"La Ville Noire" de Nicolas Bouchard est un roman "poupée russe" où se mêlent une fresque urbaine, celle du Limoges des années 1900, une intrigue machiavélique à vous glacer le sang et une description sociale et politique de l'époque fort instructive.
Donc Limoges en 1900, avec le quartier de la Boucherie, les bords de Vienne, la place du 14 juillet, l'hôtel de ville, la gare, les industries de la porcelaine et quelques rues et monuments bien brossés.
Ensuite une intrigue, genre Gaston Leroux mais plus "hard". Augustine, toute jeune institutrice est l'héroïne, mais chut !, suspense oblige…
Enfin un arrière fond politique, celui des quelques années qui devancèrent la création de la CGT. Conditions sociales désastreuses dans les usines de porcelaines, manque d'hygiène, travail des enfants.
Prostitution dans des quartiers sordides. Poids des grandes confréries, bourgeoisie toute puissante et bien pensante, femmes sous tutelles… La guerre de 1870 est encore dans toutes les têtes : seules trente années nous en séparent. Une tension palpable, une situation toujours à la limite de la révolte. Quelques hommes politiques de l'époque montrent leur bout de nez… Le fil qui nous relie au passé est bien là. En défilant à Limoges, ces derniers jours de mars aux côtés des 35 autres milles personnes anti-CPE, je repensais au livre de Nicolas Bouchard. Je relevais la tête à gauche, à droite et observais les plus vieux bâtiments que longeait le cortège. Un peu plus de cent ans nous séparaient de l'intrigue du roman. Qu'est-ce qui avait bien pu changer ?
Beaucoup de choses assurément, mais à bien regarder les pancartes des étudiants, les revendications des salariés, c'était toujours ce combat pour une vie meilleure, plus juste, moins précaire, plus humaine et généreuse qui était attendu là bas et encore revendiqué ici. Le temps, cet élastique si curieux…
Bonne lecture !
Olivier Davigo