chaque pierre. Eh bien, écrite, d’abord. Par des mains humaines. Au moyen des facultés pas encore atrophiées de relier, comparer, rappeler, associer, mettre le présent en perspective. Sa charte rend explicite une communauté minimale de points de vue : « Sont acceptés dans le SPPP, les médias indépendants qui soutiennent les luttes sociales, écologiques et antifascistes. Ils sont favorables à une société juste, solidaire, sans exclure aucune catégorie de personnes ».
- Au fond, vous dites que de petits médias indépendants existent déjà, alors ça consiste en quoi, votre affaire syndicale ?
...Il vous faut un plan comm’ ! On a déjà un diffuseur militant, l’association Les Nouveaux Crieurs, une émission mensuelle, Les Autres voix de la presse, une agence d’abonnements alternative qui démarche les bibliothèques (Bibliopresse)… Et même un sociologue spécialiste des médias indés qui note tout ce qu’on dit quand on se rencontre.Cette volonté de s’associer en syndicat, elle sent son Vallès et sa Séverine, elle parle d’un idéalisme concret, d’une histoire qui nous travaille. Le SPPP ose porter une grande idée. C’est Jipé, de La Brèche, qui nous a trouvé la formule… Tremble, X !
On va réenchanter le papier