Cesam-Oxalis est une coopérative d’activités et d’emploi (CAE, voir fonctionnement ci-dessous) née de la rencontre de deux “bonnes fées” œuvrant dans l’Education Populaire : le Réseau d’acteurs de la Montagne Limousine, qui apporte sa connaissance du territoire, et la coopérative Oxalis (basée en Savoie), partenaire technique précieux par sa longue expérience. Depuis 2003, le Réseau d’acteurs est régulièrement sollicité sur la question de la création d’activités sur le Plateau, des besoins des porteurs de projet et de leurs difficultés : isolement des créateurs dans leur montage de projet ou leur recherche de débouchés commerciaux ; besoin de trouver des solutions pour travailler en pluriactivité ou gérer des activités saisonnières ; trouver un équilibre entre travail et vie personnelle.
Fin 2004, le Réseau d’acteurs organise autour de ces questions une journée d’information sur le thème des coopératives d’emploi, et invite alors Oxalis à venir présenter son expérience et son mode de fonctionnement devant une cinquantaine de personnes rassemblées au Villard. L’engouement est immédiat : un groupe d’une vingtaine de personnes (porteurs de projet, personnes ressources du Réseau) se forme dans la foulée pour réfléchir à la mise en place d’une telle structure sur le territoire.
En juin 2005, ce groupe prend la forme d’une association, baptisée Cesam, dont l’objectif est de préfigurer le lancement d’une coopérative d’entrepreneurs- salariés, obtenant alors le soutien financier du Fonds Social Européen et de la Fondation de France. Cette phase de préfiguration permet à Cesam de souder un noyau collectif d’entrepreneurs autour du projet ; elle permet également de construire avec Oxalis la future coopérative (formations, transfert de compétences et d’outils), sous la forme d’un établissement secondaire disposant d’une large autonomie en local. Elle permet enfin de créer des liens avec un grand nombre de partenaires de la région : en juillet 2006, le tour de table de lancement de Cesam- Oxalis en rassemble 10, dont 2 qui acceptent de financer son démarrage : le Conseil régional (au titre de l’Economie solidaire) et la Direction régionale du Travail. La mue entre la forme associative et la forme coopérative peut alors s’achever : l’établissement Cesam-Oxalis voit le jour le 2 octobre 2006.
Pour mieux comprendre ce qu’est Cesam, le plus simple est de regarder les personnes qui en font partie et la font vivre. Au 1er février 2007, elles sont au nombre de 10 : 9 entrepreneurs (certains sont salariés, d’autres en phase de démarrage en CAPE, Contrat d’Appui au Projet d’Entreprise), et un permanent (l’auteur de ces lignes) pour l’accompagnement et l’animation de la vie coopérative.
Côté activités on trouve de tout : il y a pas mal d’artisans (tailleur de pierre sculpteur, créateur de mobilier en châtaignier, accompagnateur en écoauto- construction, boulangère à l’ancienne, textilerie créative) mais aussi un graphiste-créateur de sites internet, un designer en vérandas, un vendeur de bonbons sur marchés et une coiffeuse à domicile. Artisanat, vente ambulante, services à la personne, services aux entreprises et collectivités sont les principales activités que peut accueillir Cesam. Ce n’est pas le cas des métiers liés au bâtiment à cause de la garantie décennale ; seule solution : rejoindre la CAE Espace des Bâtisseurs à Limoges, spécialisée dans ces activités.
Côté géographique, les entrepreneurs de Cesam restent pour l’instant assez centrés sur la Montagne limousine (Peyrat, Bugeat, St Moreil, bureau à Eymoutiers) mais d’autres se trouvent un peu partout en Limousin (autour de Limoges, de La Souterraine ou en Combraille), voire même au sud de l’Indre. En fait la coopérative a vocation à rayonner sur l’échelle de toute la région Limousin, mais pas plus, la distance entre entrepreneurs devenant un frein à l’implication collective.
Mais au-delà de la proximité géographique, c’est l’importance des liens d’affinité entre entrepreneurs, et les valeurs partagées, qui permettent de comprendre cette envie d’être dans Cesam : entraide et convivialité, esprit de coopération, envie de travailler et de vivre autrement en lien avec son territoire, rencontre d’autres personnes d’activités proches... ou très éloignées. Pour être autonome mais sans être isolé. Pour être accompagné, sécurisé, tout en étant responsable. Pour vivre de son activité économique tout en choisissant son rythme entre vie personnelle et activité professionnelle.
Le principe de mixité est fortement ancré dans Cesam-Oxalis : mixité économique entre activités en démarrage et déjà développées, à temps complet et à temps partiel ; mixité territoriale entre projets ruraux et urbains ; mixité sociale par l’origine et les parcours de vie des entrepreneurs, ou par leur âge.
A la vue de ces valeurs, rien d’étonnant alors à ce que Cesam-Oxalis ait décidé, dès sa création, de devenir membre de l’association De fil en réseaux, et qu’elle participe activement aux actions et dynamiques locales : questions de l’accompagnement et de l’accueil ; collectif de créateurs (artisans d’art et artistes) ; organisation de la journée EDORA du 2 février.
La vocation de Cesam-Oxalis est aujourd’hui de pouvoir grandir, et rassembler de nombreux autres créateurs d’activités du Limousin qui partagent ces valeurs et cette envie d’entreprendre en collectif. C’est une question économique de taille critique, afin de se rapprocher peu à peu de l’autofinancement des activités et de conserver son autonomie vis-à-vis des financeurs publics. C’est aussi une question citoyenne de participation à une forme autre, différente, de développement local en milieu rural : celle qui se situe au croisement des envies portées par les créateurs de dynamique et des besoins, présents et émergents, du territoire, mais en s’appuyant d’abord sur la personne et son projet. Histoire de rappeler que l’économie, sous son apparence trompeuse de froide rationalité, appartient à la famille des Sciences humaines... et même, à nos yeux, éminemment humaines !
Christophe Bellec