Un livre de Marc Pataut, qui présente son travail photographique dans l’unité pédopsychiatrique de l’hôpital Esquirol à Limoges (Lienart éditions – 39€).
“Quel est le plus long entre toujours ou jamais ?“
Telle est la question posée par un adolescent psychotique hospitalisé à l’USIPA lors d’une des premières visites de Marc Pataut. L’USIPA est (ou plutôt était puisqu’elle n’existe plus sous ce nom là) l’unité d’hospitalisation pour adolescents de l’hôpital psychiatrique de Limoges. C’est donc une unité de psychiatrie, qui accueille des adolescents en grande souffrance, un lieu fermé à clef, d’où on ne sort pas toujours comme on le veut. On y rencontre des infirmiers, des médecins. On peut y recevoir des médicaments.
Les adolescents qui sont accueillis là vont mal : anorexie graves, psychoses, automutilations, séquelles d’enfances fracassées, etc. Il peut y avoir de la violence, des fugues, des conduites auto-agressives.
C’est là que pendant deux ans et demi, deux à trois jours par mois, Marc Pataut est allé poser son appareil photo et confier quelques appareils aux adolescents présents. Il en est résulté plus de 70 000 clichés réalisés par le photographe et les adolescents. Marc Pataud en a fait un livre où il relate ses visites, ce qui s’y est passé, ses émotions, les rencontres avec les adolescents et les soignants.
Il en a surtout fait un recueil de 150 photos pleine page et c’est superbe. Portraits, autoportraits, noir et blanc et couleurs où les adolescents se mettent en scène et en images, photos montages à la façon de ces livres pour enfants où une partie de la page figure la tête, le corps, les jambes, décalages, etc.
L’ensemble est profondément émouvant, drôle et poignant. Je retiendrai les regards des portraits, ces trois anorexiques hilares drapées dans le manteau de Marc, chacune porteuse de sa sonde gastrique, Virginie faisant le simulacre de taillader son bras… déjà couvert de cicatrices, l’adolescent dansant, les vêtements de Mathilde sur son lit, vides d’elle, le regard de Florian, les portraits de Joseph. Il est difficile de choisir, en fait elles sont toutes belles.
Dominique Weber